L'interview de Gynogege
#1
Et il décida de ne pas laisser Voyageur Solitaire tout seul...
donc je me lance, sans présentation très poussée, je ne suis pas sûr que mon cadre de vie ou mes goûts musicaux et littéraires donnent tant d'indications sur moi (mais ça n'interdit pas d'en parler, bien sûr). Je vais donc plutôt présenter les doutes qui m'ont assailli avant de répondre à cette initiative.
Un format d'interview libre avec un post dédié pour chaque auteur ? Est-ce que ce ne serait pas un succédané de compte Facebook ou Twitter, l'exercice obligé auquel je me suis fait un devoir d'échapper ? Des fans en furie qui viendraient m'encenser, des "haters" qui viendraient me crucifier, et l'obligation de montrer la couleur de mon slip, ou de prendre parti dans l'agression d'un lapin par un raton-laveur... disons que la communauté somme toute restreinte des ldvelh semble protéger de ces dérives, et après tout on est déjà exposé chaque fois qu'on publie une AVH. Si les critiques peuvent être parfois un peu coupantes, le bon état d'esprit qui règne en ce lieu permet d'envisager l'exercice assez sereinement. Et je préfère qu'on vienne me poser les questions ici.
Bon, d'accord, le risque est limité... mais est-ce que tout ça n'est pas un peu narcissique ? Sur ce point, la réponse est rapide, et c'est: oui ! Il faut malheureusement accepter une bonne fois pour toutes qu'écrire des textes et les proposer à la lecture est une activité narcissique. Pas que, peut-être... c'est aussi un exercice de communication, de mise en relation avec le lecteur. Mais dans un rapport profondément dissymétrique, même si le format spécifique de l'Aventure Dont Vous Etes le Heros laisse perfidement croire qu'il rétablit l'équilibre... non, mais vous pensez vraiment que vous êtes le héros de mes AVH ? Alors que je vous emmène où je veux, et quand je veux ? Donc se proposer pour une interview n'est pas plus narcissique, et sans doute même encore plus équilibré puisqu'on peut rentrer dans un vrai dialogue.
Pour finir de surmonter ces doutes, il faut bien admettre que j'ai laissé passer un peu de temps pour voir si l'expérience de Voyageur Solitaire débouchait sur quelque chose d'enrichissant, ou pas. Ayant été plutôt convaincu, je vous propose donc cet espace d'expression pour y discuter des mes AVH en général, et de n'importe quoi en particulier.
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#2
Bonjour Gynogege,
Merci de me recevoir en ce lieu.
Ma première question sera essentielle, attendue par tous nos confrères auteurs avec une impatience indubitable : quelle est la couleur de ton slip ?
Heu, non, merde, c'était pas ça...

Bon, soyons sérieux et commençons avec du classique : pourquoi avoir franchi le pas de l'écriture ? 
Dans ton message de présentation, tu dis qu'écrire et proposer des textes est narcissique, cela m'intrigue. C'est un aspect (une raison ?) auquel je ne pensais pas. Le côté narcissique est présent pour moi dans les feedback principalement : on ne va pas se mentir, quand ils sont bons, ça fait toujours plaisir et allez, on va même dire que ça flatte son ego. Mais dans le fait d'écrire...
C'est donc ton cas ? Est-ce une des raisons qui t'ont poussé à écrire des AVH ? Et quelles sont les autres ?
Anywhere out of the world
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#3
Aujourd'hui il a des motifs gris et noirs... Mrgreen 

Concernant l'écriture, c'est compliqué. J'ai toujours écrit des histoires, enfin après cinq ans quand même... mais j'étais dans une écriture romanesque, enfin pas interacive en tous cas. Et puis l'envie est passée. Très certainement parce qu'il n'y avait pas de lecteurs. Il y a plus de quinze ans maintenant, je fréquentais un site qui s'appelait Librisme et qui avait ceci en commun avec RdV que même le dernier pékin pouvait poser un texte et les autres auteurs amteurs le lisaient et réagissaient, même pour dire que c'était nul. Le site a été fermé par son créateur et la communauté n'a pas retrouvé de lieu similaire. Ma léthargie littéraire a très clairement coïncidé avec cette disparition.
Donc, et pour en revenir aux AVH, il est absolument évident pour moi que le retour du goût de l'écriture est essentiellement lié à la fréquentation de la Taverne, mais surtout de RdV et de Littéraction. Etre lu c'est pour moi essentiel, et c'est pour ça que je parle de narcissisme. Si on écrit un journal intime qu'on tient consciencieusement fermé, je ne parlerais pas de narcissisme, mais de besoin de s'exprimer et de mettre de l'ordre dans ses idées, ou dans sa vie. Le fait de vouloir un public et de l'assumer, vu de moi il y a forcément une dimension narcissique, qu'on soit dans l'écriture, le théâtre, la musique... Bien sûr, il n'y a pas que cela, en tous cas j'espère...
Après, on peut dire que l'AVH m'a ouvert des horizons aussi. C'est un genre très particulier où l'histoire n'est pas linéaire (même si quand on lit du Ian Livingstone ou du Joe Dever, des fois...) et donc on peut envisager plusieurs versions de cette histoire. Plusieurs lectures. En littérature classique, c'est un effet qu'on obtient avec des romans polyphoniques, à chaque fois un personnage va donner une version différente de la même histoire. Là, on a un point de vue unique, mais en fonction des chemins suivis on peut découvrir une autre version... C'est très riche en ce sens.
Je ne dis pas que je n'opérerai jamis de retour vers une narration classique, mais je n'ai certainement pas exploré les possibilités des AVH autant que je pourrais. Celle que je suis en train d'écrire pour le Mini-Yaz aurait pu être une nouvelle en fait (je sais que Sukumvit a aussi fait ce genre de transposition), mais c'est intéressant d'intégrer des choix alternatifs pour transformer cette nouvelle et lui donner un côté ludique. Idéalement il faut que le fait d'utiliser le mode de l'AVH ait un sens véritable par rapport à ce qui est raconté, mais ce n'est pas toujours évident.
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#4
Je comprends mieux maintenant.
Pour ce qui est de la littérature interactive et de ses horizons, je te rejoins : quand j'ai vraiment commencé à développer l'univers de Shamanka, j'ai pensé aussitôt à écrire un roman plutôt que trois AVH. Mais j'avais trop d'idées et, comme tu l'as bien souligné, l'AVH permet de proposer d'autres possibilités, d'autres chemins, d'autres fins, le tout dans une même histoire.

Tu dis qu'être lu est pour toi essentiel. Tu ne conçois donc pas d'écrire une AVH que pour toi seul, pour le plaisir uniquement ? Ou, pour tourner ma question autrement, tu envisagerais d'écrire une AVH sans certitude d'en avoir des retours ? (quelque part, c'est un peu le cas ici, on ne sait jamais si on va avoir des feedbacks et si oui combien).
Anywhere out of the world
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#5
La réponse est non: si je devais avoir zéro retour et zéro perspective d'édition, j'arrêterais d'écrire des AVH, c'est sûr. Et c'est même encore plus puissant pour une AVH que pour un texte normal. Quand j'étais plus jeune, je n'étais pas dans le narcissisme mais presque dans l'onanisme Smile C'est-à-dire que oui, je pouvais passer des heures à lire mes propres textes et ça me suffisait. J'ai mis du temps avant de franchir le pas de les montrer, mais peut-être moins de temps que d'autres...
Mais dans le cadre de la littérature interactive, c'est presque criminel de ne pas être lu NoGreen On espère faire vivre une expérience unique au lecteur, une expérience qu'on ne peut pas vivre pleinement, parce qu'on connaît déjà les pièges et les secrets de l'AVH. Donc, si je devais ne pas être lu, je n'arrêterais peut-être pas d'écrire mais j'arrêterais les fictions interactives, c'est sûr... ou alors j'en écrirais pour mes enfants.
En revanche, un ou deux retours peuvent me suffire. Il y a quelques personnes dont je sais qu'elles vont lire mes AVH presque à coup sûr, et c'est une sacrée source de motivation. Je peux même avouer que des fois je mets des chemins cachés, en sachant pertinemment qu'il n'y a que Skarn qui les trouvera (Cf. ->comment débloquer le personnage de la Dame du Donjon dans le Manuel de la Ligue Communale) !
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#6
Sad 
"Disruption" peut être considérée comme un mélange réussi de science-fiction et de politique fiction. Un tel mélange est assez unique dans l'univers des AVH. A ma connaissance il n’y a pas d'autres LDVELH ou d.AVH proposant un tel mélange. En particulier le fait de proposer d'incarner une personnalité politique encore en activité. Peux tu nous en dire un peu plus sur la genèse de cette oeuvre? Comment tu en es venu à imaginer cette histoire complètement folle. Et ses éventuelles influences ? J'ai pensé au film "idiocracy" (planète stupide) et à certains tomes de la BD " le Jour J" qui imaginent un futur où Mai 68 a débouché sur une insurrection armée qui a installé Cohn Bendit au pouvoir. Ton histoire en propose presque l'antithèse.
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#7
Je pense que je devrais réussir à trouver quelques questions à poser sans avoir besoin de chercher trop longtemps...


Commençons par la question du cadre. La plupart de tes AVH utilisent l'univers classique des Défis Fantastiques. Est-ce que c'est par nostalgie ? Est-ce qu'il y a des éléments que tu trouves particulièrement intéressants dans cet univers ? Est-ce que c'est simplement une façon de te simplifier la vie en réutilsant un univers déjà existant ? Est-ce qu'il y a une autre raison ? Et est-ce que tu n'as jamais le sentiment que tu serais plus libre en inventant toi-même totalement le cadre de tes aventures ?
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#8
Pour grattepapier:
à vrai dire je ne me souviens plus exactement comment l'idée de Disruption m'est venue, je me souviens que c'était une idée qui m'avait traversé la tête avant les mini-Yaz: les hommes politiques d'aujourd'hui confrontés aux conséquences de leur décisions dans le futur. Après, pourquoi est-ce que ça a pris cette forme ? J'ai essayé de pousser la logique actuelle à l'extrême et de voir jusqu'où ça pouvait aller. Je pense que c'est le principe des dystopies en général, une sorte d'extrapolation linéaire (ou hyperbolique ?) par rapport à des tendances observées. Concrètement ça s'appuie sur pas mal de lectures d'articles pour le boulot, sur les nouvelles technologies et sur le transhumanisme.
A l'époque je n'avais pas lu "Homo Deus" de Yuval Noah Harari, mais j'en avais pas mal entendu parler, et je me suis rendu compte aussi qu'il y avait pas mal de choses en commun. Dans l'univers de la fiction, de manière plus ou moins inconsciente je pense que j'ai été influencé par "Bienvenue à Gattaca" (un cas emblématique où la réalité a déjà potentiellement rejoint la dystopie) et très certainement par la BD "S.O.S Bonheur", extraordinaire de clairvoyance, que j'ai encore relue récemment. Il y a aussi plusieurs films de série B (Z?) américains que j'ai vus avec ma femme, et dont le nom m'échappe complètement. Dans l'un d'entre eux, les robots ont remplacé le gouvernement et personne ne le sait.
Sur le fait d'incarner un personnage politique réel c'était un peu putassier ! Je me suis dit que taper sur Macron m'aiderait à gagner des voix pour le mini-Yaz Smile Honnêtement, j'ai voulu faire référence à Macron, mais le personnage est une synthèse des différents présidents qui se sont succédés: dans le rapport aux femmes on peut voir Macron et Brigitte, mais aussi Hollande qui répudie Trierweiler après avoir profité de ses relations dans la presse, Chirac qui profite de la fortune de Bernadette, Sarkozy qui s'agrippe à la fortune et la beauté de Carla Bruni... la fascination pour le Japon, c'est plutôt Chirac. Quant aux idées développées sur la transformation de la société, elles sont unanimement partagées par les partis dits "institutionnels" et par les grandes entreprises. Donc une de mes sources d'inspiration a aussi été tout simplement les plans pour la transformation de l'industrie initiés par un Arnaud Montebourg dans un document où on pouvait légitimement se demander ce que devenaient les humains dans le travail de demain... bref, je m'égare.
En tous cas s'en tenir à Macron serait très réducteur et c'est probablement un défaut de l'AVH, même si ça a pu participer à son succès !
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#9
pour répondre à Outremer: le fait de naviguer dans l'univers des DF est très clairement un recours à la simplicité. Pas besoin d'inventer de nouvelles règles et pas besoin d'inventer un nouvel univers. D'un autre côté c'est un univers assez libre où on peut faire à peu près n'importe quoi. Malheureusement il n'est pas libre de droits Smile
Je rêve de construire un univers un peu standard et ouvert, comme Linux, où chacun pourrait piocher et construire à sa manière. Il y a trop d'univers de Fantasy, et beaucoup n'apportent pas grand-chose, ils n'existent que parce que Tolkien ou les DF c'est une licence. Mais en tant que lecteur se lancer dans une énième description d'un univers avec des rois et des dieux qui n'existent que pour le besoin de l'intrigue et qui sont complètement interchangeables avec des trucs que je connais déjà... bof. En plus se taper des règles de combat intégralement pour découvrir que c'est une version à peine modifiée des DF ou de Loup Solitaire. Bof aussi.
Donc j'essaie d'éviter d'infliger ça au lecteur. Quitte à prendre un truc standard, autant prendre un truc qui existe.
Donc je serais preneur d'un univers fantasy libre de droits, et de règles standard pareil. Sinon effectivement je préfère créer mon propre univers, mais sans doute pas de la Fantasy. Et il faut que les personnages, les dieux, les rois, aient chacun une justification précise. Pour l'heure c'est plutôt l'univers de type "Disruption" que je privilégie pour exprimer des choses plus personnelles (dont je précise que l'univers est libre de droit !)
Heureusement, il y a la Grèce Antique, Sherlock Holmes... mais je ne connais rien aux dieux grecs et la rigueur historique n'est pas mon fort.
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#10
Pour ce qui est de la rigueur historique, tout dépend de ton AVH :
- Si c'est vraiment une AVH historique, là d'accord, il faut un background solide, une documentation et des recherches soignées, éviter les anachronismes...
- Mais après, tu peux imaginer un univers qui s'inspire seulement d'une période historique ou d'une civilisation précise. C'est ce que j'ai fait avec Shamanka qui est inspiré de l'Afrique mais qui ne prétend pas à une quelconque exactitude historique, voire géographique. La Babylone et l'Egypte de Doug Headline dans sa saga du Prêtre Jean sont dans le même cas, sans parler de sa vision des mines de Salomon... Tout dépend de la part que l'on veut donner au ludique, au plaisir de jouer et au côté historique.
"On peut violer l'Histoire mais à condition de lui faire de beaux enfants". Je n'aime pas trop cette phrase mais dans l'univers des AVH, je la trouve assez juste.

Sinon, pour revenir à tes propos, quelles difficultés as-tu rencontré en te tournant vers l'écriture d'AVH alors que jusqu'ici, tu ne t'étais consacré qu'à l'écriture "classique" ?
Anywhere out of the world
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#11
Déjà le retour à l'écriture a été dur en soi Smile
Je me suis aperçu que j'avais perdu du vocabulaire, de la fluidité. Mais bon ce n'est pas spécifique aux AVH. Sur les AVH, peut-être que le plus compliqué c'est de transposer ma méthode d'écriture classique. Je ne fais pas de schéma, de plan, avant de commencer. Surtout que ma première AVH a été Le Manuel de la Ligue Communale. Je me suis lancé dedans de manière complètement "impressionniste" (je ne sais pas si l'expression est justifiée): en commençant des morceaux par-ci par-là, sans trop savoir comment ça allait rabouter. Parce que c'est comme ça que je faisais avec mes derniers textes. Et je commençais à pas mal patiner.
Heureusement je me suis lancé dans la Troisième Porte du Rêve, une AVH courte que j'ai réalisée très rapidement. Le fait de l'avoir finie et d'avoir vu ce que ça faisait d'aller jusqu'au bout, ça m'a donné le courage de relancer la machine pour le Manuel, de reprendre pas mal de choses et surtout d'accepter de faire des renoncements (oui, oui, au début c'était encore plus compliqué Wink ). C'est pour ça que je pense le mini-Yaz est un exercice très important: ça permet de voir que c'est possible de finaliser quelque chose et qu'on ne peut pas tout faire dans une AVH.
Ensuite, mon plus gros problème, et je le traîne toujours, c'est que j'ai tendance à "ouvrir" trop de portes en début d'aventure; à un moment il faut refermer ces portes et on s'aperçoit que ça prend plein de paragraphes de refermer les possibilités qu'on a ouvertes. Au départ je voulais me limiter à 150-200 paragraphes pour le Manuel, au final j'en ai fait 650 ! C'est dire si mes estimations étaient mauvaises. Je crois que Charlie Higson a dit qu'il a fait le même genre d'expérience sur "Gates of Death". Malgré tout, je pense que je gère un peu mieux.
Sinon, le côté arborescent correspond bien à ma formation et à mon travail, donc cet aspect-là ne m'a pas trop posé de problème, avec la gestion de Codes ou l'équilibrage des caractéristiques. Ma plus grosse difficulté a été vraiment de retrouver un niveau d'expression littéraire convenable.
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#12
Est-ce que tu as des thématiques de prédilection ? Et un type de personnages préféré ?
Au regard de "Disruption" et du "Manuel de ligue" (qui sont les seuls AVH de toi que j'ai lues), on a le sentiment que tu as un certain intérêt pour la chose politique (voire la révolte ou la révolution) et pour les personnages de leaders/ meneurs d'hommes...
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#13
Disons qu'il a certains sujets qui sont largement absents des ldvelh, la politique en fait partie, et ça m'intéresse d'aborder des sujets un peu glissants tout en essayant de ne pas perdre le lecteur... pour le Manuel c'était même un exercice plutôt amusant ! Je pense que dans l'AVH que je suis en train d'écrire, je continue dans cette thématique, c'est à dire décrire des sociétés et des comportements qui ne correspondent pas à notre norme sociale.
Concernant les hommes/femmes de pouvoir, ben non ce n'est pas un sujet de prédilection, mais tu as raison je me suis fait cette remarque aussi ! Je pense que c'est dû au genre en lui-même, on a tendance à vouloir poser un personnage qui a quelque chose d'exceptionnel et souvent ça se traduit par du pouvoir. Mais dans ton AVH ce n'est clairement pas le cas, donc c'est possible de faire autrement. Il faut croire que j'ai un goût pour ça sans le savoir.
Maintenant, ce qui me plaît c'est d'essayer de poser des personnages ambigus, voire un peu détestables. C'est dangereux mais ça me tente. J'appellerais ça une AVS: une Aventure dont Vous êtes le Salaud.
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#14
C'est tentant effectivement.
Je crois que le seul exemple qu'on a en LDVH, le plus connu du moins, c'est Défis sanglants sur l'Océan où l'on incarne un pirate qui pille des navires, attaque des villages et caravanes, capture des gens pour les revendre comme esclaves... Après, c'est (très) casse-gueule, jusqu'où aller ? Peut-on imaginer de proposer une AVH où on incarnerait par exemple un planteur du Sud des USA pendant la Guerre de Sécession, propriétaire d'une plantation avec des esclaves ? Peut-on imaginer de proposer une AVH sur la Seconde Guerre Mondiale où on incarnerait un officier allemand fidèle au régime ?

Pour ma part, je préfère proposer de temps à autres des choix "amoraux" au lecteur, trahir un employeur, abandonner un compagnon et fuir seul, refuser de venir en aide à quelqu'un qui nous a aidé, voler un cheval...
Dans Shamanka, on se voit offrir Danaé comme esclave et, si on n'abuse pas d'elle et qu'on la traite bien, pour autant le fait qu'elle soit notre esclave ne cause pas de cas de conscience (du moins, je n'ai eu aucun retour dans ce sens dans les feedbacks). Lors de la révolte de la population noire, on peut choisir de fuir la ville seul, en laissant tout le monde se démerder et ne se préoccupant que de soi-même.
Dans L'île des Dieux Sauvages, on peut découvrir un trésor, le partager avec ses hommes et se barrer, laissant les prisonniers qu'on venait sauver à leur sort.
Anywhere out of the world
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#15
Incarner un "salaud" laissera un sentiment de malaise chez le lecteur, sauf s'il est lui-même un salaud. Ou il faut que ce soit totalement parodique et second degré, ou dans un univers parodique. Il y avait un jeu vidéo (dungeon keeper?) ou on incarne le méchant, et pour faire avancer les travaux de notre donjon on doit faire régner la terreur, fouetter les ouvriers pour qu'ils bossent plus vite, etc. Mais c'est amené de manière très ludique, de telle sorte qu'on n'éprouve pas de compassion pour les pauvres gobelins maltraités. Si on avait de l'empathie pour eux on ne pourrait plus jouer!

Ce qui me semble plus intéressant c'est d'incarner un salaud dont la conscience "reprend le dessus". Il cherche alors une rédemption, sans savoir s'il pourra la trouver, et au quotidien il a du mal à vivre avec le poids de ses actes passés. Mais c'est aussi casse-gueule, une AVH est avant tout faite pour se distraire, pas pour se plomber le moral. Il faudrait vraiment que ce soit rédigé aux petits oignons pour qu'on se sente emporté par l'histoire, qu'elle soit poignante sans être trop dramatique.

Le coté ambigu est intéressant: incarner un personnage avec des faiblesses et bassesses, et aussi dans le même temps avec des traits de caractère admirables, ce serait très intéressant. Mais aussi avec des opinions clivantes, par exemple un personnage qui adore la tauromachie, ce qui choquera une grande partie des gens mais pas toute. Il pourrait en même temps faire partie d'une brigade nocturne d'aide aux SDF. Ou même un personnage avec des contradictions, comme un gérant d'une AMAP qui est passionné de mécanique et roule en gros SUV au quotidien.
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