Hein quoi? C'est pas un Défi Fantastique ça? C'est même pas un livre dont vous êtes le héros? C'est pour les gosses? C'est quoi? C'est bon?
Bah non...
Des livres dont vous êtes le héros, avant le célèbre Sorcier de la Montagne du Porte-Monstre-Trésor, il y en a eu. Célèbre aux USA, la collection "Choose Your Own Adventure" (Cyoa) a connue une édition assez rapide en france, sous le titre "Choisis Ta Propre Aventure... avec Gerard de Villiers" (l'éditeur mégalo est 3 fois plus gros sur la couverture qu'Edward Packard, l'auteur véritable du livre... Entre parenthèse, le titre de la collection à subitement changé par la suite pour devenir en 1983 « choisis ta propre aventure. » Sans doute que les parents étaient un peu réticent à acheter à leur enfants un livre où l'auteur de SAS (vous savez, ces livres avec des seins sur la couverture) figure en grand.)
Bien que s'adressant à un public plus jeune que les LDVEH, ces livres étaient-ils bons?
Après avoir expérimenté le concept pour faire des aventures extraordinaires sous forme de voyages, que ce soit dans le temps (la grotte du temps) ou dans l'espace (En ballon à travers le sahara, aventures dans l'espace, voyage sous les mers, ton nom de code est Jonas) la collection "cyoa" se lance dans le genre du policier, avec une sorte de Cluedo. Un homme se sent menacé et vous appelle à l'aide. Que vous alliez ou non au dîner où il vous a invité, il va mourir. Soit vous enquêterez sur place, soit vous suivez la piste d'un mystérieux informateur.
Au niveau de la couverture de Paul Granger, tout est fait pour respecter le "genre Cluedo" : un mort, des personnages, un enquêteurs qui fume la pipe, un méchant et des armes du crime potentiels sur la couverture (avec une loupe et un magnetophone.) Les illustrations intérieures sont du même dessinateur, elles sont assez jolies et enfantines, on voit par exemple qu'il s'est amusé à recréer une ambiance de salon cluedien (page 09 et la page 110). La traductrice s'est amusée à changer le nom fantaisiste d'Harlowe Thrombley, en Édouard Balaruc. L'analogie avec Édouard Baladur est sûrement fortuite, étant donné qu'il était peu connu sur la scène politique à l'époque de la traduction de ce livre. (Des amis à moi qui ont vus le livre traîner sur mon bureau ont d'ailleurs cru lire « Philippe de Villiers à tué Édouard Baladur ! » )
Bref. Le problème de ce livre, c'est qu'il trahit toute ses promesses. Je pourrais être clément en disant "oui, mais c'est un livre pour gosse", ça ne justifie en rien la déception progressive de ce livre. Car, on écrit pas une enquête policière de la même façon dont on écrit un récit de voyage, surtout lorsqu'on est dans un Livre-jeu, et surtout lorsqu'on a peu de place pour le faire (100 pages/paragraphes.) Or, ici, c'est bourré d'erreur.
Non pas que ce soit particulièrement linéaire, bien au contraire. Les cyoas proposent souvent de nombreuses fins à la fois positives et négatives. (Ici, on a par exemple 6 fins positives, 5 fins plutôt négatives, 2 morts, et 2 fins....heu, comment dire... ouvertes ? J'en parlerais plus tard) mais plutôt que l'ensemble est assez incohérent. Déjà, s'il y a bien un genre qui n'autorise qu'une seule fin triomphante, c'est bien celui de l'enquête : lorsqu'on a résolu le meurtre et qu'on dévoile devant tout le monde l'identité du meurtrier. Or, ici, il y a plusieurs fins, ce qui occasionne le gros du problème.
Pour vous montrer les défauts de ce livre, j'ai joint un graphique, fait sur Graphviz. Après des pages introductrices (1 à 4) où l'on raconte que vous êtes un enquêteur en culotte courte, vous êtes (enfin, plutôt « tu » car, dans cette édition, on vous parle à la deuxième personne du singulier. Sûrement une singularité du traducteur qui a pensé qu'on tutoie les enfants et qu'on vouvoie les ados) contacté par « Édouarc Balaruc » un homme riche qui a peur de se faire assassiner, et qui vous propose de venir chez lui. Si vous acceptez vous assistez à sa mort lors de la soirée qui viens, si vous n'acceptez pas on vous informe de sa mort au téléphone le lendemain. L'histoire se sépare en deux à ce moment là, une sortes de Cluedo/Agatha Christie-like où vous interrogez les participants au repas fatal et cherchez des indices, (les ronds orange sur le graphique) ou une partie espionnage où vous allez chercher des infos sur un homme nommé le « fauconnier » (oui, la traduction est pitoyable) qui aurait cherché à vous contacter. (Les ronds rouges.) La partie espionnage est rapide, elle a un lien vraiment tordu avec le meurtre (je ne vais pas vous gâcher la surprise*) mais les fins se tiennent.
La partie enquête, elle est vraiment sympathique mais frustrante. On recherche des indices, jusqu'à arriver jusqu'à la page 101 (voir page du graphique) où vous avez le choix entre continuer de rechercher des indices (auquel cas vous revenez à la page 101) abandonner (119) ou donner sa conclusion. Si vous abandonnez (119) : c'est dommage revenez au début. Si vous donnez vos conclusions : (122) « Rentré chez toi, tu composes le numéro de téléphone du commissaire :
-- Inspecteur (Il est inspecteur ou commissaire ce type ?) déclares-tu lorsque tu as obtenu la communication avec Galmier, si vous avez un moment à m'accorder, j'aimerais vous exposer en détail comment à été commis le meurtre d'Edouard Balaruc.
Fin. »
Avouez qu'un tel PFA ça valait le coup de se péter la tête à chercher des indices.
Il existe à partir du paragraphe 101 d'autres façon de finir le livre, soit en se faisant tuer par les meurtrier (page 112) soit en allant voir une copine avec laquelle on déballe tout (115) (même si c'est pas à untel ou à untel qu'on pensait) soit en réunissant tout le monde dans la grande salle où a été commis le meurtre (107). Là aussi, il y a une erreur vous êtez prêts à parler, on vous envoit à la page 110, où ne se trouve PAS la suite (c'est le paragraphe où le labo vous appelle pour les empreintes.) Non seulement c'est une coquille énorme, mais en plus je n'ai absolument pas trouvé de paragraphe raccord avec celui là (A moins qu'on considère l'illustration en deux pages qui se trouve après comme une fin en soit ?)
A l'impossibilité de découvrir de façon « normale » les meurtriers, s'ajoute l'énervement de réussir de façon accidentelle. Au cours de votre pérégrination, vous avez des passages où suite à des hasards du scénario (parce que vous êtes passé voir Nadine, parce que vous avez eu une fausse preuve, parce que vous êtes resté sagement sur votre siège après qu'on vous ait menacé) l'affaire est dévoilé et vous avez réussi sans rien faire. L'un des meilleurs paragraphes restant le 122 où vous dévoilez un enregistrement fait la nuit du meurtre (paragraphe qui est quand même accessible même si vous N'AVEZ PAS passé la nuit chez Balaruc !! Hallucinant !) (Refaites le parcours vous-même sur le graphique, vous verrez !) Je me souviens que l'ayant fait lorsque j'étais petit, j'étais persuadé que c'était en réalité un paragraphe où l'on échouait.
C'est d'autant plus dommage qu'en relisant ce livre, je me suis rendu compte que ce petit univers est finalement assez cohérent : en peu de mot, Edward Packard réussit à donner une certaine forme de psychologie à ses différents personnages, et la réutilisation des clichés des histoires d'enquête était relativement bien vu : poison, indices, vérandas, personnages amicaux, fausses pistes, aides, commissaire incompétent, etc.
Bref, c'est la première tentative d'appliquer le petit monde du polar au genre hypertextuel. C'est manifestement loupé, avec des erreurs de cohérence qu'un gosse de 10 ans est capable de voir. A moins que ces erreurs viennent de l'édition française (ça ne m'étonnerait pas.) Dans ce cas, c'est une autre histoire.
* Ok, vous voulez savoir ? « Le Fauconnier » est un tueur professionnel qui a reçu la visite des assassins d'Edouard Balaruc avant son meurtre, car ils voulaient des « conseils » pour le tuer. Bon, en même temps, c'est un livre pour enfant.
J'ai reçu un email de toi, qui parle d'un précédent message que je n'ai jamais reçu. Mais quand j'essaie de te répondre, ta boîte rejette mon message, qui me revient avec une erreur. Si tu passes encore sur les forums et si tu lis ceci, transmets-moi tes messages à partir d'une adresse email fonctionnelle. ^_^
Méthode 1 : le loyal
Méthode qui consiste à suivre scrupuleusement les règles du livre. Tant pis si on se retrouve avec 24 en endurance mais 7 en habileté.
Méthode 2 : le diététique (l'équilibré).
Je tire autant de dés que nécessaires et je les répartis comme je veux. Par exemple, pour tirer la séquence "habileté, chance, endurance", je tire quatre dés et je les répartis, par exemple (je dis bien par exemple !) le meilleur score en habileté, un score correct en chance et le reste en endurance.
Méthode 3 : l'élu des dieux
Je tire trois personnages d'affilée et je prends celui que je considère le meilleur.
Méthode 4 : le Parangon
Méthode qui consiste à donner les scores maximum au héros. Tout en laissant la chance qu'il puisse perdre contre un adversaire coriace ou des dés décidemment méchants.
Méthode 5 : l'Invulnérable
Pourquoi s'embêter à lire un LDVH avec des dés ? Je remporte tous les combats et tous les tests.
Méthode 6 : l'aventurier raisonnablement compétent
Voir post ci-après
Vous vous souvenez sûrement de la série Sherlock Holmes avec son système monétaire. Voici un extrait de "de bons présages" de Gailman et Pratchett. Edition j'ai lu, page 213.
Note à l'attention des jeunes lecteurs et des étrangers. Un shilling = cinq pennies, ou cinq pence, ou cinq pis [...] Deux farthings = un demi-penny. Deux demi-pennies = un penny. Trois pennies = un thrupenny. Deux thrupence = un sixpence. Deux sixpence = un shilling (ou un "bob" [invariable]). Deux bob = un florin. Deux florin et un sixpence = une demi-couronne. Quatre demi-couronne = un billet de dix bob. Deux billets de dix bob = une livre (ou 240 pennies). Une livre et un shilling = une guinée.
Les Britanniques se sont souvent opposés à la décimalisation, qu'ils jugeaient trop compliquée.
Tout le monde connaît déjà l'admiration inconditionnelle que je voue à Paul Mason et à ses DF (dont je n'ai pourtant lu que la moitié). Je ne surprendrai donc personne en disant que j'adore inconditionnellement L'Ancienne Prophétie, quarante-deuxième tome de la série Défis Fantastiques.
L'histoire débute comme une Créature venue du Chaos : le réveil dans un souterrain, sans aucun souvenir de comment on a pu atterrir là, mais on est tout de même moins écailleux et vert que la bestiole de Jackson. À partir de là, il va nous falloir déterminer nos caractéristiques au cours de l'aventure (excellente idée) et parcourir une bonne partie des Îles du Levant pour enfin découvrir qui on est, et quel lourd héritage on doit supporter, combattre... ou accepter. La quête de l'amnésique n'a certes rien d'original, mais elle est bien menée et de nombreuses scènes et PNJ marquants la ponctuent : la ville en ruines, Crédas, la statue du Prophète Assis, Marzaï le groupe de bandits... Et bien sûr, la grande bataille et le duel fratricide contre Feyor qui s'ensuit, jusqu'au final totalement inattendu et incroyablement excellent : on se retrouve en effet propulsé dans le passé, à l'époque de notre enfance, ce qui remet en place les pièces du puzzle et permet de comprendre comment tout a pu commencer.
On retrouve ici les défauts récurrents de Paul Mason : une difficulté incroyable, et un one-true-path d'une complexité renversante. Elle se ressent en particulier au cours du duel contre Feyor, contre lequel il faut lancer ses sortilèges un peu au hasard en priant pour que ça marche. Difficile de se retenir de tricher, ici. Néanmoins, cette difficulté renversante permet de découvrir quelques PFA excellents, très originaux (je pense en particulier au centaure et à la pièce de monnaie).
Tout comme Les Mercenaires du Levant (lequel possède de nombreux liens avec L'Ancienne Prophétie, personnages et lieux se retrouvant de l'un à l'autre), ce livre s'apprécie de plus en plus au fil des relectures, car même si on a fini par atteindre le tant espéré paragraphe final, tout n'est pas forcément clair, et le refaire permet de découvrir de nouvelles choses à chaque fois - ce qui n'est pas tellement le cas de La Créature venue du Chaos, où l'auteur nous donne toutes les clés en main, si bien qu'une fois qu'on l'a terminé, le refaire ne présente plus guère d'intérêt.
Incontestablement l'un de mes DF favoris. Pour peu que l'on supporte le côté one-true-path, c'est une excellente lecture.