Hannibal se réveilla en sursaut d’un rêve affreux.
Dans son cauchemar, il jouait une partie à quatre avec l’extension Syracuse, censée favoriser le commerce. Il décidait donc de développer sa puissance commerciale, construisant des marchés et conquérant des territoires dotés de ressources rares, tels que la province garamante et la Cappadoce. Il construisait des forteresses pour sécuriser son territoire et, pour ne pas avoir à trop dépenser en légions, il recrutait le puissant Nabuchodonosor.
Tôt dans la partie, il regardait avec perplexité Cléopatre (conseillée par son vizir belliqueux Ettoihossimonfis) conquérir la Sicile et fonder Syracuse. Un peu plus tard, toujours sans réagir, il la regardait fonder Jérusalem. Et à la fin du troisième tour, alors qu’il ne pouvait plus rien faire, il la voyait conquérir Carthage et gagner la partie les dix doigts dans le nez (qu’elle avait très beau).
Une fois vêtu et sorti de sa chambre, Hannibal interrogea aussitôt son secrétaire particulier.
- Est-ce que nous jouons avec une extension cette fois-ci ?
- Oui, monseigneur. Syracuse. C’est l’extension qui favorise le commerce.
- Hmm… Le commerce, hein ? Je vois, je vois, je vois…
Une dizaine de tours plus tard, alors que le monde méditerranéen était à feu et à sang, que la mer était couverte de trirèmes, que les Égyptiens avaient débarqué en Thrace, que les Grecs leur avaient pris Syracuse, que les Romains avaient conquis la Numidie, que les Grecs et les Égyptiens s’étaient entretués pour la possession de la Sicile, que les Égyptiens avaient envahi le sud de l’Italie, que les Romains avaient pillé la Numidie avant de revenir délivrer leur pays, et que les Carthaginois avaient attaqué Memphis pour s’emparer du précieux papyrus qui allait leur permettre de gagner en acquérant un cinquième héros, Hannibal songea que l’acier bien tranchant était décidément la ressource la plus précieuse pour un commerçant. Cette nuit-là, il rêva paisiblement au monde idéal qu’il allait pouvoir fonder. Un monde où le mouton – le mouton carthaginois – serait la base de toute l’économie et se vendrait absolument partout, depuis les forêts inextricables des Germains jusqu’au étendues arides de l’Éthiopie.