Les Aï
#1
(NB : Aï est un autre nom du paresseux.)

Le monastère Aï

Au milieu de la forêt des Bois Dormants (mais pas trop loin de Holmglande, la capitale quand même, parce que les longs trajets c'est fatiguant), dans un calme paisible propice à la sieste, se trouve le monastère Aï. C'est un beau bâtiment de pierre brute, construit non pas par les moines, mais par le peuple. L'ordre des Aï a été créé par le grand Dodo du Sommeil voilà des siècles pour protéger le Sommeilund des attaques des machiavéliques hordes des ténèbres de Traavaail. Jusqu'en 2736 après la création de l'Oreiller de Lune, l'ordre était mixte, mais jalouses de la maîtrise surhumaine des moines pour la Surdité Sélective, les moniales se sont révoltées. Le monastère a été dévasté, les moines n'ayant pas réagi (par pure galanterie). La légende raconte que la vaisselle n'a plus jamais été faite depuis ce jour.

Vous êtes Glandeur Solitaire, un jeune moine fraîchement attaché au monastère. En temps que nouvelle recrue, vous êtes censé faire la vaisselle accumulée de trois siècles, enlever les cinq centimètres de poussière qui recouvrent tous les sols du monastère (dix dans la salle d'entraînement), faire la cuisine (ça fait plus de soixante-dix ans que les moines se nourrissent uniquement de céréales), chasser (mais le lapin court trop vite), faire la lessive (les grades Aï se distinguant au nombre de taches de graisse sur les uniformes), sans parler des tâches secondaires comme étudier, prier Aï, s'entraîner au combat... Vous vous êtes néanmoins vite habitué à la vie du monastère, et dorénavant, vous passez votre temps entre l'un des cent trente-deux dortoirs et l'herbe moelleuse du dehors, en harmonie avec vos amis les rats et les cafards.

Un jour où vous étiez de corvée de bois, vous vous êtes tranquillement endormi dans une clairière. Jusque là, rien d'anormal. Mais à votre réveil, vous avez constaté, impuissant, que les redoutables hordes de Traavaail menaient un assaut aérien terrible contre le monastère. Pris par surprise dans leur sommeil, les moines furent impitoyablement capturés et réduits en esclavage. Le terrible Traavaail voulait les obliger à travailler pour lui, et tous les moins moururent du choc traumatique à ce moment. Quand les légions repartirent, vous avez découvert l'horrible vérité : vous êtes le seul survivant. Les troupes de Traavaail se dirigent maintenant vers la capitale. Une seule arme peut encore détruire leur chef et ainsi vaincre cette armée (car sans patron, les soldats seront vite vaincus par la force de la glandouille). Cette arme, c'est le Glaive de Sommeil ! (double dégât contre les dors-vivants) Et c'est à vous d'aller le chercher au Duredort !

Disciplines Aï

Vos années de non-entraînement au monastère Aï ont été longues et faciles, et vous ont permis d'acquérir la maîtrise de cinq des disciplines présentées ci-dessous. Choisissez bien, car s'il est peu probable que l'une d'elle puisse un jour vous sauver la vie, elles vous la rendront sans doute bien plus facile.

Maîtrise du Temps : le Moine part toujours à la bourre et arrive toujours miraculeusement à l'heure.

Déconnexion mentale : le Moine peut dormir éveillé devant un spectacle inintéressant. Si le Maître a suivi ou suit des cours de philosophie, cette capacité est deux fois plus puissante.

Art de ne rien faire : le Moine trouve toujours quelque chose d'inutile à faire plutôt que de bosser. Ce pouvoir est proportionnel à l'importance du travail qu'on attend du Moine.

Connaissance de l'Inutile : plus le renseignement est inutile, plus il s'imprime facilement dans la mémoire du Moine. À l'inverse, ce que le Moine doit absolument retenir lui rentre dans une oreille et ressort par l'autre.

Non-maîtrise des armes : la seule personne que le Moine risque de blesser en combat est lui-même.

Perdition : le Moine est incapable de retrouver son chemin, même s'il possède une carte très précise. Cette capacité est décuplée quand il doit se rendre à un endroit important (son centre d'examens par exemple).

Inspiration divine : le Moine trouvera toujours une bonne excuse à sortir à ses proches (parents/femmes) qui expliquera pourquoi il n'a rien foutu de la journée. Au fur et à mesure que le Moine monte dans les grades Aï, ses excuses sont de plus en plus crédibles.

Intuition Suprême : le Moine devine toujours quand on lui demandera de faire tel ou tel travail, et s'arrangera pour être absent à ce moment-là.

Surdité Sélective : le Moine perd temporairement trois points d'acuité auditive à chaque fois qu'on lui demande de faire quelque chose. De la même façon, le Moine peut devenir aveugle à volonté si on a noté les tâches qu'il avait à faire par écrit. Cette capacité devient de plus en plus puissante au fur et à mesure que le Moine monte dans les grades Aï.

Absence de Responsabilités : l'inactivité du Moine Aï s'étend à des domaines aussi importants que le paiement de ses impôts, le rangement de ses appartements et les révisions de ses cours. Plus une chose est importante et plus faible sera sa motivation pour l'accomplir. Inversement, le Grand Maître pourra s'abrutir pendant des heures dans la contemplation d'un détail futile.

Rangs Aï

1. Bonne à tout faire
2. Glandeur novice
3. Apprenti glandeur
4. Disciple glandeur
5. Glandeur initié (c'est votre rang au début du première livre, Flight from the Work)
6. Aspirant glandeur
7. Gardien du repos
8. Compagnon de sommeil
9. Savant paresseux
10. Maître Aï

Si vous terminez avec succès ce livre, vous commencerez le prochain livre (intitulé Fire the Worker) avec le rang d'Aspirant glandeur.

by Skarn and Dudur
Répondre
#2
Ca me fait toujours autant marrer. On en redemande. Bravo à Skarn et Meneldur. Big GrinMrgreen
Debout, debout cavaliers de Théoden!
Les lances seront secouées, les boucliers voleront en éclat,
Une journée de l'épée, une journée rouge avant que le soleil ne se lève !
Au galop ! au galop ! courez ! Courez à la ruine et à la fin du monde !
Répondre
#3
Skarn et Meneldur, je vous adore.

Vous venez de me faire réaliser que je suis, au minimum, un Grand Maître Aï.
Répondre
#4
j'aurais voulu mettre un commentaire intelligent, mais je me marre encore. Pour le Aï !
"Je chercherai à retrouver un rêve..."
Répondre
#5
c'est du grand art, franchement il faudrait en faire un ldvelh parodique, la base est excellente !
Répondre
#6
Dans la même veine, jetez un coup d'oeil ici :
http://homepage.mac.com/siyanlis/LS/Giak.htm
Les anglophones aussi ont des idées bizarres quand vient le temps de parodier Loup Solitaire. ^_^
Répondre
#7
Génial, le Glok Solitaire… ^^

Doit bien y avoir moyen de lui faire croiser Glandeur Solitaire au cours de ses pérégrinations ? Ils feraient une sacré paire, tous les deux. ^^

Jehan.
Répondre
#8
Magnifique !
Je pense me situer au niveau 9, ne maîtrisant pas la Maîtrise du temps
Vivement la suite !
Segna, adepte de Slangg...
[Image: vampire_icone.png] La Traboule de Segna
Répondre
#9
Je savais bien qu'un jour on pourrait m'appeler maître! Smile
Super, vivement l'AVH!
[Image: litteraction5.png]Littéraction.fr
Le site de livres-jeux dont VOUS êtes l'auteur !
Répondre
#10
Voilà de quoi connaître un peu mieux nos amis les Aï.

L'histoire du Sommeilund

En guise de prologue, quelques notions de géographie

Le Sommeilund, patrie du flegme et de l'économie de moyens, se situe au nord-est du Magnaglande, dangereusement près des terres soumises au terrible Travaï. Sur la frontière opposée se trouve leurs anciens alliés du Duredort. Pour le reste, le Sommeilund est bloqué entre la mer calme au nord et le désert tranquille de la Vassacoolie au sud.

Chapitre 1 : la guerre des Trois

En 1078 après la création de l'oreiller de lune, les terrifiantes armées du vil Travaï, frère maudit du bon dieu Aï, traversèrent la mince chaîne de montagne qui les séparaient des nations libres du Sommeilund et du Duredort. Les deux pays s'allièrent alors pour combattre l'envahisseur, et c'est ainsi que débuta la légendaire guerre des Trois.
Un temps ralenti en territoire sommeilundois (plus par les forêts que par ses habitants par ailleurs), les troupes des ténèbres se massèrent cependant vite autour de la capitale. Les moines Aï sortirent alors légèrement de leur torpeur pour aller prêter main forte aux Duredoriens. Guidé par Aigle de Sommeil, les Aï réussirent tant et si bien à bloquer la voie aux envahisseurs par leur absence de totale de peur et de réactivité que les terribles ennemis durent lâcher la Bête : une créature qui jamais ne mange, ne boit, ne fornique ou ne dort ! Un démon tout entier dévoué au travail, qui massacra sauvagement plusieurs milliers d'Aï. N'étant cependant pas infatigable, il s'arrêta quelques instants pour souffler. Les Duredoriens construirent alors quatre murs de pierre autour de lui pour l'emprisonner. Les sbires de Travaï, effrayés par l'inertie des moines Aï, décidèrent d'abandonner le combat, et se replièrent dans leurs contrées chaudes et énergiques. Les Duredoriens, malgré leur sentiment d'avoir tout fait, signèrent un traité avec le Sommeilund. Ce dernier devait leur apporter protection, en échange de quoi ils construiraient pour eux un monastère. Le pacte fut confirmé par l'échange des trésors nationaux, le sceau doré du Duredort contre le glaive de Sommeil du Sommeilund. Le monastère fut quant à lui construit autour de la prison de la bête, qui repose aujourd'hui encore dans ses caves.
Il est à noter cependant que moins de 2 siècles après ces événements, les Duredoriens décidèrent de renier ce pacte, ce qui se traduisit par un nouvel échange des trésors en sens inverse. La légende prétend qu'on découvrit à cette occasion que le sceau n'était que fer mal peint, car il était dorénavant recouvert d'une couche non négligeable de rouille. Les Duredoriens s'enfermèrent ensuite dans leurs montagnes pour ne plus être dérangés.

Chapitre 2 : le Sommeilund après la guerre des Trois

Après la guerre des Trois, les Sommeilundois, légèrement contaminés par l'envie de travailler de leurs adversaires, ainsi que par la paresse un peu moindre des Duredoriens, décidèrent de se munir d'un roi. Mais comment le choisir ? Tirage au sort, élections, désignation, toutes ces choses étaient trop éreintantes pour les pauvres Sommeilundois, et du reste, aucun ne voulait de cette charge écrasante de travail sur les épaules. Finalement, ce fut un aventurier étranger qui s'empara du trône, sans rencontrer aucune résistance. Ainsi naquit la dynastie royale du Sommeilund, qui au fil des années devait se rallier au bon sens de son peuple. Vers la même époque, Aigle du Sommeil fonda le Monastère Aï autour de la prison de la Bête.

Le travail est certes nécessaire, mais au Sommeilund, il est limité à sa plus simple expression : ainsi, vous ne croiserez jamais de marchand, de diplomate, d'écrivain ou de voyageur sommeilundois. Les travailleurs essentiels à la marche (lente) du pays sont en fait tirés au sort dans la population du pays, moment que tous craignent fortement, sauf les Aï, qui en sont exemptés (ce qui explique la forte envie de tous les Sommeilundois d'entrer dans l'ordre). Cependant, beaucoup de professions qu'on pourrait croire essentielles à la bonne marche d'un pays sont purement et simplement absentes dans le pays, sans que cela cause pour autant des problèmes. Citons le cas des éboueurs. Entrés en grève il y a huit cent quarante-trois années de cela, leurs revendications (ne plus travailler qu'une fois par an) n'ont toujours pas été satisfaites, si bien que le Sommeilund est autant réputé pour la paresse de ses habitants que pour l'odeur assez pittoresque de ses villes*. La sélection naturelle aidant, les Sommeilundois n'ont plus d'odorat depuis lors. Cet incident n'a pas été sans conséquences sur la politique extérieure du royaume. Au début, les Royaumes de Travail se contentèrent de payer un tribut au Sommeilund pour que ses habitants ne traversent pas la frontière, mais en 1841, ils ont décidé (le vote fut unanime) de déménager leur royaume à l'autre bout du continent. De la même façon, tous les anciens alliés du Sommeilund ont rompu leurs relations diplomatiques avec le royaume.

*Dans tout le Magnaglande, on surnomme le Sommeilund « le truc qui pue là ».

Chapitre 3 : le Glaive de Sommeil

Le légendaire Glaive de Sommeil fut forgé il y a de cela des âges incomptables pour quelqu'un dont la paresse égale celle des Aï. Ce furent des serviteurs d'Aï qui furent chargés de cette pénible tâche, un peuple dont l'abnégation et le courage sont sans égaux, puisqu'ils durent travailler pour ce faire. Aï envoya ensuite le Glaive à Aigle du Sommeil, son champion flegmatique sur le Magnaglande, à charge pour lui de l'employer pour propager sur les terres de ce monde la bonne parole d'Aï.

La principale particularité du Glaive est qu'il endort quiconque est touché par sa lame. Le problème est que cela fonctionne aussi pour la garde, la poignée et le pommeau, ce qui en fait une arme périlleuse à manier au combat, mais excellente en cas d'insomnie. Si quelqu'un parvient à l'utiliser pour combattre (en mettant des gants triple épaisseur par exemple), il offre un bonus d'Incapacité et double les dégâts infligés aux dors-vivants, ces malheureux que Travaï ne cesse de réveiller de leur sommeil millénaire pour les embaucher dans ses usines infâmes.

Enfin, nous avons trouvé cette courte chronique, qui serait dit-on l'introduction d'une "avéhache".

Enfin vous y êtes. Tant d'années d'humiliations, d'efforts, de solitude, de travail même, pour en arriver là : vous êtes admis au monastère Aï. Levant les yeux vers la bâtisse croulante qui sera votre nouvelle demeure, vous laissez un sourire de satisfaction passer sur vos lèvres. Vous tenez enfin votre vengeance !
Dans le passé, vous vous appeliez Gat, René Gat, fils de Lin Grat. Alors que vous n'aviez que 4 ans, votre père a été tiré au sort pour travailler ! Pire que tout, il a reçu un travail long, dur et fatigant. L'homme a bientôt commencé à sombrer, et toute votre famille en a pâti. Après sa mort il y a une dizaine d'années (la date étant imprécise, les Aï s'occupant de tenir les comptes), vous vous êtes juré de vous venger en éliminant ce système injuste. Vous avez vite compris que si votre père est mort, c'est entièrement par la faute des moines Aï, que ce fameux système permet d'alimenter et de faire vivre. En éliminant les Aï, vous sauverez le Sommeilund. Bien sûr, vous avez peu d'appui, la population étant entièrement vendue à ces cloportes, et les puissants trop occupés à comploter pour diminuer leur charge de travail. Vous avez donc décidé d'agir seul, travaillant dur pour acquérir la maîtrise du non-agir que la plupart des Aï possèdent naturellement. Après de multiples années de renoncement, vous avez réussi avec brio l'examen de paresse indispensable pour entrer au monastère. Enfin, votre plan diabolique va pouvoir débuter. Votre but est simple : aider les forces de Travaï à anéantir le monastère. Pour cela, vous devez d'abord les convaincre qu'ils n'ont plus rien à craindre des Aï. Il vous faudra donc vous emparer des plans du monastère, pour mettre en évidence ses multiples faiblesses, ainsi que de ses clés pour faciliter encore un peu plus la tâche à vos futurs alliés. Le deuxième point étant par ailleurs purement psychologique, toutes les portes du monastère étant grandes ouvertes et claquant au vent. Plus personne ne semble ainsi être au courant de l'endroit où reposent ces deux objets. La dernière partie de votre plan est la plus risquée, mais aussi la plus concrète : voler les oreillers des Aï, particulièrement des grands maîtres, diminuant ainsi la qualité de leur sommeil et leur fabuleuse capacité d'inaction. Les troupes de Travaï n'auront alors plus qu'à cueillir les moines trop fatigués pour se défendre ! C'est presque en gambadant que vous franchissez les lourdes portes du monastère, tant votre satisfaction et votre détermination sont fortes.

Tous ces documents sont sujets à caution et seront éventuellement modifiés si nous découvrons que certaines vérités historiques ont été écorchées.
Fait en l'an de grâce 2006 par les sires Meneldur et Skarn
Répondre
#11
Excellent! dommage que le héros veuille faire couler ce système tellement parfait....
"Je chercherai à retrouver un rêve..."
Répondre
#12


* Japonais
o Principe d’union et d’harmonie qui règle toute activité physique et mentale. Aï engendre l'ordre et l'équilibre par le dosage harmonieux des forces complémentaires qui sont en présence. Ce principe réunit les tendances opposées qui constituent l’Univers, le macrocosme, jusqu'à la plus infime parcelle de matière, le microcosme, y compris l’être humain.
o La notion japonaise de Aï s’inscrit parfaitement dans le concept de Taiji ou (Taï Chi) du Tao chinois. Pour le pratiquant bouddhiste, taoïste, shintôïste, ou le simple amateur d'arts martiaux, la réalisation de Aï en tant que ligne de conduite ou que mode de vie n’est pas une fin en soi mais la condition nécessaire à toute intégration harmonieuse dans le monde, à toute plénitude de vie. La fonction première de Aï est de rassembler, de réunir, de reconcentrer tout ce qui est dispersé, séparé, désuni. Mettre en pratique Aï dans sa vie quotidienne apporte une vision globale et unitaire de l’être humain. La mise en pratique de Aï à chaque seconde de la vie quotidienne permet à l'homme de vivre en harmonie avec son semblable, de partager au même moment le même espace vital avec lui, tout en respectant l'individualité de chacun.

Bizarrement on est plus proche du Kaï que du Aï de Meneldur....
[Image: style7,WhiteRaven.png]
Répondre
#13
Je m'insurge Ravy, ta définition colle parfaitement avec les Aï. Il n'y pas plus fluide, plus harmonique, plus unificateur que Aï. Le Kaï n'est qu'une forme de vie violente, Aï est une philosophie suprême de non-agir.
Répondre
#14
Je passe mon temps à déterrer, mais c'est vraiment trop excellent !!
Au petit matin, le dernier des deux fois nés était deux fois mort...
Répondre
#15
Le premier post est difficile à lire, les apostrophes provoquent des soucis d'affichage.
Répondre




Utilisateur(s) parcourant ce sujet : 8 visiteur(s)