[m-yaz 2017] Louna Véga sur la fréquence radieuse (Sukumvit)
#3
On retrouve avec plaisir l'imagination débridée de Sukumvit, ses délires parfois difficiles à suivre mais bien plus cadrés que dans les AVH d'autrefois. J'ai bien aimé celle-ci. Je ne saurais dire si à terme je la préférerai ou non au Dome Egloïde ou au 2ème Monde. Pas sûr car les robots et celles d'épouvante avaient un aspect jeu plus satisfaisant, même si celle-ci est plus profonde.

J'étais prévenu mais en effet, l'aventure est ultra-linéaire. En deux lectures je pense avoir lu presque tous les paragraphes.
Le problème principal de ces recyclages de romans ou nouvelles en AVH ne réside pas tant dans la structure en elle-même. Après tout, si l'aventure est facile, que le scénario et le style sont plaisants, je peux apprécier un LDVELH très linéaire comme j'apprécie certains Loup Solitaire du 3ème ou 4ème cycle. Mais systématiquement, les récits transformés pour devenir interactifs subissent des problèmes de rythme. J'avais ressenti la même gêne pour les Tambours de Shamanka.
Pour Louna Vega, je l'ai éprouvé beaucoup au début. Si l'introduction est saisissante, la suite avec l'héroïne dans le lit avec le prof, puis toute la partie préparatoire avant qu'elle se décide à aller au Transfert est molle, trop longue pour bien coller avec l'esprit d'une AVH. On est censé prendre les rênes du récit et on ne dispose au contraire que de quelques choix sans conséquences au terme de longs paragraphes où les sensations et sentiments sont décrits de manière redondante.
L'écriture d'une AVH est parfois frustrante car on sait qu'on pourra difficilement avoir la place d'approfondir les personnages comme dans un roman, de décrire avec soin sur la longueur les paysages traversés. Il faut condenser pour maintenir une pression, savoir aller à l'essentiel pour ne pas se perdre dans de multiples passages alternatifs qui, si chacun est trop long, va diluer l'intensité du récit ou décourager l'auteur quand il se rendra compte qu'il va devoir écrire un pavé afin de maintenir jusqu'à la fin la patte "romanesque". Mais d'un autre côté, ce travail de synthèse est ce qui donne l'âme de la littérature interactive. Après tout, ce n'est pas pour rien si le résumé de texte est une épreuve essentielle dans bien des concours.

Trêve de digression, ce défaut est ce qui m'a le moins plu mais pour le reste, l'aventure est mémorable. Surtout que cette histoire de rythme disparaît dès qu'on entre dans le bar de nuit. A partir de là, je me suis vraiment mis dans la peau de l'héroïne et dans cette histoire de hantise familiale.

Les dialogues sont bien sentis, les tourments intérieurs de l'héroïne, même s'ils ne sont pas toujours évidents à saisir en raison de leur complexité et décrits de manière poétique, sont émouvants. J'ai surtout aimé tout l'aspect "différente des autres", anti-sociale, en marge du courant. Ces pensées sonnent tellement justes que je les soupçonne être rattachées directement à la sensibilité profonde de l'auteur. ^^ En tout cas, j'y ai trouvé une forme de sincérité tout sauf artificielle.
L'histoire aussi est forte. Bien barrée quand même avec un luxe de détails qui pourraient parfois être supprimés afin de rester concentré sur l'essentiel, déjà bien riche. Je pense aux golems qui ne sont guère importants. Le fait qu'il y ait deux "méchants". Les gens qui bossent et vivent dans les étages avec les bureaux semi-désaffectés au-dessus de la boîte de nuit, ça aussi ça relève un peu du délire. Du Sukumvit, quoi!

J'ai apprécié aussi le ton réaliste de l'aventure dès qu'on reste en dehors de ces visions outre-mort et outre-espace. La scène des toilettes est très bonne par exemple, c'est là que j'ai commis d'ailleurs mon seul mauvais choix, sans doute à cause de la pression.
D'ailleurs, l'aventure est loin d'être difficile. Deux essais pour en voir la fin, ça va! Oui c'est un OTP mais comme la linéarité est très forte, ça compense. Surtout, les choix à faire sont intuitifs. La partie enquête est sympa d'ailleurs quand on peut visiter quand on veut (ou plutôt comme il faut) différents lieux de l'immeuble. Ce n'est pas un OTP frustrant mais plutôt valorisant.

Enfin, l'aventure est présentée sous le cadre de la folie et à ce titre, déconseillée aux moins de seize ans. Je n'ai pas retrouvé cette démence, cette déviation de l'esprit. Moins que dans le 2ème Monde en tout cas. Oui le "méchant" est fou dans un sens. Mais on suit surtout les pensées de l'héroïne qui sont finalement d'une très grande cohérence malgré les épreuves endurées, l'improbabilité de la situation et son excentricité. La limite d'âge se mérite mais seulement en raison du sexe et de la violence qui ne sont pas édulcorés.

En conclusion, l'énorme originalité de cette AVH n'est même plus surprenante venant d'un esprit aussi fécond que celui de son auteur. Mais la forte connotation émotionnelle y rajoute un fil conducteur qui permet de mieux y retrouver son chemin ; et surtout, de ressentir quelque chose en plus. Allez, peut-être qu'avec le temps je me dirai que c'est mon AVH préférée de Sukumvit, ce n'est pas impossible. Smile
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RE: Louna Véga sur la fréquence radieuse (Sukumvit) - par Fitz - 27/06/2017, 18:51



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