Pinaillage grammatical
#1
Une question qui m'a toujours turlupiné :

Faut-il dire "Je sais ce qu'il me reste à faire", ou "Je sais ce qui me reste à faire" ?

De même avec "Quoi qu'il advienne" vs "Quoi qui advienne", ou encore, "C'est tout ce qu'il me reste" vs "C'est tout ce qui me reste" (etc).

Existe-t-il une règle grammaticale officielle ? Ou s'agit-il d'un cas ambigu où les deux formes sont permises, comme ça arrive parfois en français (ex : amulette en jade vs amulette de jade) ?
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#2
Le vrai français est "Je sais ce qu'il me reste à faire". La deuxième tournure n'est pas française me semble t-il. "Qui" est un pronom se rattachant à une personne et je n'y vois pas son utilité dans ces propos.
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#3
On dira pourtant "Ce qui doit arriver arrivera" ou encore "La tuile qui est tombée du toit" : il n'y a pas de personnes en cause dans ces énoncés, mais cela n'empêche pas l'usage de "qui".
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#4
C'est une question de grammaire effectivement.
Qui est une conjonction de subordination qui reprend le groupe nominal précédent. Valeur de sujet pour la proposition subordonnée.
Ex : "La tuile qui est tombée du toit" Qui reprend le nom "tuile" et sert de sujet à "est tombée". De même dans "Ce qui doit arriver arrivera", qui reprend ce.
Qu'il = que il. Que est ici conjonction de... euh, j'ai un doute sur le titre grammatical exact. Toujours est-il qu'il sert à introduire le "il", qui est le sujet du verbe et peut possèder une valeur générale dans le cas d'expressions par exemple.
Ex : "C'est tout ce qu'il me reste". On pourrait reformuler en "il ne me reste que cela à faire". Le "il" est bien sujet.
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#5
La question m'intrigue également, et depuis un bon moment déjà. Je me suis permis de l'aller poster sur un forum littéraire où je vais de temps en temps traîner mes guêtres (ouah, comment j'me la raconte!), et voici ce qu'un des membres m'a obligeamment répondu :

Citation :Bonsoir, Pierre !

C’est dans Grevisse et dans Hanse que cette question est le mieux expliquée. Je vais résumer ce qui s’y trouve et, pour notre édification, y ajouter les citations :

1 On emploie QU’IL lorsque le verbe est ESSENTIELLEMENT impersonnel.
* Il faut CE QU’IL faut. Voilà CE QU’IL vous faut.
* Je ne sais pas CE QU’IL y a.

2 Les fluctuations de l’usage s’observent lorsque le verbe peut être personnel OU impersonnel.
a) QU’ s’impose lorsque ce qui suit le verbe constitue un « sujet réel ».
* Je prendrai CE QU’IL me plaira de prendre. (-> il me plaira de prendre qu’)
* ° CE QUI me plaira de prendre.

Le Robert (Usuels) écrit qu’on emploie à peu près indifféremment :
* Tu sais CE QU’IL va arriver ? (Gallo)
* Tu sais CE QUI va arriver ?
* Qu’est-CE QU’IL se passe ? (Il se passe quelque chose.)
* Qu’est-CE QUI se passe ? (Quelque chose se passe.)

b) On essaye aussi de faire une distinction à propos de PLAIRE.
* Choisis CE QUI te plaît. (= ce qui t’attire, ce qui te donnera du plaisir.)
* Choisis CE QU’IL te plaît. (= ce que tu voudras.)
Hanse considère que cette distinction (logique, selon Grevisse) est plus théorique que réelle.

c) ARRIVER
* Il s’était demandé CE QU’IL arriverait… (Zola)
* CE QU’IL lui était arrivé. (Anatole France)
* Elle ne comprend pas CE QU’IL lui arrive. (Aragon)
* Voyez CE QUI m’arrive. (Académie)
* Qu’est-CE QUI arrive ? (Jules Lemaître)
* QUOI QUI arrivât dans sa vie. (Montherlant)

d) RESTER accepte assez facilement les deux tours :
* Il sait CE QUI / CE QU’IL lui reste à faire.
* Toutes les démarches QUI me resteNT / QU’IL me reste à faire.
* CE QUI / QU’IL lui reste d’argent.

Citations de Grevisse :
* CE QU’IL restait de fromage. (A. Daudet)
* Tous les livres QU’IL me reste à lire. (Renard)
* Durant les trente années QU’IL lui restait à vivre. (Anatole France)
* CE QU’IL lui restait à faire. (Rolland)
* Tout CE QU’IL vous reste à découvrir. (Duhamel)
* C’est tout CE QU’IL restait de l’ancienne chapelle. (E. Henriot)

* Le peu d’argent QUI lui restait. (Stendhal)
* CE QUI me restait à tenter. (A. Daudet)
* Le peu n’énergie QUI lui reste. (R. Martin du Gard)
* Le peu d’heures QUI me resteNT à vivre. (Benda)
* CE QUI lui reste de sainteté. (Maurois)
* Le peu de courage QUI lui reste. (Romains)

e) Grevisse cite également :
* Qui sait CE QUI peut advenir… ? (Musset)
* Voici CE QU’IL advint. (E. Henriot)

* Il en arrivera CE QUI pourra. (Nodier)
* Arrivera CE QU’IL pourra. (Duhamel)

* Je ne saurais dire CE QUI se passait en moi. (Académie)
* CE QU’IL se passa, je l’ignore. (E. Henriot)

* Qu’est-CE QU’IL vous prend ? (Ramuz et Ionesco)
* Qu’est-CE QU’IL leur prend ? (Chamson)
* Qu’est-CE QUI lui a pris. (Aymé)
* Qu’est-CE QUI te prend ? (Ramuz)
* Qu’est-CE QUI vous prend. (Ionesco)
* Nous ne savons pas CE QUI lui a pris. (Sarraute)

* CE QU’IL résultait d’un entretien si important. (Boylesve)
* Elle dit CE QU’IL convenait. (Romains)
* L’État cache CE QU’IL en est du sexe… (Foucault)

f) Grevisse considère comme irréguliers :
* […] apprendre à Jacques CE QUI importait qu’il sût. (Radiguet) -> CE QU’IL importait…
* J’imagine qu’elle connaît CE QUI lui est certainement impossible de connaître. (Queneau) -> CE QU’IL lui est…

CONCLUSION
Personnellement, je préfère QUI, chaque fois que c’est possible.
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#6
Toute cette belle érudition pour en finir avec "les deux réponses sont bonnes". ^_^
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