25/01/2011, 03:12
Parmi ceux qui ont énoncé une préférence, le Cercle sans Commencement a remporté le sondage. Les autres disaient que l'aventure choisie de les dérangeait pas. Nous allons donc commencer le jeu. Tout d'abord, voici l'introduction.
Revêtu de fourrures épaisses, le jeune homme contemplait la vallée – le ravin, plutôt – qui s’ouvrait devant lui. Trois pas le précipiteraient le long de la pente abrupte, vers une mort possible et de graves blessures certaines. Il ne montrait toutefois aucune angoisse. Il avait le pied solide, et ce n’était pas le vent, même violent, qui allait rompre son équilibre.
Dans le ciel, deux minables soleils bleus, froids et maladifs, avaient cessé depuis longtemps d’offrir leur chaleur à ce monde désolé. Ils brillaient dans un ciel couleur de métal liquide, où des nuages rachitiques, déchiquetés, erraient sans destination. Au niveau du sol, sur les plaines de glace, le vent soulevait la neige sèche et poudreuse, l’entraînait dans une folle danse aérienne, puis la déposait à nouveau. Rien dans ce paysage froid ne changeait jamais. Xenâvo était un monde pétrifié par les glaces éternelles.
Un monde de mort.
On était donc en droit de se demander ce que le jeune homme faisait là, en bordure du ravin, loin de son pays d’origine. Surtout lorsque l’on voyait son expression, qui n’était pas du tout mélancolique. Au contraire, il affichait un grand sourire de triomphe.
— Alors tu as finalement réalisé ton rêve, Ziô.
Le jeune homme tourna la tête. Syôren, son ami de longue date, se tenait derrière lui, vêtu, lui aussi, de fourrures grises et lourdes. La température glaciale exigeait des hommes qu’ils se revêtent ainsi, car toute peau exposée se serait frigorifiée en moins d’un minazen. Personne ne survivait longtemps au froid de Xenâvo.
Désignant le ravin profond, le dénommé Ziô parla par-dessus la plainte lugubre du vent. Le sourire n’avait pas quitté son visage.
— Syôren, comment peux-tu rester indifférent ? Nous serons les premiers à entrer dans le Sanctuaire de Saraveth ! Les secrets des peuples ancestraux nous attendent peut-être là-dessous !
Syôren secoua la tête, concédant un sourire à son ami.
— Tu vis dans ton propre univers, Ziô. Comment peux-tu consacrer ton énergie à ces vieilles ruines là-dessous, alors que notre monde est peut-être en danger ? Tu dois savoir qu’on parle du retour des Cent Jours et que les Cinq Rois mobilisent déjà les armées de notre empire. Ton propre père –
Ziô coupa la parole à son ami.
— Mon père et moi n’avons pas les mêmes ambitions. Je sais qu’il n’approuve pas de mon mode de vie, mais il a déjà deux fils qui assureront la succession de la Deuxième Maison. Je suis son sixième enfant et je n’ai aucun intérêt à monter sur le trône, même si j’étais assez naïf pour y rêver. Les ambitions militaires de la Deuxième Maison, Oshaqimarendahl ax Mù – je m’en balance.
Plongeant son regard dans la vallée profonde, Ziô continua sur sa lancée.
— Si les Cent Jours reviennent, mon père et mes frères commanderont nos armées. Ils seront même fiers de le faire à ma place. Ma présence là-bas est inutile et tu le sais autant que moi.
Un sourire sardonique plissa les lèvres de Ziô.
— Mon père ne tient pas particulièrement à m’avoir à ses côtés, de toute façon. C’est pour cela que tu es officiellement chargé de … veiller sur moi. Tout ce qui importe, c’est que je me tienne tranquille et que je ne ternisse pas la grande réputation de la Deuxième Maison. N’est-ce pas ?
Syôren eut un sourire un peu coupable.
— Tu le savais ?
— Mais oui. Tu détestes le froid, Syô. Tu ne serais jamais venu ici sans les directives de ma famille adorée. Dis-moi, que mets-tu dans tes rapports ? J’espère au moins que tu embellis un peu les choses. Ce n’est pas toujours glorieux d’explorer les vieilles tombes des peuples ancestraux.
— Sûr. Pour preuve : Le grand Zayas ix Oshaqimarendahl ax Mù conquit aujourd’hui les terres hostiles de Xenâvo et soumit les peuples indigènes au nom de la grande et respectée Deuxième Maison de l’Empire de Qô Rel. Son triomphe fut tel qu’on lui offrit d’entrer dans un vieux temple poussiéreux, où il gaspilla un qarizen de sa noble vie.
— Tout sarcasme mis de côté, Syôren, tu sais autant que moi que cette découverte est extraordinaire. Ce ravin n’était qu’une fissure dans la glace voilà un deqazen. Sans les séismes du dernier myatzen, le Sanctuaire de Saraveth n’aurait peut-être jamais été découvert. À cause de cette histoire du retour des Cent Jours, tous les royaumes sont inquiets et personne n’est venu ici avant nous. J’en rêve depuis que je suis tout petit – découvrir le Sanctuaire de Saraveth ! Je n’arrive toujours pas à croire que cet honneur me reviendra vraiment !
— Tu n’as pas encore la preuve que ce soit le Sanctuaire de Saraveth. Et puis, même si tu as raison, pourquoi t’emballes-tu autant ? Ce n’est qu’un vieux tas de ruines comme tous les autres. Tu sais comme tout le monde que les peuples ancestraux ont bâti des temples partout sur la carte. Tu en as personnellement exploré au moins trente.
— Oui, mais le Sanctuaire était bâti aux portes de la Cité du Centre. Si c’est vraiment Saraveth là-dessous – et j’en suis déjà sûr – nous allons peut-être trouver la réponse à toutes nos questions ! Pourquoi les peuples anciens ont-ils disparu ? Où sont-ils allés ? Connaissaient-ils les monstres des Cent Jours ? Les ont-ils déjà affrontés ? Possédaient-ils des connaissances, des sciences que nous n’avons pas ?
— Ont-ils entreposé dans le Sanctuaire assez de zimérite pour rendre mon ami Ziô riche pour la vie ?
Ziô se tut, un peu gêné. Il fallait avouer que la zimérite, cette matière cristalline dont le cœur renfermait une flamme orangée, était l’un des minéraux les plus recherchés de tout l’Empire, et que les temples des ancêtres étaient les meilleurs endroits pour en trouver. Ziô lui-même, dans sa jeunesse, s’en était plusieurs fois rempli les poches. Malheureusement, il avait toujours succombé à la tentation de faire des dépenses irréfléchies, et à chaque fois, son magot s’était vite évanoui.
S’il y avait de la zimérite à trouver dans le Sanctuaire, en ces jours où ce minéral, de plus en plus rare, valait des sommes de plus en plus considérables, Ziô se promettait de gérer intelligemment sa nouvelle fortune.
Il savait, toutefois, qu’il s’amuserait bien davantage à la dilapider.
Syôren fit du sarcasme à nouveau.
— Un explorateur de ruines qui se fiche, au fond, des ruines … Un fils de Maison qui se fiche, au fond, des Maisons de l’empire … Un pilleur de trésors qui se fiche, au fond, des richesses … Dis-moi, Ziô, qu’espères-tu vraiment accomplir ici ?
— Je ne sais pas, avoua le jeune homme. Je crois que j’aime découvrir, c’est tout. Je suis simplement né dans la mauvaise famille.
Syôren s’enfouit davantage dans ses fourrures.
— Retournons au campement. S’il fait assez froid pour geler les soleils dans le ciel, je ne vois pas pourquoi nous devrions rester ici à grelotter.
Ziô acquiesça. Il savait où était le Sanctuaire, à présent. Puisque le vieux temple ne s’enfuirait pas tout seul, il ne voyait rien de mal à retourner au campement.
L’expédition commandée par Ziô était composée de dix membres, dont lui-même et Syôren. Peu après leur arrivée dans les plaines froides de Xenâvo, ils étaient passés à seize par l’inclusion de six filles du peuple de Xivth, qui devaient leur servir de guides. Syôren avait protesté, disant que leur présence n’était pas nécessaire, mais Ziô lui avait fait comprendre que personne, dans l’expédition, ne connaissait les terres de Xenâvo aussi bien que les énigmatiques jeunes habitantes du pays glacé.
La plus âgée des six filles, Zavia, les attendait à l’extérieur de la tente principale. Une fois de plus, Syôren eut peine à imaginer comment ce peuple pouvait même exister. La jeune fille avait les cheveux gris et longs et le visage bleuté, comme si elle mourait de froid. C’était d’ailleurs ce qu’elle aurait dû faire, vêtue d’une robe légère, chaussée de petites sandales, dans le froid mordant de Xenâvo. Pourtant, Zavia avait déjà avoué qu’elle souffrait davantage de la tiédeur. Pour elle, comme pour les cinq autres filles de sa race, cette température glaciale était l’équivalent d’un été torride.
C’était d’ailleurs l’été en Xenâvo.
— As-tu toujours aussi chaud, Zavia ?
— Oui, mais avec le vent, je peux le supporter … Mes amies ont-elles donné signe de vie ?
Les amies de Zavia – les cinq autres filles du peuple de Xivth – étaient parties avec une journée d’avance vers le Sanctuaire. Elles devaient y entrer, constater rapidement la topographie et l’intégrité structurelle des lieux, ensuite attendre l’arrivée de l’expédition. Toutefois, en arrivant, Ziô et les siens n’avaient trouvé aucune trace de Maësha, de Niœlla, ou de toute autre fille de Xivth. « Je souhaite qu’elles soient mortes heureuses », avait dit Zavia, à la consternation de Ziô et Syôren.
Les deux jeunes hommes avaient appris plus tard que la mort était perçue comme un événement heureux par le peuple de Xivth. Pour une fille, en particulier, il était important de mourir jeune et belle afin de passer heureuse à la cinquième vie.
En voulant savoir quelles étaient les quatre premières, Ziô et Syôren n’avaient reçu que des réponses vagues et mystérieuses.
— La nuit va tomber, dit Zavia. Demain, nous irons aux ruines.
Ziô se surprit à ressentir une grande déception, comme s’il venait d’apprendre que son vœu le plus cher ne serait pas exaucé. Il se força à voir les choses en perspective. Le Sanctuaire n’allait pas disparaître, et demain, à l’aube, son exploration serait moins dangereuse qu’en pleine nuit.
Ziô n’était pas du peuple de Xivth et n’avait aucune intention de mourir jeune.
— Alors ce sera pour demain, acquiesça-t-il à contrecœur.
Blotti dans ses fourrures, Ziô entra dans sa tente personnelle et se prépara à dormir. Il fallait que le lendemain vienne vite.
L’exploration du Sanctuaire de Saraveth, qui avait attendu d’innombrables terizens, ne devait pas attendre un jour de plus.
LES RUINES FROIDES DE XENAVO
Revêtu de fourrures épaisses, le jeune homme contemplait la vallée – le ravin, plutôt – qui s’ouvrait devant lui. Trois pas le précipiteraient le long de la pente abrupte, vers une mort possible et de graves blessures certaines. Il ne montrait toutefois aucune angoisse. Il avait le pied solide, et ce n’était pas le vent, même violent, qui allait rompre son équilibre.
Dans le ciel, deux minables soleils bleus, froids et maladifs, avaient cessé depuis longtemps d’offrir leur chaleur à ce monde désolé. Ils brillaient dans un ciel couleur de métal liquide, où des nuages rachitiques, déchiquetés, erraient sans destination. Au niveau du sol, sur les plaines de glace, le vent soulevait la neige sèche et poudreuse, l’entraînait dans une folle danse aérienne, puis la déposait à nouveau. Rien dans ce paysage froid ne changeait jamais. Xenâvo était un monde pétrifié par les glaces éternelles.
Un monde de mort.
On était donc en droit de se demander ce que le jeune homme faisait là, en bordure du ravin, loin de son pays d’origine. Surtout lorsque l’on voyait son expression, qui n’était pas du tout mélancolique. Au contraire, il affichait un grand sourire de triomphe.
— Alors tu as finalement réalisé ton rêve, Ziô.
Le jeune homme tourna la tête. Syôren, son ami de longue date, se tenait derrière lui, vêtu, lui aussi, de fourrures grises et lourdes. La température glaciale exigeait des hommes qu’ils se revêtent ainsi, car toute peau exposée se serait frigorifiée en moins d’un minazen. Personne ne survivait longtemps au froid de Xenâvo.
Désignant le ravin profond, le dénommé Ziô parla par-dessus la plainte lugubre du vent. Le sourire n’avait pas quitté son visage.
— Syôren, comment peux-tu rester indifférent ? Nous serons les premiers à entrer dans le Sanctuaire de Saraveth ! Les secrets des peuples ancestraux nous attendent peut-être là-dessous !
Syôren secoua la tête, concédant un sourire à son ami.
— Tu vis dans ton propre univers, Ziô. Comment peux-tu consacrer ton énergie à ces vieilles ruines là-dessous, alors que notre monde est peut-être en danger ? Tu dois savoir qu’on parle du retour des Cent Jours et que les Cinq Rois mobilisent déjà les armées de notre empire. Ton propre père –
Ziô coupa la parole à son ami.
— Mon père et moi n’avons pas les mêmes ambitions. Je sais qu’il n’approuve pas de mon mode de vie, mais il a déjà deux fils qui assureront la succession de la Deuxième Maison. Je suis son sixième enfant et je n’ai aucun intérêt à monter sur le trône, même si j’étais assez naïf pour y rêver. Les ambitions militaires de la Deuxième Maison, Oshaqimarendahl ax Mù – je m’en balance.
Plongeant son regard dans la vallée profonde, Ziô continua sur sa lancée.
— Si les Cent Jours reviennent, mon père et mes frères commanderont nos armées. Ils seront même fiers de le faire à ma place. Ma présence là-bas est inutile et tu le sais autant que moi.
Un sourire sardonique plissa les lèvres de Ziô.
— Mon père ne tient pas particulièrement à m’avoir à ses côtés, de toute façon. C’est pour cela que tu es officiellement chargé de … veiller sur moi. Tout ce qui importe, c’est que je me tienne tranquille et que je ne ternisse pas la grande réputation de la Deuxième Maison. N’est-ce pas ?
Syôren eut un sourire un peu coupable.
— Tu le savais ?
— Mais oui. Tu détestes le froid, Syô. Tu ne serais jamais venu ici sans les directives de ma famille adorée. Dis-moi, que mets-tu dans tes rapports ? J’espère au moins que tu embellis un peu les choses. Ce n’est pas toujours glorieux d’explorer les vieilles tombes des peuples ancestraux.
— Sûr. Pour preuve : Le grand Zayas ix Oshaqimarendahl ax Mù conquit aujourd’hui les terres hostiles de Xenâvo et soumit les peuples indigènes au nom de la grande et respectée Deuxième Maison de l’Empire de Qô Rel. Son triomphe fut tel qu’on lui offrit d’entrer dans un vieux temple poussiéreux, où il gaspilla un qarizen de sa noble vie.
— Tout sarcasme mis de côté, Syôren, tu sais autant que moi que cette découverte est extraordinaire. Ce ravin n’était qu’une fissure dans la glace voilà un deqazen. Sans les séismes du dernier myatzen, le Sanctuaire de Saraveth n’aurait peut-être jamais été découvert. À cause de cette histoire du retour des Cent Jours, tous les royaumes sont inquiets et personne n’est venu ici avant nous. J’en rêve depuis que je suis tout petit – découvrir le Sanctuaire de Saraveth ! Je n’arrive toujours pas à croire que cet honneur me reviendra vraiment !
— Tu n’as pas encore la preuve que ce soit le Sanctuaire de Saraveth. Et puis, même si tu as raison, pourquoi t’emballes-tu autant ? Ce n’est qu’un vieux tas de ruines comme tous les autres. Tu sais comme tout le monde que les peuples ancestraux ont bâti des temples partout sur la carte. Tu en as personnellement exploré au moins trente.
— Oui, mais le Sanctuaire était bâti aux portes de la Cité du Centre. Si c’est vraiment Saraveth là-dessous – et j’en suis déjà sûr – nous allons peut-être trouver la réponse à toutes nos questions ! Pourquoi les peuples anciens ont-ils disparu ? Où sont-ils allés ? Connaissaient-ils les monstres des Cent Jours ? Les ont-ils déjà affrontés ? Possédaient-ils des connaissances, des sciences que nous n’avons pas ?
— Ont-ils entreposé dans le Sanctuaire assez de zimérite pour rendre mon ami Ziô riche pour la vie ?
Ziô se tut, un peu gêné. Il fallait avouer que la zimérite, cette matière cristalline dont le cœur renfermait une flamme orangée, était l’un des minéraux les plus recherchés de tout l’Empire, et que les temples des ancêtres étaient les meilleurs endroits pour en trouver. Ziô lui-même, dans sa jeunesse, s’en était plusieurs fois rempli les poches. Malheureusement, il avait toujours succombé à la tentation de faire des dépenses irréfléchies, et à chaque fois, son magot s’était vite évanoui.
S’il y avait de la zimérite à trouver dans le Sanctuaire, en ces jours où ce minéral, de plus en plus rare, valait des sommes de plus en plus considérables, Ziô se promettait de gérer intelligemment sa nouvelle fortune.
Il savait, toutefois, qu’il s’amuserait bien davantage à la dilapider.
Syôren fit du sarcasme à nouveau.
— Un explorateur de ruines qui se fiche, au fond, des ruines … Un fils de Maison qui se fiche, au fond, des Maisons de l’empire … Un pilleur de trésors qui se fiche, au fond, des richesses … Dis-moi, Ziô, qu’espères-tu vraiment accomplir ici ?
— Je ne sais pas, avoua le jeune homme. Je crois que j’aime découvrir, c’est tout. Je suis simplement né dans la mauvaise famille.
Syôren s’enfouit davantage dans ses fourrures.
— Retournons au campement. S’il fait assez froid pour geler les soleils dans le ciel, je ne vois pas pourquoi nous devrions rester ici à grelotter.
Ziô acquiesça. Il savait où était le Sanctuaire, à présent. Puisque le vieux temple ne s’enfuirait pas tout seul, il ne voyait rien de mal à retourner au campement.
L’expédition commandée par Ziô était composée de dix membres, dont lui-même et Syôren. Peu après leur arrivée dans les plaines froides de Xenâvo, ils étaient passés à seize par l’inclusion de six filles du peuple de Xivth, qui devaient leur servir de guides. Syôren avait protesté, disant que leur présence n’était pas nécessaire, mais Ziô lui avait fait comprendre que personne, dans l’expédition, ne connaissait les terres de Xenâvo aussi bien que les énigmatiques jeunes habitantes du pays glacé.
La plus âgée des six filles, Zavia, les attendait à l’extérieur de la tente principale. Une fois de plus, Syôren eut peine à imaginer comment ce peuple pouvait même exister. La jeune fille avait les cheveux gris et longs et le visage bleuté, comme si elle mourait de froid. C’était d’ailleurs ce qu’elle aurait dû faire, vêtue d’une robe légère, chaussée de petites sandales, dans le froid mordant de Xenâvo. Pourtant, Zavia avait déjà avoué qu’elle souffrait davantage de la tiédeur. Pour elle, comme pour les cinq autres filles de sa race, cette température glaciale était l’équivalent d’un été torride.
C’était d’ailleurs l’été en Xenâvo.
— As-tu toujours aussi chaud, Zavia ?
— Oui, mais avec le vent, je peux le supporter … Mes amies ont-elles donné signe de vie ?
Les amies de Zavia – les cinq autres filles du peuple de Xivth – étaient parties avec une journée d’avance vers le Sanctuaire. Elles devaient y entrer, constater rapidement la topographie et l’intégrité structurelle des lieux, ensuite attendre l’arrivée de l’expédition. Toutefois, en arrivant, Ziô et les siens n’avaient trouvé aucune trace de Maësha, de Niœlla, ou de toute autre fille de Xivth. « Je souhaite qu’elles soient mortes heureuses », avait dit Zavia, à la consternation de Ziô et Syôren.
Les deux jeunes hommes avaient appris plus tard que la mort était perçue comme un événement heureux par le peuple de Xivth. Pour une fille, en particulier, il était important de mourir jeune et belle afin de passer heureuse à la cinquième vie.
En voulant savoir quelles étaient les quatre premières, Ziô et Syôren n’avaient reçu que des réponses vagues et mystérieuses.
— La nuit va tomber, dit Zavia. Demain, nous irons aux ruines.
Ziô se surprit à ressentir une grande déception, comme s’il venait d’apprendre que son vœu le plus cher ne serait pas exaucé. Il se força à voir les choses en perspective. Le Sanctuaire n’allait pas disparaître, et demain, à l’aube, son exploration serait moins dangereuse qu’en pleine nuit.
Ziô n’était pas du peuple de Xivth et n’avait aucune intention de mourir jeune.
— Alors ce sera pour demain, acquiesça-t-il à contrecœur.
Blotti dans ses fourrures, Ziô entra dans sa tente personnelle et se prépara à dormir. Il fallait que le lendemain vienne vite.
L’exploration du Sanctuaire de Saraveth, qui avait attendu d’innombrables terizens, ne devait pas attendre un jour de plus.
•
La noirceur battait tel un cœur.
La volonté sinistre se hissait difficilement hors du néant.
Une fois de plus, le temps était venu.
Cette fois, il leur fallait la victoire. Pas une défaite de plus ne serait tolérée.
Le 999e Cercle ne devait jamais être tracé.
La volonté sinistre se hissait difficilement hors du néant.
Une fois de plus, le temps était venu.
Cette fois, il leur fallait la victoire. Pas une défaite de plus ne serait tolérée.
Le 999e Cercle ne devait jamais être tracé.