Une section réservée aux auteurs?
#48
(17/12/2013, 23:55)Zyx a écrit : Je contre-argumente et tu me dis pourquoi c'est faux, ok?
Dans le cas où je cède à vie +70 ans:
1) Pour une édition papier, supposons que l'éditeur ne met pas mon oeuvre à disposition ou suffisamment à disposition du public à mon goût, mais qu'il ne veut pas me restituer les droits: cela veut dire des frais de justice, et la charge des preuves de mon côté (huissiers).
Non un simple recommandé, si justice il y a ce sera à la charge de l'éditeur, il n'a aucune chance de gagner.
Il n'y a d'ailleurs aucun exemple à ma connaissance (je demanderai à une juriste de l'édition quand même), généralement l'éditeur réimprime (c'est arrivé pour Sagan qui pourtant ne se vendait plus) ou il rend tout simplement les droits à l'auteur.
De fait, par la situation même, l'auteur a ses droits donc il peut aller voir un autre éditeur, le premier ne pourra pas attaquer, et s'il imprime en speed à ce moment là, ce serait illégal car trop tardif par rapport à la procédure lancée par le recommandé.

Donc dans l'ordre, il faut bien payer des frais de justices, avoir les reins pour ça, et ensuite, si et quand on gagne, se faire rembourser par la partie adverse (article 700 si je me souviens bien). Et je ne sais pas si tous les frais seront remboursés, comme les frais d'huissiers.

2) Supposons que je signe un contrat léonin en faveur de l'éditeur basé sur un contexte (récession économique, estimations pessimistes) où j'accepte des royalties très faibles, et que la situation évolue (énorme succès littéraire!): je ne peux pas renégocier mon pourcentage.
si, les avenants au contrat sont légions. Il ne faut pas voir le contrat comme quelque chose de figé, mais bel et bien évolutif, avec la loi, le marché, etc.
Après un éditeur peut évidemment refuser de discuter, mais je pense que les gros requins ne sont pas si nombreux dans l'édition.

J'interprète ce que tu dis comme quoi qu'un contrat signé à vie +70 ans ne met pas l'auteur en situation de négocier et qu'il faut donc s'en remettre à la bonne volonté de l'éditeur en qui il faut faire une confiance aveugle au moment de signer le contrat. Le fait que cela se passe bien avec une légion d'éditeurs montre qu'il n'y avait pas besoin de contrat, donc ce n'est pas pertinent. Le contrat - je veux dire, écrit, signé, légalisé -, c'est justement pour l'éventualité où ça se passerait mal.


3) Supposons que je découvre que les procédés de mon éditeur sont révoltants. J'ai certes le droit moral de lui interdire la publication, mais je dois le dédommager.
[...] si les pratiques sur l'oeuvre ne respectent pas tes droits moraux, là tu peux agir, et tu gagneras (les éditeurs sont rarement gagnants, d'où le peu de procès, autant s'arranger.)
Donc, parce qu'on s'est engagé pour une trop longue période, il faut apporter des preuves, menacer d'un procès, voire le débuter, pour mettre fin à un contrat qu'on regrette: donc des charges.

4) Supposons que je signe avec un éditeur numérique, qui met à disposition du public mon oeuvre à l'achat, pour un site prépayé pour 100 ans. Mais aucune promotion. Là encore, énorme charge de preuve à fournir pour récupérer mes droits.
Illégal encore pour l'éditeur, dans le contrat et dans la loi l'éditeur a obligation de promotion de l'ouvrage, de le diffuser, de le rendre disponible aux lecteurs.
Donc un recommandé, et un mail au SGDL pour être conseillé par leur équipe juridique.

Et donc des frais d'huissiers, d'avocats, de justice, etc.

Maintenant, supposons un contrat court reconductible tous les 2 ou 3 ans (tacitement ou non). Si tout se passe bien, on continue ensemble. Si des renégociations s'imposent, elles sont possibles. S'il y a désaccord, le contrat n'est pas renouvelé. Tout ça sans le moindre frais de justice.
- Oui tout à fait, mais aucun éditeur n'en voudra, juste pour ne pas compliquer les choses. Que ce soit un gros éditeur ou un petit, il n'a pas de temps dispo, ou le salarié est débordé, une gestion des contrats avec 20 ou 30 auteurs deviendrait vite galère.
Dans ce cas, reconduction tacite. On continue sur les mêmes termes tant que tout le monde est d'accord. S'il y a désaccord ou besoin de renégocier, personne ne se retrouve lié par un contrat qu'il réprouve.


- Dernier point, le plus important en fait : aucun éditeur ne prendra le risque de rendre un ouvrage lisible et le voir partir 3 ans après chez un concurrent.
Tu parles d'exclusivité, c'est autre chose qu'un accord de publication, mais cela mérite aussi qu'on au parle.
L'exclusivité donne un avantage sur la concurrence au détriment du public qui est privé de multiples sources d'édition. Cet avantage est toute fois sociétalement justifié par l'investissement que doit faire le premier éditeur pour rendre l'oeuvre publiable et connue. Ce serait injuste qu'aussitôt publiée et publicitée, un autre éditeur puisse usurpé le fruit de ce labeur. Du coup, personne ne voudrait faire le premier pas et arroser la plante, puisqu'il serait perdant par rapport à ceux qui attendraient de cueillir les fruits murs sans fournir d'efforts. Donc oui, un incitatif du genre exclusivité me semble justifié.
MAIS un siècle d'exclusivité (en moyenne) pour un simple travail de mise en page et de promotion, c'est un abus clair et net. Le fait que ce soit une pratique héritée du moyen-âge ne la rend que plus obsolète.
Par comparaison, je travaille dans le domaine des brevets où il y a parfois de sacrés risques et efforts de développement, intellectuels, physiques et financiers, étalés parfois sur deux décades, et ils obtiennent 20 ans d'exclusivité.


Un mot sur le numérique, tu l'abordes plus haut :
Un accord SNE de mars 2013 a accordé aux auteurs un contrat avec une partie pour le papier et une partie pour le numérique (mais un seul contrat). Alors qu'actuellement c'est mixé.
Attention la loi n'est pas passée, mais c'est des pratiques qui vont arriver.

Oui, j'avais vu ça. Juste pour clarifier, rien n'empêche de rédiger actuellement les contrats en ce sens. C'est d'ailleurs un contresens absolu de vouloir appliquer la même logique à deux secteurs si différents.


Au final, et pour donner une analogie, j'ai l'impression de militer pour l'union libre et toi le mariage pour la vie. Il n'y a pas besoin de s'engager pour la vie + 70 ans, et de faire un coûteux divorce si l'engagement ne tient pas ses promesses. Il vaut mieux faire un petit PACS ou une union libre, qui se prolonge tant que les deux parties sont d'accord, et s'interrompt sans heurt quand cela n'a plus de sens (ou quand l'arrangement devient à sens unique)
AVH: Les noyés,  La chute.

Jeu: Conflux
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Une section réservée aux auteurs? - par Zyx - 18/06/2013, 14:08
RE: Une section réservée aux auteurs? - par Zyx - 18/12/2013, 19:01



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