Défis littéraires et Sortilèges nostalgiques
#1
J’ai un attachement nostalgique pour la série « Défis et Sortilèges ». Kandjar le Magicien a été mon tout premier livre-jeu et m’a fait forte impression, de sorte que j’ai très vite enchaîné sur les trois autres tomes. Avec du recul, la série n’est bien sûr pas dénuée de défauts, mais je lui trouve toujours des qualités appréciables.

Le thème du mini-Yaz de cette année m’a incité à feuilleter à nouveau ces livres (l’exploration d’une terre inconnue est un élément important de la série) et je me suis dit qu’il pourrait être intéressant de mettre par écrit mes observations à leur sujet. Bien sûr, n’hésitez pas à poster ci-dessous vos propres opinions et observations !

Notez qu’il s’agit seulement des quatre premiers livres de la série. Les quatre suivants, même s’ils ont bien sûr des liens scénaristiques et mécaniques, me semblent trop différents pour qu’on puisse en débattre dans le même sujet.


Présentation générale

Les quatre premiers livres de « Défis et Sortilèges » ont été publiés en 1988. Trois d’entre eux, Kandjar le Magicien, Caïthness l’Élémentaliste et Keldrilh le Ménestrel, ont été écrit par Gildas Sagot (qui a également écrit les quatre suites publiées au début des années 90, ainsi que la série inachevée « Métamorphoses »). Le quatrième, Péreim le Chevalier, a été écrit par Bruno Giraudon (dont c’est apparemment le seul livre-jeu).

Chacun des livres peut se jouer en solo, mais il existe également un mode à plusieurs, où chaque joueur incarne l’un des quatre personnages disponibles.

L’histoire se déroule dans le monde de Dorgan, et plus particulièrement dans une région à demi sauvage où existent aussi bien des colonies récemment établies que des ruines très anciennes. Un système de carte permet au joueur de se déplacer librement entre une vingtaine d’endroits différents (quelques lieux ne sont pas immédiatement accessibles).

Chacun des personnages possède un caractère bien à lui et un objectif qui lui est propre, mais en fin de compte, ils se retrouveront tous à devoir accomplir la même quête pour pouvoir l'emporter.

Les personnages possèdent chacun cinq caractéristiques : Aura (ne sert qu’en mode multijoueur), Initiative, Combat, Magie et Vitalité. Ils ont également un score de Blessures (le personnage meurt si celui-ci dépasse sa Vitalité). Il existe deux systèmes de combat, l’un très simple et l’autre plus élaboré.

Les livres offrent un certain nombre de décisions classiques, mais ils demandent de temps à autre au joueur de faire un « Choix du Livre du Pouvoir ». Il faut dans ce cas choisir, pour réagir à la situation en cours, entre quatre comportements possibles : amical, rusé, prudent ou agressif. Ces choix font gagner des Points de Pouvoir, qui permettent au héros d’obtenir de nouvelles capacités et lui débloque l’accès à certains lieux.
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#2
Plus livre que jeu


Même si je développerai davantage le sujet dans les sections suivantes, il mérite d’être mentionné d’entrée de jeu : l’aspect littéraire des D&S est beaucoup plus développé que leur aspect ludique. Beaucoup de lignes de texte sont consacrées à la description des lieux, aux émotions et aux pensées du héros, à des interactions avec des personnages non-hostiles et ainsi de suite, tout comme cela pourrait être le cas dans un roman ordinaire.

Ce côté livresque est contrebalancé par la très forte liberté de déplacement sur la carte, qui n’est pas sans évoquer un jeu de plateau. Les livres-jeux suivants de Gildas Sagot se montreront bien plus dirigistes, ce qui leur permettra d’avoir un scénario plus développé mais affaiblira grandement le contrôle du joueur sur le ou les héros.


En solo ou à plusieurs


« Défis et Sortilèges » est l’une des rares séries de LDVH à permettre de jouer à plusieurs, une originalité qui mérite d’être remarquée (d’autant que les séries « Double Jeu » et « L’Épée de Légende », bien que légèrement antérieures, ne devaient paraître en France que plus tard).

La carte sur laquelle on se déplace est exactement la même dans les quatre livres. Dans le jeu à plusieurs, les héros verront donc sans doute leurs chemins se croiser à un moment ou à un autre ; ils pourront dans ce cas s’allier, se combattre ou ne faire ni l’un ni l’autre. À moins d’une alliance globale entre tous les héros en lice, le jeu à plusieurs présente un aspect compétitif : la victoire d’un ou de plusieurs joueurs signifie la défaite des autres.

Pour régler les actions de personnages qui peuvent se trouver dans des endroits tout à fait différents, la série utilise un système de tour de jeu (qui rappelle là encore un jeu de plateau). Ce système s’applique techniquement aussi au jeu en solo, mais il n’y possède que peu d’importance puisque le joueur peut alors prendre tout son temps.

Au cours d’un tour de jeu, chaque héros peut faire l’une des trois actions suivantes :

- Se déplacer sur la carte
Le héros peut emprunter l’un des chemins indiqués sur la carte pour se déplacer depuis un endroit jusqu’à un endroit adjacent. Par exemple, s’il se trouve à la Passe des Rocs, il peut se rendre en un tour à la ville de Fenga (à l’ouest), à la ville de Sélartz (au nord-est), dans la Grande Plaine (à l'est) ou aux Monts des Bêtes (au sud). Le déplacement se passe uniquement sur la carte et n’a aucun autre effet que le changement de lieu.

- Explorer un lieu
Le héros peut explorer le lieu où il se trouve. C’est à cela que sont consacrés tous les paragraphes des livres. C’est en explorant qu’on est amené à faire des rencontres ou des découvertes, obtenir des informations ou des trésors, affronter des périls divers et ainsi de suite.

- Se reposer
En restant où il se trouve sans rien faire pendant un tour, le héros peut diminuer son total de Blessures de 10 points. Dans une partie en solo (ou à plusieurs si tous les héros sont alliés), le repos permet donc de redescendre son total de Blessures à 0 après chaque exploration périlleuse sans le moindre inconvénient.

Comme vous le remarquerez bien sûr, il y a l’une de ces actions qui demande autrement plus de temps que les autres ! Alors que le déplacement et le repos sont quasi-instantanés du point de vue du joueur, l’exploration lui demande de lire un texte qui peut être assez long, et potentiellement de prendre des décisions ou de livrer bataille. Bref, si quatre joueurs ayant chacun l’un des livres se retrouvaient autour d’une table pour jouer à plusieurs à « Défis et Sortilèges », il y en aurait constamment certains qui doivent attendre pendant de longues minutes que les autres aient terminé leur tour.

Le système des alliances permet de réduire ce problème, mais il n’est pas très satisfaisant pour d’autres raisons. Lorsqu’une alliance se forme entre plusieurs héros, l’un d’entre eux devient le chef de l’alliance et c’est désormais lui qui prend toutes les décisions. Les autres joueurs referment leur livre et n’interviennent plus guère que lors des combats, ou si l’alliance parvient dans un lieu qui détient une importance particulière pour son héros (pour Kandjar, par exemple, c’est la Porte du Levant ; pour ce lieu-là, l’exploration se fera dans son livre même s’il n’est pas le chef de l’alliance). La narration dans les différents livres, malheureusement, prend très rarement en compte la possibilité que le héros ne soit pas seul.

Le chef de l’alliance est le personnage dont le total Aura + Magie est le plus élevé. Autant dire que Péreim, bien que futur empereur, a peu de chance de commander qui que ce soit avec son total de 19 (en début de partie, Keldrilh est à 25, Kandjar à 26 et Caïthness à 30). Les alliances peuvent heureusement se rompre très facilement, au début de n’importe quel tour.

Lorsque deux héros se retrouvent au même endroit et qu’ils ne veulent pas s’allier, ils ne peuvent pas simplement s’ignorer : soit l’un des deux part aussitôt, soit ils s’affrontent. C’est un élément de la série où l’aspect ludique l’emporte clairement sur la vraisemblance littéraire, car il n’y a aucun motif scénaristique pour que les héros décident de s’entretuer.

Bref, le système multijoueur est plutôt équilibré d’un point de vue mécanique, mais il va très certainement susciter la frustration et l’ennui chez les joueurs contraints de poireauter pendant que les autres vivent des aventures. La meilleure façon d’y jouer me semble être une partie en ligne étalée sur plusieurs jours (ce qui diminue beaucoup le problème de l’attente) et n’autorisant les alliances qu’en fin de partie (entre héros ayant au moins 9 ou 10 points de Pouvoir).
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#3
Le combat simple


Les combats simples sont ce qui se produit lorsqu’un héros se retrouve confronté à des adversaires de bas étage : morts-vivants décérébrés, villageois à demi ivres, etc.

Ils portent bien leur nom, car ils se règlent de façon aussi rapide que basique : on lance un certain nombre de dés, on ajoute le résultat au total de Blessures du héros, et si celui-ci survit ça veut dit qu’il l’a emporté. (Dans le mode multijoueur, les dégâts sont divisés également entre les membres d’une alliance.)

Les dommages infligés par un combat simple vont jusqu’à cinq dés… ce qui peut en faire des mâts redoutables ! Péreim est à l’abri à moins d’être déjà blessé, car il a 31 points de Vitalité en début d’aventure, mais Keldrilh et Kandjar n’ont que 22 et Caïthness seulement 18 !

Les combats simples peuvent généralement être évités en faisant les bons choix de comportement. Parfois, c’est facile à deviner (ne pas adopter une attitude agressive lorsqu’on est confronté à des poivrots mal élevés dans une taverne), parfois ça l’est beaucoup moins.

Le système n’est quoi qu’il en soit guère satisfaisant : il ne permet aucun choix tactique de la part du joueur et ne tient nul compte des pouvoirs et des objets obtenus par le héros (à moins qu’ils n’augmentent sa Vitalité ou ne diminuent les dommages qu’il reçoit). Gildas Sagot abandonnera d’ailleurs le combat simple dans ses livres ultérieurs.



Les caractéristiques et le combat avancé


À l’exception de l’Aura (dont la seule utilité est de déterminer qui commande une alliance dans le mode multijoueur), les caractéristiques ne servent jamais qu’en combat avancé. Il n’y a rien qui ressemble, par exemple, aux tests d’Habileté qu’on peut trouver dans les « Défis Fantastiques » (des tests de ce genre apparaîtront en revanche dans la deuxième tétralogie D&S).

En combat avancé, le monstre qu’on affronte possède le même genre de caractéristiques qu’un héros (sauf qu’il n’a pas de score de Magie) et suit les mêmes règles. À chaque tour de combat, le(s) héros et le monstre peuvent chacun porter une attaque ou (pour Kandjar, Caïthness et Keldrilh) essayer de lancer un sort.

L’Initiative sert uniquement à déterminer dans quel ordre attaquent le(s) héros et le monstre au cours d’un tour de combat. À noter que le score d’Initiative d’un héros ne s’applique que lorsqu’il se sert de son arme : les sortilèges possèdent chacun un score d’Initiative particulier.

Le Combat sert à déterminer si une attaque porte ou non : si on obtient avec trois dés un résultat inférieur ou égal à son score, on inflige à l’adversaire un nombre de points de dommage déterminé par un nouveau lancer de dés. Sans surprise, Péreim est de loin le meilleur combattant, avec un score de départ de 15 contre 12 pour Keldrilh, 10 pour Kandjar et 9 pour Caïthness. Les armes infligent de 1D à 3D, mais Péreim peut parvenir jusqu’à 5D et les monstres les plus puissants causent 6D de dégâts.

La Magie fonctionne de façon assez similaire lorsqu’un héros tente de lancer un sortilège, à un détail près : il faut ajouter le niveau du sort (généralement entre 1 et 5) au résultat de trois dés avant de comparer avec le score de Magie du héros. Kandjar débute avec 16 en Magie et Caïthness avec 14, mais Keldrilh a seulement 11 (et Péreim a 7, mais il s’en fiche puisqu’il n'utilise jamais de sort).

Il est possible d’augmenter les caractéristiques de son héros au cours de la partie, généralement en découvrant des objets magiques, mais ce n’est parfois possible qu’à un stade avancé du jeu : Keldrilh et Kandjar, par exemple, peuvent tout les deux obtenir un objet qui va fortement doper leur score de Magie, mais seulement à condition d’avoir déjà obtenu 8 points de Pouvoir. Il arrive aussi que ce soit une question de chance : Caïthness peut obtenir un bonus de +2 en Magie dès son quatrième tour de jeu, mais il faut qu’elle se rende précisément au bon endroit sur la carte et qu’elle y fasse les bons choix.

Lorsqu’une alliance affronte un monstre, ce dernier attaque le héros qui possède l’Initiative la plus faible, mais un autre héros peut choisir d’abaisser temporairement sa propre Initiative afin d’être ciblé à la place de son camarade.


Le système de combat avancé n’est pas mauvais. Ses règles ne sont ni trop compliquées, ni trop simples. De nombreux petits détails viennent cependant le rendre moins appréciable qu’il n’aurait pu l’être.

D'abord, ces combats avancés sont bien rares : une demi-douzaine en tout et pour tout dans une partie entière. Ils peuvent d’ailleurs presque tous être évités (ce qui ne serait pas une mauvaise chose en soi s’ils étaient un peu plus nombreux, ce qui aurait pu se faire par exemple en remplaçant les combats simples par des combats avancés).

Péreim est moins intéressant que les autres. N’ayant aucun sortilège à sa disposition, il ne peut rien faire d’autre qu’attaquer toujours de la même façon. Lui offrir deux ou trois techniques spéciales (plus difficiles à réussir mais plus efficaces) n’aurait pas été du luxe.

Caïthness est franchement mal lotie en début de partie : elle a une Vitalité faible, ne touche même pas une fois sur deux, n’inflige qu’un dé de dommage avec son couteau à beurre et n’a qu’un seul sort (de niveau 5) qui puisse être utile contre un monstre.

Keldrilh va passer l’essentiel de la partie à se battre à l’épée courte, car son score de Magie (tant qu’il n’a pas obtenu l’objet qui l’augmente de 4 points) est trop médiocre pour qu’il réussisse souvent ses sorts. Son arme de départ est meilleure que celle de Caïthness ou Kandjar, mais contrairement à eux, il ne peut pas en découvrir une meilleure en cours de route.

La plupart des monstres qu’on rencontre ont une Initiative si élevée (ou au contraire si basse) que quelques points en plus ou en moins n’y changeront rien. Cela rend généralement peu utiles les malus que certains sorts peuvent infliger à vos adversaires dans cette caractéristique, tout comme les bonus mineurs que certains objets peuvent vous apporter (d’autant que ceux-ci n’affectent pas l’usage de la magie).

Le boss de fin et le boss optionnel ont un score de Combat supérieur à 18 et ils infligent six dés de dégâts, ce qui est assez monstrueux. Le boss optionnel a du moins le bon goût d’avoir une Initiative de 1 et une Vitalité assez faible, mais le combat final est franchement périlleux pour un héros solitaire et un seul coup de malchance sur un jet de dés peut y garantir la défaite. C’est particulièrement vrai pour Kandjar : s’il survit à la première attaque, il a de bonnes chances de l’emporter… mais cette première attaque a presque 50 % de chance de le tuer !

Même s’il est normal qu’une alliance soit plus puissante qu’un héros solitaire, le déséquilibre est tout de même un peu radical, car les monstres sont inchangés qu’ils aient un adversaire ou quatre (sauf le boss de fin, mais la différence est mineure).
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#4
Merci pour les posts. Pas mal de nostalgie pour moi-aussi. J'avais acheté Caïthness l’Élémentaliste en 1988... et à l'époque l'ouvrage m'avait un peu perturbé tant il se distinguait des Défis fantastiques dont j'avais l'habitude, par sa faible interactivité, son mode de navigation qui oblige à consulter le Livre des Pouvoirs ou, à la fin de chaque tour d'exploration, la Carte et le Sommaire , ses règles de magie plus complexes que celles de Sorcellerie. La possibilité de jouer à plusieurs est une idée très sympa sur le papier, mais je me demande si elle a été réellement mise en pratique par qui que ce soit : se réunir à quatre dans une pièce pour lire chacun son livre dans son coin... Cette série bien qu'imparfaite sur plein d'aspects est originale et attachante...comme Métamorphoses en somme ! A noter aussi de très belles couvertures et illustrations intérieures !
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#5
(09/05/2023, 11:55)grattepapier a écrit : Cette série bien qu'imparfaite sur plein d'aspects est originale et attachante...comme Métamorphoses en somme !

Dans "Métamorphoses", le côté littéraire écrasait à mon avis un peu trop le côté ludique (le joueur avait vraiment peu de contrôle sur les faits et gestes du protagoniste). Le concept des métamorphoses était très sympa, mais il aurait mieux valu qu'il fasse intervenir un choix de la part du lecteur plutôt que de dépendre d'un simple jet de dés.


Citation :A noter aussi de très belles couvertures et illustrations intérieures !

Effectivement ! J'aime un peu moins la couverture de Péreim, mais les trois autres sont très sympas, et les illustrations d'intérieur contribuent très bien à l'atmosphère.



La magie


Trois des quatre héros ont la possibilité d’utiliser la magie. Ils connaissent un certain nombre de sortilèges dès le début du jeu et en apprendront automatiquement d’autres en cours de route (il leur faut pour cela obtenir des Points de Pouvoir).

Les sortilèges sont différents pour les trois personnages (même s’il y en a bien sûr qui se ressemblent). Ils peuvent par exemple permettre de diminuer les caractéristiques d’un ennemi, d’augmenter les nôtres, de guérir les blessures et d’invoquer des créatures pour combattre à nos côtés. Quelques sortilèges ne peuvent être utiles que lors d’un affrontement entre héros (en rendant plus difficile pour les adversaires d’utiliser eux-mêmes la magie).

Seule Caïthness possède quelques sortilèges utilisables en-dehors du combat, et ils ne sont du reste utiles qu’en mode multijoueur. Un sortilège donné ne peut être utilisé qu’une seule fois par tour de jeu ; il n’est pas bien clair si une tentative manquée compte comme une utilisation, mais cela semble plutôt logique (sans cela, Caïthness réussirait automatiquement à lancer ses sorts hors-combat puisqu’elle pourrait réessayer autant de fois que nécessaire).

Les sortilèges sont le principal élément tactique du jeu, ce qui ne les empêche pas de laisser une part assez large au hasard. D’abord, il faut bien sûr réussir son test de Magie. Ensuite, beaucoup des sortilèges voient leur efficacité déterminée par un jet de dés. Par exemple, l’un des sortilèges basiques de Kandjar enlève 1D en Combat à ses adversaires pour toute la durée de l’affrontement ; face à un ennemi doté d’un score de Combat moyen, ça garantit presque certainement la victoire si on tire un 5 ou un 6, mais ça ne va faire qu’une différence assez médiocre si on obtient 1.

La majorité des sortilèges ont une utilité claire (bien qu’aléatoire), mais il y en a tout de même quelques-uns qui ne méritent sans doute pas qu’on dépense une action pour s’en servir. Par exemple, Keldrilh dispose d’un sort dont le seul et unique effet est de retirer 1D en Initiative à ses adversaires pour la durée du combat. Encore bien plus bizarre : Kandjar possède un sort d’armure magique qui peut (2 chances sur trois) diviser par moitié les dégâts qu’il reçoit… mais ses effets ne durent qu’un seul tour de combat.


En ce qui concerne Kandjar et Caïthness (il n’y a pas d’exemples qui me vienne en tête concernant Keldrilh), il faut noter que leurs pouvoirs jouent fréquemment un rôle dans la partie purement littéraire des livres. On voit par exemple Kandjar lancer des éclairs magiques avec son bâton, créer des illusions, faire apparaître un démon ou s’envelopper d’un silence surnaturel. Caïthness, quant à elle, possède de grands pouvoirs de guérisseuse et a maintes fois l’occasion d’invoquer les esprits de la nature pour qu’ils lui prêtent main-forte.

D’une certaine façon, cela contribue à rendre le personnage plus crédible en ne bornant pas l’usage de ses pouvoirs magiques à des circonstances bien précises telles que le combat. Il y a de très nombreux jeux vidéos où des héros par ailleurs capables de lancer des éclairs ou des boules de feu se retrouvent incapables d’ouvrir une porte donnée à moins d’en découvrir la clé, ce qui est évidemment absurde. Dans les D&S, il existe aussi un écart entre ce que le héros peut faire dans l’histoire et ce qu’il peut faire dans le jeu, mais dans l’autre sens : le lecteur voit son personnage accomplir dans le cadre de la narration certaines choses qu’il est impossible de reproduire dans les combats (par exemple, il n’y a aucune règle permettant à Kandjar de lancer des éclairs avec son bâton lors d’un combat).

Même si cet usage de la magie n’est pas intégralement contrôlé par le joueur, il ne lui échappe pas totalement pour autant, car il résulte souvent d’un choix du Livre du Pouvoir.

En guise d’illustration, voici ce qui se passe lorsque Caïthness se retrouve confrontée à un mort-vivant armé d’un sceptre ensorcelé et lui réclamant un tribut magique, si le joueur décide (à raison) que l’attitude agressive est la plus appropriée :

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#6
Les héros


La fiction interactive, à l’époque actuelle, a fréquemment des protagonistes tout aussi développés que ceux qu’on pourrait rencontrer dans une nouvelle ou un roman. Mais dans les années 80, c’était loin d’être le cas. Tous les héros n’étaient certes pas aussi anonymes que celui du Sorcier de la Montagne de Feu, mais leur identité demeurait souvent très basique : on n’avait fort peu de détails concernant leur passé, leurs motivations, leurs émotions et tous les autres éléments de ce genre. À cette époque, donc, les héros des « Défis & Sortilèges » se distinguaient par une épaisseur bien supérieure à ce qui était habituel dans les LDVH.

(La série se distingue aussi en offrant, avec Caïthness, la seule véritable héroïne de LDVH de l'époque classique. Il y a d'autres LDVH qui permettent de jouer une femme - par exemple la série des « Messagers du Temps » - mais ce n'est dans ces cas-là qu'une option, qui ne change au fond pas grand-chose.)


Les quatre héros sont tous des étrangers au monde de Dorgan, ce qui est bien sûr approprié pour des aventures attachant une part aussi importante à l’exploration et à la découverte. Kandjar vient de la Cité des Nuages, située sur une île loin à l’ouest ; Péreim est un chevalier d’un empire situé à des mois de voyage au nord-ouest ; le pays de Keldrilh se trouve à l’est au-delà d’un vaste désert ; quant à Caïthness, elle vivait jusque-là carrément dans le monde des fées. Le souvenir de leur pays d’origine et de leur vie antérieure colore fréquemment leurs réflexions et leurs points de vue.


Chaque héros possède également une motivation personnelle qui l’amène à explorer le monde de Dorgan. Keldrilh s’est vu confier par son grand-père mourant la quête d’y retrouver une puissante harpe magique, témoignage du passé de son peuple. Péreim a été envoyé par son souverain pour récupérer l’écu légendaire qui permettrait de rendre à l’empire sa gloire. Caïthness cherche à retrouver la trace de sa famille humaine, dont elle n’a aucun souvenir. Kandjar a décidé de prouver la véracité de ses théories à ses collègues enchanteurs en retrouvant la cité mythique qui serait le berceau de leur peuple.

La quête personnelle de Kandjar est la plus mise en valeur des quatre : on le voit fréquemment chercher à se procurer des informations en rapport avec elle (par la discussion avec des personnes bien placées, la lecture d’ouvrages ou l’exploration de lieux anciens) et même rêver à l’école de magie qu’il compte ouvrir une fois la cité de ses ancêtres retrouvée.

Contrairement à Kandkar, les trois autres héros n’ont pas besoin de réussir l’aventure pour remplir leur quête (ils peuvent techniquement même réussir l’aventure sans avoir rempli leur quête, mais ce n’est guère probable sauf peut-être pour Péreim en multijoueur). Keldrilh et Caïthness peuvent atteindre leur but une fois qu’ils ont 8 points de Pouvoir, et Péreim peut y parvenir encore bien plus rapidement : il faut juste qu’il se rende au bon endroit et qu’il survive à ce qui l’y attend. Une fois leur quête personnelle remplie, les trois héros se verront néanmoins fixer un nouveau but (assez vague à vrai dire dans le cas de Keldrilh), de sorte que la ligne d’arrivée sera la même pour tout le monde.

(À noter qu’il y a une fin spéciale où le héros se range du côté des forces du mal. Tout comme avec la fin normale, les conditions pour y parvenir sont les mêmes dans les quatre livres. C’est une fin originale, mais pas bien satisfaisante d’un point de vue scénaristique, car n’ayant guère de liens avec les motivations et les personnalités des héros.)


Chaque héros a une personnalité, mais celle-ci est en bonne partie définie par le joueur avec les choix du Livre du Pouvoir. Entre un joueur qui choisirait majoritairement le comportement Prudent et un autre qui se montrerait aussi Agressif que possible, par exemple, un même héros apparaîtrait de façons très différentes. C’est un concept que je trouve fort original encore aujourd’hui. Mais bien sûr, il réclame un sacré investissement de la part de l’auteur : dans chaque livre, pas loin du quart des paragraphes est consacré aux choix du Livre du Pouvoir (et c'est sans compter les paragraphes auxquels on accède en conséquence directe d'un choix du LdP).
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#7
Comme Grattepapier, mon premier tome de la série (Péreim) ne m'a pas incité à me précipiter sur les autres. Etant jeune, l'aspect ludique me fascinait plus dans les LDVELH que la narration. Le faible nombre de paragraphes et de choix, les règles un peu bancales et l'aspect multijoueur ne m'ont pas précipité vers le reste de la série. Ceci dit, je trouvais le système de Pouvoir excellent et les illustrations assez réalistes apportaient une touche unique.

J'ai relu les quatre livres il y a quelques années et j'ai alors vraiment apprécié. Dans ce premier cycle, l'aspect exploration est fascinant. Les lieux sont nombreux et chacun recèle des mystères qui se découvrent parfois de haute lutte. Entre les quatre personnages et leurs rencontres spécifiques, les minima de Pouvoir à atteindre pour débloquer des passages et les rares objets magiques à trouver, j'ai eu plaisir à sillonner le Dorgan de long en large.

Quelque part, Gildas Sagot avait inventé le MMORPG version livre.
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#8
Après une pause liée au mini-Yaz (et un peu prolongée, comme le sont souvent les pauses), je me remets à l'étude de la série.


(18/05/2023, 10:31)Fitz a écrit : J'ai relu les quatre livres il y a quelques années et j'ai alors vraiment apprécié. Dans ce premier cycle, l'aspect exploration est fascinant. Les lieux sont nombreux et chacun recèle des mystères qui se découvrent parfois de haute lutte. Entre les quatre personnages et leurs rencontres spécifiques, les minima de Pouvoir à atteindre pour débloquer des passages et les rares objets magiques à trouver, j'ai eu plaisir à sillonner le Dorgan de long en large.

L'exploration est effectivement un aspect remarquable de ces quatre premiers livres D&S (et c'est précisément celui dont je vais traiter ci-dessous). Si ma découverte des LDVH s'était faite à travers une série comme les Défis Fantastiques plutôt qu'avec Kandjar, j'aurais sans doute jugé - lorsque j'étais enfant - que les D&S consacraient trop de temps aux descriptions de paysages et pas assez à l'action. L'absence de point de comparaison m'aura aidé à apprécier la série pour ce qu'elle est.

Le système des choix du Livre du Pouvoir est l'autre grande particularité de la série, et c'est là-dessus que je vais conclure.



L'exploration


L'exploration est un élément central des "Défis & Sortilèges", aussi bien du point de vue ludique que littéraire. Comme je l’ai mentionné auparavant, on incarne un personnage qui ne connaît au départ rien au monde où se déroule l'aventure, et on peut se déplacer avec une grande liberté. Comme je le détaillerai dans la partie portant sur les choix du Livre du Pouvoir, il n’est possible d’atteindre la fin de l’aventure qu’après s’être livré à une certaine quantité d’exploration.

À quoi ressemble la région dans laquelle se déroule l’aventure ? Elle est relativement simple, à commencer par sa délimitation (bordée par la mer à l’ouest et par des montagnes presque partout ailleurs). Les environnements naturels sont variés : il y a une vaste forêt et une autre bien plus petite, une zone de collines, une vaste plaine, un grand marais, un lac et l’orée d’un désert. Ajoutez à cela deux villes, un village de bûcherons, quelques voies de communication et une poignée de sites mystérieux, et vous  avez le cadre de la série. (Parmi les quatre D&S suivants, il n’y a que le deuxième qui se déroulera à nouveau dans cette région, laquelle aura bien entendu connu un certain nombre de changements en l’espace d’un demi-siècle.)

Lorsque j’étais enfant, je me souviens que la découverte du monde de Dorgan m’avait absolument émerveillé. Un univers imaginaire que je pouvais explorer à ma guise ? C’était génial ! La taille du cadre était très bien calibrée : le fait d’avoir 17 lieux accessibles directement par la carte (21 si on compte séparément les quartiers de Sélartz et Fenga) m’offrait un bon nombre de choix ainsi que la perspective de multiples découvertes, sans pour autant rendre cette liberté intimidante ou déroutante (un risque non-négligeable pour un lecteur de 9 ans). Chacun des lieux avait de plus une identité clairement distincte ; il n’était peut-être pas très réaliste qu’une région relativement modeste possède des paysages naturels aussi hétéroclites, mais cela contribuait utilement à la variété de l’exploration.

Le déplacement très libre sur la carte contribue bien sûr à mettre en valeur l’exploration, mais il a quelques effets néfastes. Le joueur peut en effet se déplacer à travers un lieu sans l’explorer, et donc sans se confronter aux périls qui s’y trouvent. Ça peut avoir du sens lorsqu’il s’agit d’une cité (qu’on peut sans trop de difficulté contourner sans y entrer), mais ça en a moins lorsqu’on traverse, par exemple, un vaste marais infesté de sangsues, d’araignées géantes et de morts-vivants.

Le texte met fortement en valeur l’exploration, avec une description extensive de l’environnement et des sensations qu’il provoque chez le personnage qu’on incarne. À titre d’exemple, voici les premières sections consacrées à l’exploration de la cité perdue de Séléite dans le livre de Kandjar :


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Plus de 350 mots, étalés sur deux paragraphes et demi, détaillent l’exploration menée par Kandjar avant qu’il ne se passe quelque chose amenant le joueur à faire un choix ! Ce genre de descriptions se rencontre presque toujours lorsqu’on découvre un lieu pour la première fois (même si la quantité de texte est généralement un peu moins importante).
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#9
Les choix du Livre du Pouvoir (1)


L’une des principales spécificités des Défis & Sortilèges, ce sont les « choix du Livre du Pouvoir » (de 15 à 18 selon le livre). Le joueur y sélectionne l’attitude que son personnage va adopter parmi quatre possibilités : Amicale, Prudente, Rusée, Agressive. Les situations dans lesquelles le joueur se voit confronté à un choix du Livre du Pouvoir sont presque toujours des interactions avec des êtres vivants et/ou intelligents.

(Les D&S ultérieurs – où le joueur contrôle quatre héros à la fois – ont remplacé ce système par celui des « choix du Livre des Personnages » : au lieu de décider quelle attitude adopter, on décide lequel des héros va agir. En théorie, ce n’était pas une mauvaise idée, mais l’exécution laissait à mon avis à désirer.)


En choisissant une attitude, le joueur ne sait pas exactement comment son personnage va agir, mais il a bien sûr une idée générale.

L’attitude Amicale signifie que le personnage se comporte de façon diplomate, ouverte, serviable, compatissante et/ou généreuse. En moyenne, c’est l’attitude dont les résultats sont les plus utiles : elle n’entraîne jamais de PFA , elle évite généralement au héros de se créer des ennuis, et c’est elle qui a le plus de chances de rapporter des objets magiques ou des bonus (le cadeau des nains, le bonus de +2 en Magie de Caïthness, etc.). Bien sûr, il ne faut pas exagérer : ce n’est pas toujours la meilleure attitude.

L’attitude Prudente signifie que le personnage va faire de son mieux pour éviter tout danger, par exemple en s’enfuyant ou en se cachant. La majorité du temps, cela permet effectivement d’éviter les problèmes ; en contrepartie, ça rend très peu probable d’obtenir quoi que ce soit d’utile. L’attitude Prudente est certainement la moins satisfaisante des quatre du point de vue littéraire : elle ne montre pas le héros à son avantage et elle n’engendre pas de conséquences divertissantes ou intéressantes (la seule et unique exception est un choix du livre de Keldrilh, où l’attitude Prudente le fait concourir avec un roi gnome à qui sera le plus gros mangeur, ce qui peut lui faire remporter une armure magique).

L’attitude Rusée est de loin celle qui est la plus difficile à anticiper. Il y a certaines situations où elle ne se distingue pas beaucoup de l’attitude Prudente (encore qu’elle implique généralement un comportement plus actif). Il y a d’autres fois où le héros va essayer de jouer au plus fin… ce qui peut très bien échouer ou même lui attirer des ennuis. C’est dans les situations qui demandent de l’observation et de la présence d’esprit que cette attitude se révèle la plus utile.

L’attitude Agressive signifie que le héros recherche la confrontation. Au minimum, ça le fait se comporter de façon susceptible ou péremptoire ; le plus souvent, ça implique un recours très direct et peu subtil à la violence. Il n’est pas rare que cette attitude vaille des ennuis inutiles au héros et, en moyenne, c’est sans doute celle dont les résultats sont le moins souvent profitables. Il arrive cependant que recourir à la violence sans prendre le temps de réfléchir soit réellement la meilleure solution. Par exemple, dans la situation où Caïthness se retrouve confrontée à un mort-vivant armé d’un sceptre magique, l’attitude Agressive est la seule qui lui permet de s’en débarrasser sans perdre des points de Magie ou courir le risque de se faire tuer.


Bien sûr, les choix du Livre du Pouvoir ne débouchent pas nécessairement sur quatre conséquences radicalement différentes. Même si le raisonnement et le comportement du héros dépendent de l’attitude choisie, le résultat matériel (combat, découverte d’un objet, etc.) peut être le même pour plusieurs attitudes différentes. Par exemple, lorsque Kandjar découvre l’ancienne cité de Séléite et qu’il commence à s’y passer des choses bizarres, l’attitude Prudente (où il détale à toutes jambes) et l’attitude Rusée (où il utilise un sort pour empêcher l’entité surnaturelle qui hante la cité de se manifester) reviennent objectivement au même.


Certains choix du Livre du Pouvoir ont des conséquences bien plus littéraires que concrètes. Par exemple, à Fenga, Caïthness peut débarquer dans une auberge où deux hommes armés sont en train de s’en prendre à un adolescent. Avec l’attitude Amicale, Caïthness invoque les esprits du feu pour effrayer les agresseurs… et provoque ainsi une panique générale qui fait s’enfuir tout le monde ; craignant de se faire arrêter, elle s’esquive en toute hâte. Avec l’attitude Prudente, elle se laisse bousculer par l’aubergiste qui s’enfuit, et se retrouve dans la rue où elle reste jusqu’à ce que les gardes arrivent ; elle n’apprend que plus tard ce qui s’est passé. Avec l’attitude Agressive, elle dégaine sa dague et fonce pour secourir l’adolescent, mais elle est gênée par la foule et arrive trop tard pour le sauver d’une blessure mortelle ; après avoir été questionnée par les gardes, elle est relâchée et passe le restant de la nuit en proie à un sérieux cafard. La scène se déroule de façon bien différente dans ces trois cas, mais (en-dehors du point de pouvoir obtenu) ça n'a aucun impact concret sur la situation de l'héroïne.

Avec l’attitude Rusée, Caïthness s’exclame que les gardes sont en train d’arriver, ce qui fait détaler les agresseurs. Elle découvre ensuite que celui qu’elle prenait pour un adolescent est en réalité le bouffon du gouverneur de Fenga. Il invite Caïthness à l’accompagner au palais du gouverneur, où doit avoir lieu une grande fête ce soir même. Il s’ensuit trois paragraphes, comportant plusieurs centaines de mots et de multiples descriptions atmosphériques. C’est un passage sympathique, mais la seule chose qu’on en retire d’objectivement utile, c’est un indice sur un lieu où Caïthness pourra faire une rencontre importante (il est très possible que cette information ne soit utilisable que nettement plus tard, parce qu’on ne peut pas accéder au lieu en question avant d’avoir au moins 8 points de Pouvoir). La récompense pour avoir fait le meilleur choix est donc avant tout la satisfaction que l'on éprouve en se mettant à la place de notre héroïne, qui a su sauver quelqu'un grâce à son astuce et s'en voit récompensée en étant invitée à une fête splendide.
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#10
J'attendais le passage de ton analyse sur le monde, la carte et le système d'exploration. Il y a une atmosphère spécifique à Dorgan qui m'avait marquée à l'époque, sachant que j'étais passé par d'autres univers auparavant. La carte y est pour beaucoup, et avoir un index des lieux accessibles aussi. Cela différenciait des autres univers où la carte était là à vocation illustrative uniquement, avec même des lieux qu'on n'explorait absolument pas dans le livre.
Les descriptions, comme tu l'as montré, y sont aussi pour beaucoup dans le parfum d'originalité. Mais hélas, le fait qu'on ne vive généralement qu'une seule péripétie par lieu a un côté décevant, et brise un peu la magie de ce monde. Jusqu'à ce qu'on reparcourt le lieu avec un autre perso.
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#11
(20/07/2023, 21:33)Salla a écrit : J'attendais le passage de ton analyse sur le monde, la carte et le système d'exploration. Il y a une atmosphère spécifique à Dorgan qui m'avait marquée à l'époque, sachant que j'étais passé par d'autres univers auparavant. La carte y est pour beaucoup, et avoir un index des lieux accessibles aussi.

Le monde de Dorgan a une fraîcheur et une atmosphère qui m'avaient totalement captivé lorsque j'étais enfant, et qui m'inspirent encore une nostalgie agréable aujourd'hui.

Je pense que c'est dû à un mélange de facteurs ludiques et littéraires. Tout un petit monde nous est offert, il est richement décrit et on peut accéder aux trois quarts de son contenu de façon extrêmement libre et rapide.


Citation :Mais hélas, le fait qu'on ne vive généralement qu'une seule péripétie par lieu a un côté décevant, et brise un peu la magie de ce monde.

Il est vrai que l'immense majorité des lieux est centrée sur une rencontre/confrontation/découverte. Cela ne m'a jamais vraiment dérangé, cependant. Je trouve que cela renforce l'atmosphère de libre déplacement, en garantissant qu'on ne devra jamais passer trop de temps dans un endroit donné.
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#12
Les choix du Livre du Pouvoir (2)


Chaque fois que le joueur fait un choix du Livre du Pouvoir, il gagne un point de pouvoir du type correspondant à l’attitude choisie. Les points de pouvoir jouent un rôle assez similaire à celui de l’expérience dans les jeux de rôle : à mesure qu’il en gagne, le héros va se découvrir de nouvelles capacités et il obtiendra la carrure héroïque qui lui permettra d’accéder à certains lieux.

La distinction entre les quatre différents types de points de pouvoir peut ou non jouer un rôle. Par exemple, pour débloquer la fin maléfique, il faut posséder 8 points de pouvoir Agressif. Le lieu où il faut se rendre pour atteindre la fin normale nécessite quant à lui de posséder 10 points de pouvoir de n’importe quel type.


Les compétences obtenues par Péreim sont fort simples. Il inflige 4D de dommage une fois qu’il atteint 5 points de pouvoir ; lorsqu’il en a 10, chacune de ses attaques réussies possède une chance sur trois d’être automatiquement mortelle.

Les trois autres personnages apprennent quant à eux à se servir de nouveaux sorts. Le type de leurs points de pouvoir joue cette fois-ci un rôle, car ils découvriront certains sorts plus ou moins vite selon les attitudes qu’ils ont privilégiées.

Prenons par exemple quatre des sorts avancés de Caïthness : Guérison, Métamorphose, Mimétisme et Vivacité. Guérison est un sort de soin plus puissant que celui dont elle dispose au départ ; Caïthness l’apprend automatiquement lorsqu’elle a 6 points de pouvoir, mais cela ne lui demande que 3 points s'ils sont de type Amical. Métamorphose la change en ourse ; ça lui demande 11 points de pouvoir, mais seulement 5 points de pouvoir Agressif. Mimétisme la rend plus difficile à toucher par ses ennemis (6 points de pouvoir ou 4 points Prudent) ; Vivacité augmente ses caractéristiques physiques (6 points de pouvoir ou 3 points Rusé).

Ce système est sympathique, car il donne à nos choix d’attitude des conséquences non seulement concrètes mais appropriées (l’attitude Amicale favorise la magie de guérison, l’attitude Agressive procure des sorts portés sur la destruction, etc.). À noter cependant qu’il n’est pas très équilibré en ce qui concerne Kandjar : il y a trois sorts avancés que celui-ci peut obtenir plus vite grâce à l’attitude Agressive, un seul pour l’attitude Amicale, et rien du tout pour les attitudes Prudente et Rusée.


Le système des points de pouvoir sert également à régler le rythme de l’aventure. Comme il n’est presque jamais possible d’obtenir plus d’un point de pouvoir dans un lieu donné, ce mécanisme rend le voyage et l’exploration indispensables pour pouvoir débloquer l’accès à l’une des deux fins.

La très grande liberté de déplacement qu’offre la série n’est manifestement guère compatible avec un scénario développé, puisque le joueur peut se rendre aux différents lieux dans n’importe quel ordre. Mais le système des points de pouvoir permet tout de même à l’auteur d’exercer un certain contrôle, en évitant que certaines choses ne se produisent trop tôt dans l’aventure.

Dans la cité perdue de Séléite, par exemple, on peut rencontrer une entité surnaturelle qui va nous parler de la grande guerre qui a eu lieu dans cette région il y a mille ans. Pour éviter que ces révélations n’interviennent alors qu’on a à peine commencé d’explorer la région (ce qui est très possible notamment pour Kandjar et Péreim, dont le point de départ est proche de Séléite), la rencontre ne peut être débloquée que si on a au moins 6 points de pouvoir.

Un exemple plus significatif encore, ce sont les quêtes initiales de Caïthness et Keldrilh. Pour que la première apprenne le secret de ses origines et que le second découvre la harpe légendaire qu’il recherche, il faut que chacun aille explorer un endroit précis, ce qu’ils peuvent techniquement faire très tôt (dès le tour 4 pour Keldrilh). Pour éviter que cet évènement majeur ne se produise trop tôt dans l’aventure, il y a dans les deux cas un obstacle qui ne peut être franchi que lorsque le personnage a véritablement de la bouteille (8 points de pouvoir). Kandjar ne peut quant à lui accomplir sa quête initiale qu’en finissant le livre, mais avec 8 points de pouvoir, il peut tout de même accomplir un très grand progrès dans ses recherches. Dans les trois cas, visiter l’endroit approprié en ayant suffisamment de points de pouvoir permet au héros concerné d’obtenir une récompense ultra-puissante (gros bonus en Magie pour Kandjar et Keldrilh ; toutes les blessures subies sont divisées par deux pour Caïthness).

Assez bizarrement, le mécanisme n’a pas été employé pour retarder le moment où on peut être confronté au boss optionnel (qui est techniquement un méchant plus important que le boss de fin, lequel n’est guère plus qu’un simple gardien). C’est d’autant plus gênant que c’est ce boss optionnel qui détient le bouclier magique dont la récupération constitue la quête initiale de Péreim.

Si on se rend dans un lieu sans avoir suffisamment de points de pouvoir, on est toujours libre de revenir plus tard. Une visite manquée n’a pas de conséquences négatives… sauf pour un lieu, celui auquel il faut se rendre pour atteindre la fin normale. Si on s’y rend sans avoir 10 points de pouvoir, notre héros se voit infliger un handicap énorme et permanent : Kandjar, par exemple, perd cinq points de Magie ! C’est tout à fait injuste car le lieu est facilement accessible et il n’y a presque aucun indice permettant de deviner à l’avance qu’il est si dangereux.
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