Noms communs inventés
#1
Je m'explique :

Principalement dans les AVH mettant en scène un univers bien particulier, l'auteur peut être tenté, pour renforcer l'immersion, de nommer certaines choses, certains personnages ou lieux, par un nom inventé. Sans aller jusqu'à créer un langage entier complet comme Tolkien, on peut inclure ici et là un nom inventé, pour désigner un objet, un personnage, un évènement.
Par exemple (totalement inventés) :
- Vous arrivez enfin devant l'alcantaraz, la grande bibliothèque, but de votre quête.
- Au jour succède la nuit et bientôt, Astarté, la lune, éclaire la forêt de sa clarté.
- Votre adversaire dégaine aussitôt son nevi, redoutable glaive à double tranchant, acéré comme un rasoir.
- Le cavalier inconnu est monté sur un xapur, un de ces lézards géants apprivoisés que l'on rencontre en ces contrées.

En ce qui concerne mes AVH :
Dans Alshaya, l'Alshaya "chaussée des géants", est la route que l'on suit jusqu'à la cité d'Eshatta.
Dans La piste du jaguar, la monnaie qu'on utilisera est le Quetza, en référence au quetzal, oiseau sacré gravé sur les pièces.

Mais en général, c'est quelque chose que j'utilise peu. La raison ?
Elle vient du cycle d'Imaro, écrit par feu Charlie Saunders et qui se déroule dans un univers "African Fantasy". L'auteur donne un nom inventé pour beaucoup de choses : la lune, le guépard, le lion, la brousse, la sagaie utilisée par le peuple d'Imaro, le rituel de passage, le code d'honneur de sa tribu... C'est vrai que ça renforce l'immersion. Mais le problème, c'est que si Saunders donne la "traduction" la première fois, par la suite, il n'emploie plus que le mot inventé. Par exemple, si "Bidule" signifie la lune, dans tout le reste de la saga, à chaque fois qu'il parle de la lune, il écrit "bidule". Et ça se complique quand on réalise que des noms comme ça, on en trouve une bonne quinzaine, parfois deux ou trois dans une même phrase. Autant dire que si on n'a pas une bonne mémoire, certains passages deviennent du chinois... On en viendrait presque à avoir un lexique à la fin du bouquin avec chaque nom et ce qu'il désigne.
Un peu comme si j'écrivais (en reprenant mes premiers exemples) :
Tenant fermement votre nevi en main, vous montez les marches de l'alcantaraz, éclairées par la lueur d'Astarté. Seul le grognement de votre xapur vient rompre le silence de la nuit.

Pour prendre une référence cinématographique, c'est un peu comme les passages parlés en langue elfique dans Le seigneur des anneaux. Certains diront que ça renforce l'immersion, moi j'ai trouvé ça chiant de me taper les sous-titres et ça m'a plus déconnecté du film, même un bref moment, qu'immergé.

Donc, au final, c'est une technique à laquelle je ne recours jamais ou alors de façon exceptionnelle, avec un mot ou un nom ici et là, pour faire touche locale et toujours en mettant la traduction à côté. On peut par exemple écrire : "Il revient à un guerrier tel que vous de suivre les enseignements du Karawashi, le code d'honneur des guerriers". Mais après, dans le reste de l'AVH, je ne l'emploie plus ou quasiment plus.

Et vous, qu'en pensez-vous ? Employez-vous ces noms inventés dans vos AVH, pour en renforcer l'immersion ? De toutes celles que j'ai lues, je ne crois pas en avoir croisé beaucoup.
Anywhere out of the world
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#2
Je ne me rappelle pas l'avoir beaucoup fait dans mes fictions interactives et AVH, mais dans mes nouvelles et autres petits textes il m'est arrivé d'intégrer des néologismes. Souvent pour des raisons humoristiques, et de manière ponctuelle (des mots qui ne reviennent pas, en somme).

L'idée du lexique parallèle, ça pourrait me tenter dans certains contextes (pour de la sci-fi notamment), toutefois je pense aussi qu'il faut y aller mollo, sans quoi ça peut devenir simplement pénible.
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#3
Ce sujet a toujours été un de mes points noirs en tant que lecteur. Ma mémoire est généralement très bonne mais elle est lésée par une effroyable mémoire des noms.
Que ce soit à l'oral ou à l'écrit, pour les lieux ou les personnages, tous les noms propres me sortent de l'esprit en quelques secondes et il ne m'en reste ensuite que des bribes de lettres (souvent erronées d'ailleurs).
Et les noms communs inventés ont pour moi exactement le même effet. Dès lors qu'un livre en utilise plus d'un ou deux, je sais que je vais devoir redoubler d'efforts si je veux comprendre la suite. S'il y en a vraiment trop, je finis par me sentir submergé et j'ai déjà arrêté certaines lectures à cause de cela.
J'ai récemment lu Les ombres d'Esteren : Chemins de traverse, je l'ai bien apprécié et je pense bientôt en écrire une critique sur le forum. Par contre dès la première page d'introduction je me suis retrouvé face à une bonne douzaines de noms propres et communs inventés, j'ai croisé très fort les doigts pour qu'il ne soit nécessaire d'en retenir aucun.

Pendant longtemps j'ai pensé que les auteurs qui en abusaient s'étaient trop concentrés sur le développement de leur univers, aux dépens de l'histoire et de l'accessibilité. Mais après en avoir très souvent débattu avec une personne de mon entourage à l'avis diamétralement opposé, je me suis rendu compte que certains lecteurs adorent ce concept et se sentent toujours plus immergé à chaque nouveau nom inventé, sans que ce ne soit jamais trop.
Donc je dirais que c'est comme pour tout : il faut savoir en utiliser avec parcimonie. Assez pour immerger, mais pas trop pour ne pas submerger.

Dans le cadre de mes écritures, je préfère ne pas y avoir recours du tout. En guise de noms communs inventés, je préfère utiliser des expressions créées à partir de noms connus qui ont du sens. Pour donner un exemple qui parlera à beaucoup : les "marcheurs blancs" dans Game of Thrones. C'est un nom compréhensible, facile à retenir, qui a du sens, bien intégré à l'histoire et même plus impactant que s'ils avaient été présentés comme des créatures appelées les xynurmakis.
Je vais même plus loin et j'applique la même technique aux noms de lieux. Au revoir le royaume Moldenstir et le mont Hlaafen, bonjour le château Hurle-Rage et la Forêt des Germes de Sang.
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#4
Le lexique en fin de bouquin, c'est infernal.
Il y a quelques années, j'ai lu un roman historique (très bon d'ailleurs) ayant pour cadre la Rome de Néron. Seulement l'auteur y avait incorporé beaucoup de noms latins pour désigner les pièces d'une maison, les heures de la journée, les parties d'un vêtement, certaines fêtes et cérémonies... Même pour un passionné d'antiquité gréco-romaine comme moi, il fallait parfois interrompre ma lecture et aller au lexique chercher la signification de tel mot, ça devenait franchement lourd.

C'est pourquoi j'y ai renoncé quand j'ai créé le monde de Thérion et ses différentes régions, Shamanka, Shamayan, Nagdralore, les cinq théocraties... J'ai certes donné un nom à certaines races (les Avars pour les hommes-lions, les Ankas pour les hommes-buffles...) mais je me suis arrangé pour les citer souvent, de manière à ce que le lecteur s'y habitue et finisse par les identifier.

Pour les noms propres, il y en a pas mal dans ma saga, surtout au niveau des personnages mais je procède de la même manière : je fais revenir les plus importants de manière récurrente, ils deviennent des PNJ principaux et le lecteur finit par les identifier assez facilement.

Et puis, au niveau écriture toujours, j'évite de trop répéter un nom commun ou nom propre dans un même paragraphe. Si par exemple, on dialogue avec un Avar (homme-lion), je vais écrire :
Le chef des Avars s'installe en face de vous, prêt à vous écouter... Votre interlocuteur sourit à votre question... Mais la réponse de l'homme-lion n'est pas celle que vous espériez... L'Avar secoue sa crinière rouge avec agacement...
C'est toujours mieux que d'écrire "L'Avar" quatre fois.
Pareil avec les noms propres.
Si on dialogue avec Néroli, je vais écrire :
Néroli vous écoute avec attention... Votre remarque amène un sourire chez le jeune homme... Votre interlocuteur se rend visiblement à vos arguments... Vous convenez donc de vous retrouver ce soir à la neuvième heure...

Donc oui, au final, j'utilise très peu ces noms inventés, pour ne pas "noyer" le lecteur.
La tentation est grande pourtant quand on crée de toutes pièces un univers, pour le rendre plus immersif. Mais ça devient vite lourd si c'est mal dosé.
Je garde ça pour quelques lieux et personnages récurrents, emblématiques, pour quelques objets bien particuliers mais ça s'arrête là aussi. L'immersion en pâtit peut-être mais la compréhension du lecteur passe avant.
Anywhere out of the world
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#5
@Vs
Merci d'avoir lancé de nouveau sujet, comme d'habitude c'est hyper intéressant (comme celui sur les dialogues, celui sur les voyages...). Cela nous permet de nous recentrer sur l'essentiel et sur ce qui nous réunit tous ici : l'écriture !
@Jerry
Merci pour le conseil. C'est hyper futé. Je vais creuser cette piste.
J'ai un vague projet d'AVH de SF et je me heurte à cette difficulté du lexique rapidement incompréhensible que cela implique de créer.
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#6
Pour ce qui est d'une AVH SF, quand j'ai commencé la mienne, A la dérive, j'ai imaginé certains objets désignés par un nom inventé : Communicator, Elevator, Lasergun... Des noms à consonnance anglaise puisque l'anglais est la langue parlée par tout l'équipage à bord du vaisseau.

Mais je les ai expliqués dès le départ.
Dans l'introduction, le vaisseau et son fonctionnement sont décrits en détails et il est expliqué que chaque membre d'équipage est équipé d'un Communicator (téléphone portable de dernière génération), que le vaisseau est équipé d'Elevators (ascenseurs verticaux et horizontaux) et que les agents de sécurité sont armés de Laserguns (pistolets-lasers).

Du coup, une fois que le lecteur a lu l'introduction, il sait à quoi s'en tenir et je peux utiliser ces termes par la suite sans nuire à sa compréhension.
Anywhere out of the world
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