IFComp
#5
Il existe selon moi trois types de jeux à interpréteur :
  • Ceux qui tentent d'utiliser ce médium très contraignant pour faire des choses qu'il n'est pas possible de faire ailleurs.
  • Ceux qui auraient aussi bien pu être des livres-jeux numériques, mais sont suffisamment bien codés pour que la pilule passe encore.
  • Ceux qui te demandent de taper "LOOK UNDER" pour les finir alors que ce verbe (avec la préposition) n'est même pas défini dans la liste des verbes pris en compte dans l'aventure censés t'aider.

Je ne m'étendrai pas sur la dernière catégorie, je risquerais d'être grossier.

Je sais qu'il existe des objets narratifs intéressants rentrant dans la première catégorie. Ainsi, une conférence de FibreTigre évoque un jeu par interpréteur à une seule phrase, celle-ci pouvant être d'une grande complexité (tu commences par taper une commande basique, le jeu te répond, tu reviens au point de départ, tape une commande différente ou plus précise avec les informations supplémentaires grappillées, et tu boucles jusqu'à trouver LA phrase qui permet de gagner). J'aimerais d'ailleurs bien en retrouver le nom pour tenter l'expérience.

Rien d'aussi poussé ici, mais deux titres avec de bonnes idées :

Take est un jeu à interpréteur qui ne reconnaît qu'un seul verbe. Take. Tout ce que vous pouvez donc lui dire prendra donc la forme TAKE + un élément de la scène où vous êtes.

L'astuce, c'est que take a 55 sens différents en anglais. Ainsi, TAKE BOTTLE ne veut pas forcément dire que vous allez mettre une bouteille dans votre inventaire.

J'aime beaucoup l'idée, mais je ne peux conseiller le jeu qu'à des personnes disposant d'un excellent niveau d'anglais (supérieur au mien déjà). En effet, l'histoire utilise plusieurs niveaux de métaphores et des sens rares ou argotiques de certains mots, la rendant très dure à suivre pour quiconque ne baigne pas quotidiennement dans la langue de Mark Twain.

Mirror and Queen raconte une énième variation de l'histoire de Blanche Neige. L'idée qui rend cela intéressante est que notre seule source d'informations est le miroir magique du conte, à qui nous devons poser les bonnes questions pour obtenir des réponses dignes d'intérêt.

L'idée que le miroir ne soit pas forcément coopératif, donc réponde de manière biaisée aux questions peu claires est une bonne manière d'utiliser l'histoire pour cacher les faiblesses du support. Toutefois, le concept n'est pas poussé très loin, ce qui est assez dommage.

Passons maintenant aux ouvrages plus modernes (c'est-à-dire utilisant des technologies d'il y a 20 ans plutôt que 30...). Là aussi je vais faire des choix (pitié, j'ai dû écrire 57 reviews en anglais, j'en peux plus), et je ne vais pas donc pas forcément parler des meilleurs dans l'absolu (histoire, jeu, ambiance etc.), mais de ceux avec des idées de gameplay qui sortent de l'ordinaire.

Color the Truth est une enquête policière uniquement basée sur l'interrogation de suspects. L'idée est de commencer avec une série de sujets sur lesquels il est possible d'interroger les témoins (celui de départ étant simplement « racontez-moi ce qui s'est passé »), et que les réponses vont débloquer de nouveaux sujets qui pourront être utilisés face à tous les témoins (par exemple, si quelqu'un me parle d'une « voiture rouge », je pourrais demander à toutes et à tous s'ils ont remarqué une voiture rouge).

Une autre mécanique est la possibilité d'associer deux sujets pour en créer un troisième. Par exemple, si quelqu'un vous a dit qu'il a vu A enfiler un imperméable bleu (sujet « pluie ») et une autre personne vous dit qu'elle a croisé quelqu'un vêtue d'un imperméable bleu près du pont (sujet « pont »), vous pouvez en les associer pour débloquer un nouveau sujet (« A au pont »). Cela fonctionne de même pour mettre en lumière les contradictions.

Bref, une mécanique d'enquête vraiment très cool, qui donne du relief à une enquête un peu plan-plan par elle-même.

Letters est fondée sur l'idée de recomposer une histoire à partir d'une correspondance en vrac, recoupant des informations incomplètes jusqu'à reconstituer le puzzle. Idée sympa, mais mise en pratique assez ratée (on utilise des liens qui nous font sauter d'une lettre à l'autre sans réelle cohérence). Ironiquement, le système de l'aventure précédente aurait parfaitement convenu ici aussi.

Stuff and Nonsense est du steampunk en Australie à la veille de l'indépendance. La principale différence avec notre monde est la possibilité « d'éveiller » les métaux pour leur donner des pouvoirs, pouvoirs dépendant de la nature du métal (le fer augmente la force, l'or le charisme, l'aluminium l'agilité etc.).

Malheureusement, l'histoire est très confuse et ressemble surtout à un test simultané d'un tas de concepts. Vous ne verrez donc pas la Reine Victoria vêtue d'une armure d'or enchantée subjuguer les foules, ni des manœuvres politiques et militaires pour contrôler les mines et la diffusion des métaux (qui, certes, existe déjà fortement dans notre monde, mais je serais de la noblesse dans cet univers-là, je ne voudrais vraiment pas que l'argent de la connaissance tombe entre les mains de gens du peuple).

Et maintenant pour mes deux favoris :

16 Ways to Kill a Vampire at McDonalds raconte l'histoire de l'appât d'un groupe de chasseurs de vampires dans un monde à la Buffy. Vous êtes la jeune innocente de pacotille chargée d'attirer les vampires dans un coin où vos collègues pourront leur régler son compte sans qu'ils ne puissent s'échapper ou se défendre convenablement.

Ce soir, vous n'êtes pas de service, vous voulez juste manger un McDo en paix. Sauf que, évidemment, il y a un vampire dans ce McDo. Et vous n'allez pas le laisser boulotter la serveuse (ou vous-même) sans rien faire quand même ! À vous de vous débrouiller avec le matériel à votre disposition (des pailles, du papier toilette, du sel...) pour lui régler son compte.

Comme le titre l'indique, il y a 16 façons distinctes pour régler ce problème. C'est vachement bien fait, plein de cas de figures sont envisagés, et il y a un système d'indices plutôt malins à la fin pour aiguiller le joueur vers les possibilités non encore découvertes. Du fun en barre.

Cactus Blue Motel part du principe qu'il existe un motel magique quelque part dans le désert où le temps s'écoule différemment, où tout un chacun peut rester autant qu'il veut pour prendre une pause dans une vie en constant mouvement. Un peu comme dans le film le Jour de la marmotte, ce point de départ fantastique sert surtout à une exploration psychologique des différents personnages, entre ceux qui veulent s'arrêter là un peu, beaucoup, pas du tout. Le jeu est d'ailleurs aussi une exploration, du motel, avec des éléments supplémentaires au fur et à mesure des interactions (l'accès aux archives par exemple).
Répondre


Messages dans ce sujet
IFComp - par Skarn - 02/11/2016, 14:30
RE: IFComp - par Caïthness - 02/11/2016, 15:36
RE: IFComp - par Skarn - 03/11/2016, 13:55
RE: IFComp - par Skarn - 13/11/2016, 01:27
RE: IFComp - par Skarn - 13/11/2016, 13:22
RE: IFComp - par Outremer - 13/11/2016, 18:15
RE: IFComp - par Skarn - 18/11/2016, 15:04
RE: IFComp - par Skarn - 01/10/2017, 17:21
RE: IFComp - par Salla - 05/10/2017, 21:53



Utilisateur(s) parcourant ce sujet : 1 visiteur(s)