Je viens de relire en deux heures L'Horreur dans la Vallée. 379§ dont beaucoup utilisés par des combats ou épreuves scénarisés : ça bouffe de la place et donc l'aventure ne peut être que courte.
La COUVERTURE nous présente une sorte de Hulk amateur de puits de mine, il a pris Pioche en option à son Bac de monstre. Bref, pas la meilleure couverture que j'aie vue, trop horreur US série B. Quand j'ai ouvert le livre... Hum, auteurs : Ian & Clive Bailey, des frères ? Les cas de collaboration littéraire me rendent curieux, qui a écrit quoi ? A vérifier. En parlant de collaboration, les traducteurs sont deux aussi. Ils ont traduit "Pays de Galle" sans -s dans la 4ème de couv'. Champions !
Les REGLES, à présent. Hum, cinq caractéristiques, des règles qui se suivent et s'imbriquent de manière un peu foutraque : tout ça manque de clarté dans la présentation. Deux paragraphes distincts prétendent expliquer les règles du combat (page 13 et page 14), en fait l'un des deux explique plutôt des règles d'opposition brève genre bras-de-fer, le second aborde vraiment la question des combats dans le sens : duel. Mouais, à voir à l'usage.
L'INTRO. Dès la première page, on nous ambiance :
Purée, ça, ça claque, ça rachète ces règles foutraques ! Et puis ce nom de série : "Portes Interdites"... Il est des portes que les humains ne devraient pas franchir... Ça vend du rêve, enfin du cauchemar. J'aime.
On ne saura jamais si notre amie Charlie, ce digne savant, est l'inventeur des boîtes de Pétri (sans -e), d'un usage considérable en microbiologie et en cours de SVT. Cours de SVT où on gagnerait à lire L'Horreur dans la Vallée, au vu des planches quasi anatomiques dont nous gratifie l'illustrateur Jonathan Heap : du zombie explosé à la chevrotine, du bernacle à tentacules, du dinosaurien slash poulpe, un vrai festival des horreurs. L'encrage ne rend pas honneur à son travail, c'est dommage, travail par ailleurs inégal : comparez l'excellente illustration du 14 avec le ridicule rhinocéros à roulettes du 166.
[EDIT : les chap.47-48 du Pendule de Foucault d'Umberto Eco m'apprennent que Piazzi Smyth et Flinders Petrie sont deux illuminés. Ils ont mesuré les Pyramides d'Egypte et Stonehenge pour en tirer des conclusions mystiques. Les frères Bailey s'en sont apparemment inspirés pour créer le personnage de Charles Pétrie-Smith.]
Paragraphe 1 et suivants, jusqu'à la maison de Petrie-Smith. Epoque indéterminée, XXème siècle, mais l'absence de téléphone + la couverture du tome 2 = les années 30. Une vallée qu'on suppose galloise, dont le nom résonne dans le noir comme le coup d'une lame sacrificielle : Bryn Coedwig ! Une brume mystérieuse qui masque la lumière du jour, suspendue au-dessus des collines millénaires... un sentier à flanc de coteau, dominant une pente sinistre... ne manquerait que le croassement d'un corbeau, ou le craquement d'une brindille dans notre dos...
crac...
OMG ! Une brindille a craqué !!!
Insérez ici une scène de combat épique... Rampe hors des buissons un monstre végétal dont les traits singent diaboliquement les nôtres, d'ailleurs ses scores sont les mêmes que les nôtres... Si par le plus grand des hasards, on s'en tire vivant, on rejoint enfin dans la vallée la chaumière où vit Charlie, notre ami savant retiré des affaires, et sa fille ou sa nièce, je ne sais plus, enfin un personnage féminin dont on suppose que le héros (nous) l'épousera à la fin.
JUSQUE LA ça promet du bon, ou plutôt ça devrait promettre du bon. Le souci, c'est... le style. Fade. Nouille. Plat comme une gymnaste coréenne (que les Coréens m'excusent s'ils me lisent). Tous les ingrédients sont là... L'intro promettait... Et.. et... ET... et ça ne démarre pas. La faute à des paragraphes expéditifs, à une faible exploitation de la voix intérieure / des sensations du héros. Et des paragraphes multipliés au fil des rencontres scénarisées, mais avec peu de récit : on change juste de § pour s'entendre dire qu'on a perdu 2 points de RESISTANCE, ou que la racine a bien tenu et qu'on n'est pas tombé dans le précipice. C'est tout. Pfff.
Du coup, j'hésite à vous infliger le récit des TROIS JOURNEES SUIVANTES. Pour faire très court, un rêve où on rencontre Merlin, qui met à notre service de cruels esprits du passé pour lutter contre les périls du présent - dangereux alliés. Une exploration en plusieurs journées de la Mine, cette pelée, cette galeuse d'où vient tout le mal qui consume le village et la vallée. A la fin de chaque journée, on retourne chez Charlie, enfin chez le Pr Pétrie-Smith, très occupé à fabriquer de petites boîtes rondes et en verre pendant que nous, on mouillait le maillot à tacler du Mutant Indicible à coups de dynamite, à assommer de l'Horreur Cyclopéenne à coups de Sac de Sel, à dissoudre du Chtonien à grand renfort d'acide sulfurique. Ah, et on retrouve un de nos prédécesseurs du passé, car les mêmes événements maudits étaient advenus vers 1880. Même maux, même remède.
Au bout du compte, le 3ème jour, on localise l'épicentre du Mal. Charlie et sa fille (nièce, pupille ?) Lucy vont placer au bon endroit un chariot de dynamite, tandis que nous, on sauve les villageois retenus esclaves par les Horreurs Poulpesques. Le mal des tréfonds, un vaisseau spatial (!) nommé l'Astrosaure (!!!) tente bien de s'échapper, mais dans un final apoplectique, il explose en vol et sombre au fond d'un vallon, recouvert par sa propre brume méphitique. Jamais plus cette horreur d'outre-espace ne viendra troubler le calme du Pays de Galles. Avec ou sans -s. Toute ressemblance entre l'Astrosaure-aux-Dinos et le dessin animé français Les Diplodos... bla bla bla fortuite... bla bla hasard...
BREF. Je le répète, tous les ingrédients sont là, on avait de quoi faire du bon, du noir, du sinistre, du Lovecraft, quoi ! Mais je ne sais pas, la sauce ne prend pas... La faute à des règles absconses, à une absence de progression dans l'horreur, à des combats dont la scénarisation ne me convainc pas, à une géographie qui m'échappe (je n'ai pas trop cherché à cartographier la mine).
POINTS POSITIFS, quand même. Très bien d'avoir voulu adapter une ambiance et des monstres à la Lovecraft en livre-jeu. Le fait de pousser le lecteur à fuir les monstres en hurlant plutôt que de les affronter, faible humain que nous sommes : nickel, ça prend le lecteur à contrepied et pose les règles d'une grammaire de l'horreur indicible, à laquelle on ne peut rien, ou si peu... Les règles de PSYCHISME rappellent beaucoup la SANTE et de folie dans L'Appel de Cthulhu, le JdR. Avec des PFA parfois bien troussés en cas de perte de sa santé mentale, lisez le 84 par exemple - excellent ! Et cette fin, qui laisse le lecteur tout imaginer, ce Cristal volé par une griffe anonyme, quand on se croyait à l'abri, au chaud - excellentissime !
NB : finalement on n'a pas épousé Lucy à la fin. Tome 2 ?
NB2 : Lovecraft n'est jamais nommé, pas plus qu'aucun de ses monstres fétiches, et pourtant ils sont tous là... Ce n'est pas TOC, Trouver l'Objet Caché, mais TEC : Trouve l'Entité Cthulienne non créditée au générique : le Wendigo, les Grands Anciens aux chuchotements effrayants, Ceux qui Murmurent dans les Ténèbres, la Couleur Tombée du Ciel, j'en passe et des plus cyclopéens. La référence pouvait donc échapper au jeune lecteur en 1985 ou 1986, époque ou HPL n'était connu que de rares adeptes de SF. La gloire et la "pop culture Ctulhu" sont venues plus tard, dans les années 90 et 2000.
Mon impression globale est : plein de bonnes idées, pas assez exploitées ; une narration et des règles à revoir pour remonter la qualité d'un cran.
NB3 : bien vu, Sly, la comparaison avec Stephen King. J'adorais ce roman et pourtant le // m'a échappé.
S'il fallait noter, je mettrai un peu en-dessous de la moyenne.
La COUVERTURE nous présente une sorte de Hulk amateur de puits de mine, il a pris Pioche en option à son Bac de monstre. Bref, pas la meilleure couverture que j'aie vue, trop horreur US série B. Quand j'ai ouvert le livre... Hum, auteurs : Ian & Clive Bailey, des frères ? Les cas de collaboration littéraire me rendent curieux, qui a écrit quoi ? A vérifier. En parlant de collaboration, les traducteurs sont deux aussi. Ils ont traduit "Pays de Galle" sans -s dans la 4ème de couv'. Champions !
Les REGLES, à présent. Hum, cinq caractéristiques, des règles qui se suivent et s'imbriquent de manière un peu foutraque : tout ça manque de clarté dans la présentation. Deux paragraphes distincts prétendent expliquer les règles du combat (page 13 et page 14), en fait l'un des deux explique plutôt des règles d'opposition brève genre bras-de-fer, le second aborde vraiment la question des combats dans le sens : duel. Mouais, à voir à l'usage.
L'INTRO. Dès la première page, on nous ambiance :
Citation :Vous allez bientôt recevoir une lettre de votre ami Petrie-Smith, savant et explorateur de renommée mondiale. Et nul doute que vous allez aussitôt vous mettre en route pour lui apporter l'aide qu'il demande... Vous allez en effet vous heurter aux forces obscures qui s'exercent au-delà des lumières de la raison et de la science...
Purée, ça, ça claque, ça rachète ces règles foutraques ! Et puis ce nom de série : "Portes Interdites"... Il est des portes que les humains ne devraient pas franchir... Ça vend du rêve, enfin du cauchemar. J'aime.
On ne saura jamais si notre amie Charlie, ce digne savant, est l'inventeur des boîtes de Pétri (sans -e), d'un usage considérable en microbiologie et en cours de SVT. Cours de SVT où on gagnerait à lire L'Horreur dans la Vallée, au vu des planches quasi anatomiques dont nous gratifie l'illustrateur Jonathan Heap : du zombie explosé à la chevrotine, du bernacle à tentacules, du dinosaurien slash poulpe, un vrai festival des horreurs. L'encrage ne rend pas honneur à son travail, c'est dommage, travail par ailleurs inégal : comparez l'excellente illustration du 14 avec le ridicule rhinocéros à roulettes du 166.
[EDIT : les chap.47-48 du Pendule de Foucault d'Umberto Eco m'apprennent que Piazzi Smyth et Flinders Petrie sont deux illuminés. Ils ont mesuré les Pyramides d'Egypte et Stonehenge pour en tirer des conclusions mystiques. Les frères Bailey s'en sont apparemment inspirés pour créer le personnage de Charles Pétrie-Smith.]
Paragraphe 1 et suivants, jusqu'à la maison de Petrie-Smith. Epoque indéterminée, XXème siècle, mais l'absence de téléphone + la couverture du tome 2 = les années 30. Une vallée qu'on suppose galloise, dont le nom résonne dans le noir comme le coup d'une lame sacrificielle : Bryn Coedwig ! Une brume mystérieuse qui masque la lumière du jour, suspendue au-dessus des collines millénaires... un sentier à flanc de coteau, dominant une pente sinistre... ne manquerait que le croassement d'un corbeau, ou le craquement d'une brindille dans notre dos...
crac...
OMG ! Une brindille a craqué !!!
Insérez ici une scène de combat épique... Rampe hors des buissons un monstre végétal dont les traits singent diaboliquement les nôtres, d'ailleurs ses scores sont les mêmes que les nôtres... Si par le plus grand des hasards, on s'en tire vivant, on rejoint enfin dans la vallée la chaumière où vit Charlie, notre ami savant retiré des affaires, et sa fille ou sa nièce, je ne sais plus, enfin un personnage féminin dont on suppose que le héros (nous) l'épousera à la fin.
JUSQUE LA ça promet du bon, ou plutôt ça devrait promettre du bon. Le souci, c'est... le style. Fade. Nouille. Plat comme une gymnaste coréenne (que les Coréens m'excusent s'ils me lisent). Tous les ingrédients sont là... L'intro promettait... Et.. et... ET... et ça ne démarre pas. La faute à des paragraphes expéditifs, à une faible exploitation de la voix intérieure / des sensations du héros. Et des paragraphes multipliés au fil des rencontres scénarisées, mais avec peu de récit : on change juste de § pour s'entendre dire qu'on a perdu 2 points de RESISTANCE, ou que la racine a bien tenu et qu'on n'est pas tombé dans le précipice. C'est tout. Pfff.
Du coup, j'hésite à vous infliger le récit des TROIS JOURNEES SUIVANTES. Pour faire très court, un rêve où on rencontre Merlin, qui met à notre service de cruels esprits du passé pour lutter contre les périls du présent - dangereux alliés. Une exploration en plusieurs journées de la Mine, cette pelée, cette galeuse d'où vient tout le mal qui consume le village et la vallée. A la fin de chaque journée, on retourne chez Charlie, enfin chez le Pr Pétrie-Smith, très occupé à fabriquer de petites boîtes rondes et en verre pendant que nous, on mouillait le maillot à tacler du Mutant Indicible à coups de dynamite, à assommer de l'Horreur Cyclopéenne à coups de Sac de Sel, à dissoudre du Chtonien à grand renfort d'acide sulfurique. Ah, et on retrouve un de nos prédécesseurs du passé, car les mêmes événements maudits étaient advenus vers 1880. Même maux, même remède.
Au bout du compte, le 3ème jour, on localise l'épicentre du Mal. Charlie et sa fille (nièce, pupille ?) Lucy vont placer au bon endroit un chariot de dynamite, tandis que nous, on sauve les villageois retenus esclaves par les Horreurs Poulpesques. Le mal des tréfonds, un vaisseau spatial (!) nommé l'Astrosaure (!!!) tente bien de s'échapper, mais dans un final apoplectique, il explose en vol et sombre au fond d'un vallon, recouvert par sa propre brume méphitique. Jamais plus cette horreur d'outre-espace ne viendra troubler le calme du Pays de Galles. Avec ou sans -s. Toute ressemblance entre l'Astrosaure-aux-Dinos et le dessin animé français Les Diplodos... bla bla bla fortuite... bla bla hasard...
POINTS POSITIFS, quand même. Très bien d'avoir voulu adapter une ambiance et des monstres à la Lovecraft en livre-jeu. Le fait de pousser le lecteur à fuir les monstres en hurlant plutôt que de les affronter, faible humain que nous sommes : nickel, ça prend le lecteur à contrepied et pose les règles d'une grammaire de l'horreur indicible, à laquelle on ne peut rien, ou si peu... Les règles de PSYCHISME rappellent beaucoup la SANTE et de folie dans L'Appel de Cthulhu, le JdR. Avec des PFA parfois bien troussés en cas de perte de sa santé mentale, lisez le 84 par exemple - excellent ! Et cette fin, qui laisse le lecteur tout imaginer, ce Cristal volé par une griffe anonyme, quand on se croyait à l'abri, au chaud - excellentissime !
NB : finalement on n'a pas épousé Lucy à la fin. Tome 2 ?
NB2 : Lovecraft n'est jamais nommé, pas plus qu'aucun de ses monstres fétiches, et pourtant ils sont tous là... Ce n'est pas TOC, Trouver l'Objet Caché, mais TEC : Trouve l'Entité Cthulienne non créditée au générique : le Wendigo, les Grands Anciens aux chuchotements effrayants, Ceux qui Murmurent dans les Ténèbres, la Couleur Tombée du Ciel, j'en passe et des plus cyclopéens. La référence pouvait donc échapper au jeune lecteur en 1985 ou 1986, époque ou HPL n'était connu que de rares adeptes de SF. La gloire et la "pop culture Ctulhu" sont venues plus tard, dans les années 90 et 2000.
Mon impression globale est : plein de bonnes idées, pas assez exploitées ; une narration et des règles à revoir pour remonter la qualité d'un cran.
NB3 : bien vu, Sly, la comparaison avec Stephen King. J'adorais ce roman et pourtant le // m'a échappé.
S'il fallait noter, je mettrai un peu en-dessous de la moyenne.