14/02/2012, 21:49
Même si je ne peux encore pas juger la série dans son ensemble, ce premier Chroniques Crétoises fait à mon sens partie du gratin des LDVELH, de ces livres-jeux accomplis, réussis et qui par leur ampleur, leur originalité et leur qualité sont quasiment incontournables. Un contexte unique (si
l'on excepte le très moyen Voyage d'Ulysse) avec la Grèce antique et sa célèbre mythologie le rend déjà à lui seul très intéressant, d'autant plus que les trois auteurs (original ça aussi) semblent bien connaître leur sujet. On y apprend une foule d'informations sur cette époque, ce pays et ses légendes, on y croise nombre de personnages et de créatures renommés, les rencontres sont des anecdotes et des épisodes tirés de cette mythologie et l'ambiance est fort bien rendue avec de jolies
descriptions du paysage, du climat et de la végétation qui nous transportent dans univers méditerranéen très agréable avec son soleil ardent, ses cigales, sa mer d'émeraude mais aussi ses collines couvertes de pinèdes, son architecture si caractéristique... C'est vraiment dépaysant et agréable que de se sentir évoluer dans un cadre aussi pittoresque et aussi merveilleux puisque on peut y rencontrer une divinité à chaque virage de la route. Le médiéval-fantastique que j'aime
tant ne m'a pas du tout manqué.
Le scénario n'est malheureusement pas à la hauteur de cette ambiance si réussie. Il s'agit d'un long voyage à travers toute la Grèce méridionale, on a vraiment l'impression de faire du tourisme et de
découvrir en étranger les coutumes de chaque cité que l'on visite. Il n'y a même pas d'objectif mineur à l'intérieur de l'histoire, chaque péripétie ne se déroule que sur une dizaine de paragraphes grand maximum ; les rencontres intéressantes sont nombreuses mais pas assez développées. On se rend d'un lieu à l'autre en tachant d'avoir la bonne attitude devant chaque évènement intrigant, on se contente de survivre, d'accumuler de nouvelles protections et des points d'honneur jusqu'à notre arrivée à Athènes. A la capitale, la recherche de notre père est déjà plus motivante puis on accomplit un nouveau voyage, maritime cette fois, jusqu'à la Crète. C'est tellement dommage que des aventures plus longues ne nous tiennent pas en haleine (comme la conspiration contre le roi de Thèbes), qu'il n'y ait pas plus de ressorts dramatiques ou qu'on n'ait pas de compagnon attachant par exemple. Il s'agit surtout d'une série d'épreuves souvent imposées par les dieux.
Les dieux justement, j'ai beaucoup aimé. Ils nous parlent, ils sont très "humains" puisqu'ils marchent parmi les hommes, ont une enveloppe physique mais surtout, une sensibilité et des faiblesses qui les rendent très proches de nous même si leurs pouvoirs sont infinis. Là encore il s'agit d'une caractéristique de la mythologie grecque qui est respectée par les auteurs. Le choix initial d'un dieu protecteur n'est pas primordial pour la réussite de notre quête mais donne une saveur différente à chaque tentative, ce qui est vraiment très appréciable. Aphrodite est ainsi sensuelle, aguicheuse et terriblement érotique même si nos contacts avec elle ne sont qu'à peine suggérés (malheureusement), mais aussi étourdie, complètement hédoniste et limite écervelée. Apollon est mystérieux, ne parle qu'en énigmes et transpire la sagesse, la paix, tandis que sa
capacité à nous faire consulter l'Oracle sans crainte donne le sentiment que nous-même avons une prescience divine. Athéna est la vierge guerrière mais prudente, a une élocution très particulière puisqu'elle parle en zézayant. On sent bien au cours de notre voyage qu'elle est la divinité la plus vénérée dans le pays, la protectrice de la Grèce et de sa capitale éponyme. Héra représente l'autorité à la fois sévère et maternelle quand elle nous parle, capable d'une affection gauche comme de remontrances sans concession. Sa jalousie légendaire envers les jolies femmes susceptibles de faire tourner la tête de son Zeus de mari n'est pas non plus oubliée. Arès est le guerrier dans toute sa
splendeur. Seul l'héroïsme compte pour lui et sa diction est très militaire : saccadée, en phrases directives n'excédant pas trois mots. Il semble dénué de tout sens de la psychologie et de l'empathie. Quant à Poséidon, il est cassant, bougon et désagréable, ne cessant de nous rabaisser en mettant en exergue les qualités de notre frère et de notre père tout en pointant le doigt sur nos propres points faibles. Les six divinités protectrices sont sans doute les personnages les plus intéressants et les mieux décrits du bouquin, une bonne idée.
Une moins bonne idée est l'Oracle. Les nombreux paragraphes en italique permettent de se rendre à de nouveaux paragraphes mais sans renvoi direct, il faut penser à ajouter 20 au paragraphe en cours. Il s'agit d'un appel à un certain sixième sens. Cependant, cette aide est très aléatoire : trois fois sur quatre ce sera une alternative malheureuse et coûteuse en points d'honneur et/ou de honte et il est impossible de deviner à l'avance s'il faut l'utiliser, seuls les échecs permettent d'acquérir de l'expérience en la matière. Bref, cet Oracle n'est pas très satisfaisant d'un point de vue ludique mais également pour le récit, ça a cependant le mérite de l'originalité.
Les notions d'honneur et de honte sont par contre plus intéressantes, génératrices de stress puisqu'on risque le suicide, de choix tactiques supplémentaires dans les combats et d'une manière générale, sont gratifiantes pour le joueur à la manière de points d'expérience. Enfin le système de combats est novateur et finalement bien plus réussi que dans mon souvenir. Les rixes se résolvent en quelques lancers de dés, sans calcul alambiqué et sont souvent très risquées puisqu'on peut perdre en trois touches. Simplicité, rapidité et dangerosité : trois attributs positifs pour l'action dans les LDVELH. Bien sûr, le système fait la part belle à l'aléatoire, surtout en début de quête alors qu'on est sous-équipé. Mais plus on avance, plus on trouve des pièces d'armure et des armes performantes qui nous distinguent peu à peu des adversaires communs. Au début, on peut se faire tuer par le moindre loup ou bandit mais vers la fin, avec une bonne épée, un casque, un bouclier et un plastron, on devient bien plus difficile à battre. Cette gestion de l'armement est assez satisfaisante, d'autant plus que l'on peut dépouiller nos adversaires et à l'inverse, en perdre en cas de reddition. Un point négatif à ce propos : on nous propose toujours de nous rendre, de fuir ou d'invoquer Zeus en cas de défaite mais ces options sont souvent synonymes de défaites à plus ou moins long terme vu ce qu'on y perd en honneur, honte et armement.
Donc j'ai apprécié le jeu dans ce premier épisode de la trilogie. Juste dommage qu'il soit trop facile à mon goût. J'ai terminé à ma 4ème lecture alors que le livre fait plus de 600 paragraphes. Comme les routes sont plutôt diversifiées et que les différents protecteurs sont intéressants, j'aurais bien aimé une peu plus de challenge, ça ne m'aurait pas dérangé du tout de tester les deux dernières divinités. Pour l'anecdote, j'ai gagné avec Athéna. Chaque protecteur est intéressant car ils sont utilisés tous régulièrement ou proposent des capacités utiles. Le point de protection supplémentaire de la déesse guerrière est quand même bien sympa tout comme le fait d'éviter des pertes de points d'honneur avec l'Oracle. J'ai bien aimé ma première mort où je me suis suicidé de honte après une partouze éthylique avec des dryades et des satyres (ça m'a fait pensé à Interlude Sylvain). Trop utiliser l'Oracle à mauvais escient est très dommageable car je suis à nouveau tombé sur ma propre lame dans la maison de mon père. Enfin, le colosse de bronze final m'a terrassé avant que je ne parvienne en Crète.
La structure de l'aventure est bien également. Peu de linéarité, la possibilité de visiter des villes différentes en empruntant divers chemins qui génèrent des rencontres variées est toujours satisfaisante dans le cadre d'un LDVELH. Cela m'a fortement fait penser à la Vengeance du Ninja dans sa forme : quête longue quel que soit le chemin emprunté, passages obligés intéressants, rencontres diverses, possibilités de relecture grâce aux différents protecteurs / compétences de ninja... J'adhère complètement à ce schéma.
Vraiment dommage que le scénario ne soit pas plus dense, plus surprenant et étayé par des rencontres plus marquantes car il s'agit sinon d'un bon LDVELH doté en plus d'un style de haute volée. Sur ce dernier point, la seule chose qui m'ait gêné est une abondance de métaphores et de
comparaisons dans l'exercice descriptif ("tel le lion triomphant qui...." ; "de la même manière que le ciel s'empourpre..." etc...).
Sinon, c'est vraiment agréable à lire en plus d'être sympathique à jouer.
l'on excepte le très moyen Voyage d'Ulysse) avec la Grèce antique et sa célèbre mythologie le rend déjà à lui seul très intéressant, d'autant plus que les trois auteurs (original ça aussi) semblent bien connaître leur sujet. On y apprend une foule d'informations sur cette époque, ce pays et ses légendes, on y croise nombre de personnages et de créatures renommés, les rencontres sont des anecdotes et des épisodes tirés de cette mythologie et l'ambiance est fort bien rendue avec de jolies
descriptions du paysage, du climat et de la végétation qui nous transportent dans univers méditerranéen très agréable avec son soleil ardent, ses cigales, sa mer d'émeraude mais aussi ses collines couvertes de pinèdes, son architecture si caractéristique... C'est vraiment dépaysant et agréable que de se sentir évoluer dans un cadre aussi pittoresque et aussi merveilleux puisque on peut y rencontrer une divinité à chaque virage de la route. Le médiéval-fantastique que j'aime
tant ne m'a pas du tout manqué.
Le scénario n'est malheureusement pas à la hauteur de cette ambiance si réussie. Il s'agit d'un long voyage à travers toute la Grèce méridionale, on a vraiment l'impression de faire du tourisme et de
découvrir en étranger les coutumes de chaque cité que l'on visite. Il n'y a même pas d'objectif mineur à l'intérieur de l'histoire, chaque péripétie ne se déroule que sur une dizaine de paragraphes grand maximum ; les rencontres intéressantes sont nombreuses mais pas assez développées. On se rend d'un lieu à l'autre en tachant d'avoir la bonne attitude devant chaque évènement intrigant, on se contente de survivre, d'accumuler de nouvelles protections et des points d'honneur jusqu'à notre arrivée à Athènes. A la capitale, la recherche de notre père est déjà plus motivante puis on accomplit un nouveau voyage, maritime cette fois, jusqu'à la Crète. C'est tellement dommage que des aventures plus longues ne nous tiennent pas en haleine (comme la conspiration contre le roi de Thèbes), qu'il n'y ait pas plus de ressorts dramatiques ou qu'on n'ait pas de compagnon attachant par exemple. Il s'agit surtout d'une série d'épreuves souvent imposées par les dieux.
Les dieux justement, j'ai beaucoup aimé. Ils nous parlent, ils sont très "humains" puisqu'ils marchent parmi les hommes, ont une enveloppe physique mais surtout, une sensibilité et des faiblesses qui les rendent très proches de nous même si leurs pouvoirs sont infinis. Là encore il s'agit d'une caractéristique de la mythologie grecque qui est respectée par les auteurs. Le choix initial d'un dieu protecteur n'est pas primordial pour la réussite de notre quête mais donne une saveur différente à chaque tentative, ce qui est vraiment très appréciable. Aphrodite est ainsi sensuelle, aguicheuse et terriblement érotique même si nos contacts avec elle ne sont qu'à peine suggérés (malheureusement), mais aussi étourdie, complètement hédoniste et limite écervelée. Apollon est mystérieux, ne parle qu'en énigmes et transpire la sagesse, la paix, tandis que sa
capacité à nous faire consulter l'Oracle sans crainte donne le sentiment que nous-même avons une prescience divine. Athéna est la vierge guerrière mais prudente, a une élocution très particulière puisqu'elle parle en zézayant. On sent bien au cours de notre voyage qu'elle est la divinité la plus vénérée dans le pays, la protectrice de la Grèce et de sa capitale éponyme. Héra représente l'autorité à la fois sévère et maternelle quand elle nous parle, capable d'une affection gauche comme de remontrances sans concession. Sa jalousie légendaire envers les jolies femmes susceptibles de faire tourner la tête de son Zeus de mari n'est pas non plus oubliée. Arès est le guerrier dans toute sa
splendeur. Seul l'héroïsme compte pour lui et sa diction est très militaire : saccadée, en phrases directives n'excédant pas trois mots. Il semble dénué de tout sens de la psychologie et de l'empathie. Quant à Poséidon, il est cassant, bougon et désagréable, ne cessant de nous rabaisser en mettant en exergue les qualités de notre frère et de notre père tout en pointant le doigt sur nos propres points faibles. Les six divinités protectrices sont sans doute les personnages les plus intéressants et les mieux décrits du bouquin, une bonne idée.
Une moins bonne idée est l'Oracle. Les nombreux paragraphes en italique permettent de se rendre à de nouveaux paragraphes mais sans renvoi direct, il faut penser à ajouter 20 au paragraphe en cours. Il s'agit d'un appel à un certain sixième sens. Cependant, cette aide est très aléatoire : trois fois sur quatre ce sera une alternative malheureuse et coûteuse en points d'honneur et/ou de honte et il est impossible de deviner à l'avance s'il faut l'utiliser, seuls les échecs permettent d'acquérir de l'expérience en la matière. Bref, cet Oracle n'est pas très satisfaisant d'un point de vue ludique mais également pour le récit, ça a cependant le mérite de l'originalité.
Les notions d'honneur et de honte sont par contre plus intéressantes, génératrices de stress puisqu'on risque le suicide, de choix tactiques supplémentaires dans les combats et d'une manière générale, sont gratifiantes pour le joueur à la manière de points d'expérience. Enfin le système de combats est novateur et finalement bien plus réussi que dans mon souvenir. Les rixes se résolvent en quelques lancers de dés, sans calcul alambiqué et sont souvent très risquées puisqu'on peut perdre en trois touches. Simplicité, rapidité et dangerosité : trois attributs positifs pour l'action dans les LDVELH. Bien sûr, le système fait la part belle à l'aléatoire, surtout en début de quête alors qu'on est sous-équipé. Mais plus on avance, plus on trouve des pièces d'armure et des armes performantes qui nous distinguent peu à peu des adversaires communs. Au début, on peut se faire tuer par le moindre loup ou bandit mais vers la fin, avec une bonne épée, un casque, un bouclier et un plastron, on devient bien plus difficile à battre. Cette gestion de l'armement est assez satisfaisante, d'autant plus que l'on peut dépouiller nos adversaires et à l'inverse, en perdre en cas de reddition. Un point négatif à ce propos : on nous propose toujours de nous rendre, de fuir ou d'invoquer Zeus en cas de défaite mais ces options sont souvent synonymes de défaites à plus ou moins long terme vu ce qu'on y perd en honneur, honte et armement.
Donc j'ai apprécié le jeu dans ce premier épisode de la trilogie. Juste dommage qu'il soit trop facile à mon goût. J'ai terminé à ma 4ème lecture alors que le livre fait plus de 600 paragraphes. Comme les routes sont plutôt diversifiées et que les différents protecteurs sont intéressants, j'aurais bien aimé une peu plus de challenge, ça ne m'aurait pas dérangé du tout de tester les deux dernières divinités. Pour l'anecdote, j'ai gagné avec Athéna. Chaque protecteur est intéressant car ils sont utilisés tous régulièrement ou proposent des capacités utiles. Le point de protection supplémentaire de la déesse guerrière est quand même bien sympa tout comme le fait d'éviter des pertes de points d'honneur avec l'Oracle. J'ai bien aimé ma première mort où je me suis suicidé de honte après une partouze éthylique avec des dryades et des satyres (ça m'a fait pensé à Interlude Sylvain). Trop utiliser l'Oracle à mauvais escient est très dommageable car je suis à nouveau tombé sur ma propre lame dans la maison de mon père. Enfin, le colosse de bronze final m'a terrassé avant que je ne parvienne en Crète.
La structure de l'aventure est bien également. Peu de linéarité, la possibilité de visiter des villes différentes en empruntant divers chemins qui génèrent des rencontres variées est toujours satisfaisante dans le cadre d'un LDVELH. Cela m'a fortement fait penser à la Vengeance du Ninja dans sa forme : quête longue quel que soit le chemin emprunté, passages obligés intéressants, rencontres diverses, possibilités de relecture grâce aux différents protecteurs / compétences de ninja... J'adhère complètement à ce schéma.
Vraiment dommage que le scénario ne soit pas plus dense, plus surprenant et étayé par des rencontres plus marquantes car il s'agit sinon d'un bon LDVELH doté en plus d'un style de haute volée. Sur ce dernier point, la seule chose qui m'ait gêné est une abondance de métaphores et de
comparaisons dans l'exercice descriptif ("tel le lion triomphant qui...." ; "de la même manière que le ciel s'empourpre..." etc...).
Sinon, c'est vraiment agréable à lire en plus d'être sympathique à jouer.