je poursuis ma lecture des mini-AVH en lice en débutant les PDF téléchargés, après avoir joué en ligne
Manu de ledahu, avant-hier
contrairement aux concours précédents, je choisis de ne pas suivre l'ordre chronologique de publication des oeuvres, mais plutôt mon instinct
je me suis donc attelé hier dimanche à cette
Recherche du temps merdu de fifre
pourquoi celle-ci ? eh bien justement parce que fifre ! et que celui qui ne s'est jamais rué, dès sa publication, sur une AVH portant sa signature me jette le premier étron
et, en parlant d'étron, c'est justement le prétexte de cette mini- longue, verbeuse, originale et très écrite
moi qui m'attendais à une aventure du style Pat Magnum 3 : une nuit aux toilettes, j'ai bien vite été pris de court, puis curieux, puis admiratif
car fifre, qui nous a habitués à des aventures courtes, nerveuses, bourrées d'humour, de traits d'esprit et de jeux de mots, se révèle (enfin) en déployant un style, un vocabulaire et une aisance d'écriture qui, personnellement, m'ont fait me mettre à genoux et prendre sa main pour la poser sur ma tête dans l'espoir qu'il voulût bien me bénir (et je me suis félicité d'avoir moi-même, pour une toute autre raison, jeté l'éponge et la mini- sur laquelle je planchais)
moi qui, comme un certain auteur, passe des heures, en suant sang et eau, à me relire pour reprendre une phrase, une tournure, je me retrouvais à lire des lignes évidentes et maîtrisées que c'en est presque à verdir de honte
à tel point qu'il m'a fallu reporter au lendemain mon retour sur cette mini-, au moins pour la digérer
initiée à la suite d'une
boutade innocente de gynogege, cette aventure nous narre à la troisième personne loup*ardentesque le cheminement poussif et hasardeux de
Fécal pardon, Calef se heurtant au monde qui l'entoure, un futur (pas si lointain) dystopique (pas si improbable) où les numéros de téléphone ont douze chiffres et l'Administration est l'entité froide, inhumaine et multicéphale devenue le maître des humains sans en avoir l'air
la première partie labyrinthique rappelle furieusement la recherche éperdue du laisser-passer A38 dans la Maison qui Rend Fou des Douze travaux d'Astérix, mais aussi l'inhumanité aux commandes de la
Crimson Permanent Assurance de Terry Gilliam et surtout la paperasserie outrancière et étouffante cachée au coeur de Brazil du même Gilliam
la partie suivante amène le héros à rencontrer la Résistance, dans un deuxième acte plus propice au développement de considérations profondes de notre propre époque, de notre société, allant jusqu'à évoquer par allégorie l'invasion silencieuse de l'IA, voire jusqu'à décrire, toujours par analogie, ce qui a pu se passer sur ce forum en février (vous pouvez conclure que j'extrapole trop en voulant voir trop loin et vous auriez sans doute raison, moi en tout cas je vois même une critique personnelle des échanges incontrôlés qui ont pu avoir lieu à cette occasion)
la troisième partie décrit le retour de Calef au Palais de l'Administration pour un final risqué et étonnant, parce que non évident et pouvant être ressenti par certains comme trop fantastique au regard du monde très matériel décrit jusque là
mais pour qui l'accepte, et j'en suis, cette nouvelle allégorie revêt tout du nécessaire et de l'impérieux, comme une envie de chiquer, car " il n'y a qu'un 'a' de résignation entre défection et défécation "
en bref et pour ma part, cette mini serait déjà tout à fait la candidate désignée pour être sur mon podium, quand bien même me restent encore sept mini- à jouer (lesquelles, malheureusement, vont devoir supporter la comparaison)
ce Temps Merdu, sous couvert de parler d'excréments en se servant au fil du texte des termes du champ lexical concerné, est une parabole longue de 53 pages permettant à son auteur de développer diverses considérations lui tenant à coeur là où, auparavant dans ses précédentes oeuvres, il se contentait de bouts de phrase au détour des paragraphes pour ne pas alourdir sa volonté de légèreté et d'humour
n'ayez crainte, humour il y a toujours, à l'occasion de deux ou trois traits d'esprit plus ou moins discrets (je dois le reconnaître, la mère Docu m'a fait m'esclaffer un bon moment)
mais n'espérez pas retrouver ici le fifre que vous connaissez, préparez-vous plutôt à rencontrer un auteur profond, critique, philosophe, acerbe, voire nihiliste : le caca n'est ici que le sujet, potache, alors que le propos est autrement plus pensé et réfléchi
oui, disais-je, ce Temps Merdu serait tout indiqué pour phagocyter d'emblée mon podium mais, et j'utilisais le conditionnel à escient, un détail de taille m'assaille et me tiraille : le nombre final de caractères bien au-dela de la limite
en y réfléchissant, le texte ne saurait souffrir aucune coupe, à aucun endroit, ce serait par trop dénaturer le corps global et sa teneur
non, cette aventure ne doit pas être triturée (à la limite, fifre, j'estime qu'elle gagnerait à être relue de manière sérieuse pour gommer les caractères en trop, les virgules mal placées, les guillemets orphelins, les cqouilles et rajouter les caractères et les petits mots manquants, afin d'atteindre l'excellence)
mais je comprends tout à fait le choix des assesseurs de conserver cette aventure parmi celles en lice, tant elle correspond au thème et, j'imagine, à quel point d'éreintement fifre a dû en finir la rédaction
mais au mépris des huit autres mini- qui, elles, ont respecté la contrainte ? je ne sais...
je le dis ouvertement, si ce n'était ce détail normalement rédhibitoire, j'allouerais 4 points d'emblée à cette aventure mais, en l'état, ce serait mépriser les autres auteurs en lice
alors j'en suis arrivé à cette conclusion en demi-teinte, la moins pire, et ça me navre : cette mini- sera grevée d'un handicap dans mon tableau personnel, je verrai finalement si elle apparaît parmi les mini- auxquelles j'allouerai des points une fois toutes les autres jouées
mais que cela ne m'empêche pas, fifre, de te faire part tout d'abord de mes remerciements pour ce moment d'exception, et surtout de mon profond respect