Une section réservée aux auteurs?
#56
Aucun 2 poids 2 mesures, je fais partie de ceux qui clame que même dans le ludique les auteurs doivent être payés.
Auteur moi aussi, la plupart du temps bénévole, je ne cède pas mes droits pour rien.

Tout le monde tente de gagner sa part sur un livre, et aucun syndicat d'auteurs ne viendrait réclamer des % plus importants.

Je me dois de citer un blog passionnant : http://lejpe.canalblog.com/
Il ne s'agit surtout pas de pleurer sur les éditeurs ou les libraires, mais remettre les choses à leur place.

Citation :La répartition de l'argent entre les différents acteurs du livre

L’interview de l’écrivain Marc Pautrel sur le blog de La Lettrine m’a interpellé sur un point : la répartition de l’argent entre les différents acteurs du livre. Les idées reçues ont la vie dure, comme le montre cet extrait de l’interview où Marc Pautrel déclare : « L’économie du livre, c’est toute une histoire, c’est un monde à la Lewis Carroll ! Evidemment, qu’il y a un déséquilibre flagrant dans la répartition du prix du livre. Sur un livre à 10 €, le libraire perçoit environ 3 € ; le diffuseur/distributeur environ 2 € ; l’éditeur perçoit environ 2 € ; l’auteur environ 1 € (10% du prix HT du livre) voire moins (on a essayé deux fois de me faire signer un contrat d’auteur à 8%, j’ai refusé les deux fois); le reste c’est la fabrication du livre et la TVA. On voit que l’auteur est celui qui perçoit le moins alors que c’est lui qui crée l’oeuvre au coeur de toute l’économie du livre. Pour résumer d’une manière un peu brutale : toute la filière du livre se nourrit sur son dos. »

Sans auteur, pas de livre : je suis d’accord sur ce point. Mais la réalité économique est plus complexe : ce qui est vrai en valeur relative ne l’est pas en valeur absolue. Si on prend les chiffres de M. Pautrel, il oublie de préciser une chose : la marge n’est pas le bénéfice. C’est totalement faux de croire que parce que l’éditeur touche environ 2 € et l’auteur environ 1 €, c’est l’auteur qui gagne le moins (en passant, j’aimerai bien toucher une marge de 20% comme dans l’exemple ; dans les faits, elle est de 10-15%).
Avec leur marge, libraire, diffuseur/distributeur et éditeur doivent payer : charges sociales, impôts, taxes, local, salaires, eau, électricité, assurances, frais véhicule, fournisseurs, téléphone, consommables, remboursement crédit, etc. Toutes ces dépenses sont professionnelles. Une fois rentrés chez eux, libraire, diffuseur/distributeur et éditeur doivent assumer une grande partie de ces mêmes dépenses à titre privé. L’auteur n’a pas ces doubles dépenses. Avec une rentabilité de 10% sur la marge, libraire, diffuseur/distributeur et éditeur gagneraient ainsi d’après les chiffres de M. Pautrel :
Libraire : 0,30 €
Diffuseur/distributeur : 0,20 €
Editeur : 0,20 €

De son côté, avec ses 1 €, l’auteur doit déduire environ 10% de charges sociales Agessa, ce qui nous amène à 0,90 €, ainsi que des dépenses nécessaires à son activité (encre, stylo, papier, documentation, enveloppes, informatique, timbres…). Même en estimant ces frais à plusieurs dizaines de centimes, l’auteur gagne plus que les autres intervenants en net. Surtout que l’exemple chiffré ci-dessus était avec une marge de 10% (si la marge est inférieure, libraire, diffuseur/distributeur et éditeur récupèrent moins de bénéfices ; à l’inverse, ils gagnent plus si la marge dépasse les 10%). Conclusion : la filière du livre n’exploite pas les auteurs et elle ne se nourrit pas sur leur dos contrairement à ce qu’on lit ou entend. Si des auteurs sont persuadés du contraire, je les invite à créer leur maison d’édition ; ils verront si c’est lucratif. Le blog propose un fichier PDF destiné à aider les créateurs de maisons d’édition, allez-y.

Plus sérieusement, il faut garder à l’esprit que l’auteur touche dès le premier livre vendu, alors que l’éditeur ne commence à gagner de l’argent que lorsque les frais d’impression sont couverts. Eh oui, un auteur peut gagner de l’argent et son éditeur en perdre, tout simplement parce qu’un nombre minimal de livres n’a pas été vendu. Ce qui m’amène au constat suivant : les auteurs veulent bien 10% ou plus des bénéfices, mais pas assumer 10% des pertes si la carrière du livre tourne court.

La répartition est un faux problème. L’important, c’est le nombre de lecteurs qui sont intéressés par le livre et l’achètent. A ce titre, vous pouvez donner par contrat 50% de droits d’auteur à un écrivain ; s’il ne vend pas ou très peu, il aura 50% de rien du tout. Dans son extrait, Marc Pautrel indique qu’il a refusé des contrats à 8%, mais si on pousse la logique jusqu’au bout, il vaut parfois mieux avoir 8% de 30 000 ventes plutôt que 10% de 4 000 ventes.

Le dernier point, c’est que les auteurs ne se rendent pas compte du temps et de l’argent que dépensent les éditeurs et distributeurs afin qu’ils soient rémunérés. Comme je l’ai indiqué plus haut, l’auteur gagne de l’argent dès le premier exemplaire vendu. Pour cela, il faut souvent relancer les points de vente et travailler à perte.

La reconnaissance n’est pas le point fort des auteurs.

...

Contrairement aux salariés ou aux personnes qui touchent retraites, pensions ou des allocations chaque mois, le petit éditeur ne peut pas prévoir à l’avance combien il gagnera à la fin du mois. Personnellement, une fois déduits tous les frais professionnels (impression, téléphone, loyer, charges sociales, frais postaux, etc.), il me reste entre 0 et 1 000 euros environ, somme avec laquelle il faut régler les dépenses personnelles. Eh oui, il arrive certains mois que le salaire soit égal à zéro euro, surtout en début d’activité. Difficile dans ces conditions d’aller faire des courses ou de se faire plaisir. Dans ces cas-là, on achète avec les yeux et puis c’est tout.
Chez lui, l’auteur mécontent de ses ventes touche son salaire ou ses revenus, sans penser que son éditeur a travaillé pour rien pendant des semaines, qu’il ne récupèrera jamais l’argent investi dans l’impression et qu’il en est de sa poche.

...

Diffusion-distribution-librairie prennent 55% ou plus du prix HT du livre. Imaginons 50% de droits d'auteur, on dépasse déjà les 100% du prix HT du livre. L'imprimeur et l'éditeur ne touchent rien, tout comme correcteur, illustrateur, maquettiste s'ils interviennent.
Avec 35% de droits d'auteur, plus 55% de diffusion-distribution-librairie, l'imprimeur reçoit un peu d'argent, 10%. Cela ne couvre pas entièrement les frais de fabrication, compris entre 12 et 20% selon le syndicat national de l'édition. L'éditeur ne touche rien, et l'imprimeur n'est pas payé.
Avec 25% de droits d'auteur et 55% de diffusion-distribution-librairie, l'imprimeur est payé. L'éditeur recueille des miettes voire rien du tout, aucun collaborateur n'est payé.


Citation :Ce que gagnent les écrivains

En rangeant des magazines, j'ai retrouvé un ancien numéro de Lire, dont le dossier du mois d'avril 2010 était consacré à "ce que gagnent les écrivains". Voici les grandes lignes et quelques ajouts, puisque la littérature jeunesse n'était pas évoquée.

Les droits d'auteur
Il s'agit de l'une des sources de revenus des écrivains (eh oui, vivre uniquement de sa plume est très difficile). En littérature générale, l'article indique qu'en grand format, "l'auteur touche 8% de droits, jusqu'à 10 000 exemplaires vendus, 10% entre 10 001 et 20 000, 12% au-delà. Il existe des variantes, avec des répartitions 10/12/14 ou des seuils fixés à 5 000 et 10 000 exemplaires." Les stars touchent beaucoup plus, 14-15% (Daniel Pennac, Patrick Mondiano), 18% (Jean d'Ormesson, Céline) et même 20% (Françoise Sagan). (Le mot de Dr Watson : je pense qu'on peut aussi mettre Musso et Levy entre 14 et 18%. En dehors de la littérature générale, les auteurs jeunesse ont plutôt des droits qui tournent autour de 5%, et les auteurs de livres pratiques entre 1 et 3%).
En poche, les auteurs gagnent de 5% à 7% pour les gros vendeurs.
L'article mentionne qu'il arrive que "Gallimard propose parfois un taux fixe de 7% de droits pour des premiers romans". Soit moitié moins qu'un auteur vedette de la maison. Si le premier roman devient un best-seller, c'est le jackpot pour la maison puisque l'auteur plafonne à 7% alors qu'à partir d'un certain seuil, il aurait pu avoir 12% ou plus de droits.


Citation :Le boss, c’est le distributeur.

Le distributeur, qui est aussi parfois diffuseur, a droit de vie ou de mort sur la plus grande partie de la chaîne du livre.

C’est lui qui paie les maisons d’édition et rembourse les invendus aux librairies. Avec l’argent du distributeur, les éditeurs règlent les auteurs, les imprimeurs, les collaborateurs. S’il fait faillite ou s’il bloque les fonds, le château de cartes s’écroule, maisons d’édition et librairies ont peu de chance de revoir leur argent et risquent à leur tour de déposer le bilan.

Le distributeur gère le stock : il peut bloquer sur sa plate-forme les titres d’un éditeur qui lui doit de l’argent, refuser de livrer un point de vente débiteur.

Surtout, de distributeur, il peut devenir donneur d’ordre vis-à-vis des éditeurs. De sous-traitant, il devient en quelque sorte le patron. Comment est-ce possible ? Tout simplement à cause des sommes dues au distributeur.

Le distributeur gagne de l’argent de trois façons :
- sur les livres mis en place dans les points de vente.
- sur les livres qui restent à l’entrepôt (l’éditeur paie le stockage).
- sur les retours de livres (les invendus).

Pour vous donner des chiffres, voici ce que demandait mon distributeur en 2004 :
- sur les livres mis en place dans les points de vente : 11% du prix HT du livre.
- sur les livres qui restent à l’entrepôt : 0,08 €/mois et par livre pesant moins de 300g ; 0,10 €/mois et par livre pesant entre 301 et 600g ; 0,12 €/mois et par livre pesant entre 601 et 1500g. Devis pour les livres dépassant 1500g.
- sur les retours de livres : si le taux de retour dépasse 25%, le distributeur touche 1,5% du prix HT (taux de retour entre 25 et 35%), 2,5% du prix HT (taux de retour entre 36 et 50%), 4,5% du prix HT (taux de retour entre 51 et 70%), 6% du prix HT (taux de retour entre 71 et 100%).

S’il y a du pilon, c’est en grande partie à cause des frais de stockage. Quand vous avez des milliers d’exemplaires qui ne se vendent pas, ça coûte moins cher de détruire que de réimprimer.

En début de contrat, l’éditeur doit verser une provision (une sorte de caution) qui permet au distributeur de se couvrir financièrement en cas de retours excessifs : une provision de retour. Il peut aussi demander une provision de fin de contrat (au cas où vous voudriez partir ailleurs).

C’est paradoxal, mais moins un livre se vend, plus le distributeur gagne d’argent (à cause des retours). Il peut toucher jusqu’à 17% du prix HT du livre, sans compter les frais de stockage. Là, les éditeurs sont pris à la gorge. Ils éditent des livres qui ne se vendent pas et doivent régler l’imprimeur, le diffuseur (s’ils en ont un) et le distributeur. La facture est salée, il faut de la trésorerie pour supporter ces coûts. Quand un éditeur ne peut pas payer le distributeur parce qu’il ne vend pas assez, il n’a pas 36 solutions :
- il trouve de l’argent.
- il ferme.
- il fait entrer le distributeur dans le capital de la maison d’édition en échange de l’abandon des créances.

Quand cette troisième option arrive, la maison d’édition perd une partie de son indépendance. Désormais, le distributeur-actionnaire a son mot à dire sur le programme éditorial, le tirage, les mises en place, etc. L’éditeur croit beaucoup à un livre ? Le distributeur peut tout mettre par terre : « ça ne va pas intéresser grand-monde, on n’en met que 300 exemplaires en place ». Avec ce système de participation, le distributeur touche le jackpot si une maison d’édition fait un best-seller, car il va gagner de l’argent sur l’activité distribution mais également sur une partie des bénéfices de la maison d’édition. Plus sa participation au capital de la maison d’édition sera grande, plus il empochera.


Citation :Les libraires ne roulent pas sur l'or

La répartition des charges en librairie est la suivante :
69,1 % : achat de livres
1,5 % : transport des livres
29,4 % : marge commerciale

La ventilation de cette dernière (marge commerciale) est la suivante :
17,2 % Charges de personnels
2,4 % Loyers
1,1 % Pub
1,8 % Investissement
1,1 % Provision
0,5 % Frais financiers
2,7 % Fonctionnement
1,0 % Impôts
1,6 % Bénéfice net

Merci à Hélène Clemente (syndicat de la librairie française) pour ces chiffres. Comme on peut le constater, la rentabilité est faible (1,6%). Editeurs, soyez généreux quant à vos remises consenties aux points de vente.
Éditions La Saltarelle - Ldvelh & JdR - http://www.saltarelle.net
Site : http://delarmgo.jimdo.com
Le Blog : http://delarmgo.jimdo.com/le-blog/
Fanzine : http://tinyurl.com/Saltarelle
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Messages dans ce sujet
Une section réservée aux auteurs? - par Zyx - 18/06/2013, 14:08
RE: Une section réservée aux auteurs? - par Delarmgo - 19/12/2013, 15:25



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