[32] Les Esclaves de l'Eternité (Paul Mason et Steve Williams)
#15
Avant les Mercenaires du Levant, voici un nouveau livre de Paul Mason (mais écrit conjointement avec un certain Steve Williams) qui se démarque là encore par son scénario bien supérieur à la moyenne des LDVELH mais une fois de plus à la jouabilité discutable.
Le cadre ne se situe pas dans les îles du Levant mais le royaume de Kallamère ne semble guère avoir sa place sur Titan : pas d'orcs, d'elfes ou de nains, pas d'évocation des lieux extérieurs célèbres à la série Défis Fantastiques, les humains ont une apparence et des vêtements plutôt arabisants... Bref, l'auteur instaure une ambiance qui lui est propre et qui n'a rien à voir avec les autres LDVELH plus classiques de cet univers. Les aficionados du monde créé par Livingstone et Jackson risquent à ce titre d'être déçus tant ce LDVELH ne semble pas y avoir sa place.
Le début est un peu déroutant : on joue un aventurier lambda recruté avec d'autres spadassins par les dirigeants de la capitale pour affronter une menace inconnue. On sent une certaine approche politique de Kallamère mais sans avoir voix au chapitre dans un premier temps. Puis le premier paragraphe s'achève par trois choix antagonistes qui laissent à penser que l'on va bénéficier d'une incroyable liberté d'action au cours de cette aventure (partir à des dizaines de kilomètres au nord, à des dizaines de kilomètres à l'est ou rester dans la ville). C'est un peu à l'image globale de ce livre-jeu : le scénario est très linéaire mais on ne s'en rend compte qu'après l'avoir terminé puisqu'il s'agit d'un presque one-true-path déguisé. On dispose à plusieurs moments de choix cruciaux qui nous font voyager sur de longues distances et dans des directions très diverses mais il n'existe quasiment qu'un seul bon itinéraire. C'est là la principale difficulté de cette aventure plutôt ardue (même si une Habileté minimale de 10 est exigée) d'autant plus que ce bon chemin n'est pas intuitif du tout, il va à l'encontre de ce que font la plupart des aventuriers dans les autres LDVELH. Déroutant, tout simplement.
A elle seule, l'histoire racontée est excellente et pourrait la classer dans le haut du panier. On va de surprise en surprise, les rebondissements sont nombreux à l'image d'un roman. Les péripéties en chemin sont de surcroît originales, toujours en dehors des sentiers battus. Malheureusement, le tout n'est pas servi par un style littéraire assez efficace. Non pas qu'il aurait fallu des descriptions plus soignées ou des tournures de phrase nécessairement plus recherchées. Après tout, les paragraphes sont assez longs dans leur majorité. Mais les auteurs ont placé un tas d'évènements sans lien concret avec le scénario (ou alors un lien alambiqué) qui plongent le lecteur dans la confusion alors que le but était sûrement de distiller une aura de mystère. L'intention est louable, l'imagination débordante mais le procédé maladroit. L'ensemble manque d'enchaînements rigoureux dans les rouages du scénario et l'on a surtout l'impression par moments d'avoir loupé un épisode ou de subir un Deux ex Machina. Pour les connaisseurs, je pense entre autres au Bouffon, aux prêtres recherchant le Poing d'Or, au retour de Ramédès, au conflit entre les cocomoas et les hurkons, à l'ombre volante qui nous traque dans l'auberge... Autant de passages fort intéressants qui tombent comme des cheveux sur la soupe ou qui auraient gagné à être épaissis ou bien mieux insérés dans l'histoire. Mais au final, ils m'ont posé problème, ont mis le doute dans mon esprit alors que le scénario initial est suffisamment intrigant à lui seul.
Mais je n'en parle pas trop pour ne pas dévoiler l'intrigue, l'histoire est pleine d'excellents passages qui demandent réflexion au lecteur en ne cessant de le surprendre. Les PFA sont superbes. J'ai en particulier adoré les deux derniers, y compris le 400 qui fait partie des plus sensibles, des plus originaux et des plus amers de toute la galaxie des LDVELH.
Le temps écoulé est sinon une bonne idée, bien gérée et pas oubliée au fil du récit. C'est juste dommage qu'on meurt très souvent bien avant qu'il n'ait une véritable importance.
Il ne faut donc pas se laisser rebuter par la difficulté de ce LDVELH assez piégeux même si le OTP n'est pas aussi indigeste que certains Livingstone. En s'accrochant et en prenant des décisions inhabituelles, on découvre un scénario à tiroirs rudement bien ficelé et vraiment étonnant.

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RE: [DF] Les Esclaves de l'Eternité (Paul Mason et Steve Williams) - par Fitz - 05/12/2011, 21:57



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