Dune
#16
Oui, j'ai découvert au fil de mes recherches que l'épice aurait causé la stérilité d'Arrakis, autrefois verdoyante et fertile, et qu'elle y aurait été introduite indirectement par l'homme. Donc déjà, dans les années 1960, Herbert parlait d'écologie et dénonçait l'impact de l'homme sur son environnement. Sans oublier que dans son univers, les hommes ont rejeté les machines, suite à une guerre meurtrière contre ces mêmes machines qui avaient pris le pouvoir. On parle aujourd'hui des craintes suscitées par l'IA, Herbert en parlait déjà il y a plus de 50 ans... Et la dimension spirituelle, théologique de son œuvre : là aussi, en phase avec notre époque, Malraux l'avait dit : "Le XXIème siècle sera religieux ou ne sera pas". Là encore, on a un Herbert visionnaire. Stupéfiant (si j'ose dire).

Quand on plonge vraiment dans les méandres de Dune, on comprend qu'on a là un monument de la SF, incontournable. Et je comprends aussi pourquoi on disait qu'adapter cette œuvre était impossible.
Anywhere out of the world
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#17
(04/03/2024, 10:14)Voyageur Solitaire a écrit : Par contre, dans beaucoup de vidéos consultées, il y a un reproche constant fait aux deux films : apparemment, Herbert décrirait Arrakis comme un enfer, où même les Freemen auraient du mal à évoluer aux heures les plus brûlantes, limitant leurs sorties. Alors que le film gommerait ces conditions extrêmes et donnerait plus parfois l'impression d'un thé au Sahara (très beau film d'ailleurs, indispensable pour les amoureux du désert) ou d'une balade sur les dunes...

Les Fremen attachent une importance extrême à l'eau corporelle et ils ont développé des vêtements hautement avancés (les distilles, ou "stillsuits" en anglais) qui leur permettent d'éviter de gaspiller la moindre goutte de sueur. On ne les verrait jamais tête nue en pleine journée à l'extérieur, par exemple.

Mais c'est un peu comme les films où des chevaliers se battant tête nue (ou visière relevée) au lieu de porter un heaume leur recouvrant 95% de la tête : une absurdité qui a pour cause des considérations visuelles dont un roman n'a pas besoin de se préoccuper.


(04/03/2024, 16:22)gynogege a écrit : L'idée que l'homme puisse rejeter la machine (et l'IA comme on dit aujourd'hui) pour des raisons mystiques et qu'il préfère se tourner vers sa richesse intérieure pour exploiter à fond les possibilités qui sont en lui est à la fois magistrale d'un point de vue anticipation, mais renvoie en même temps à toute une culture chamanique, avec l'utilisation et le contrôle d'états de conscience modifiés par la drogue.

Je ne sais pas si c'est l'adjectif "chamanique" qui convient le mieux (il suggère une communion avec les esprits plutôt que l'exploitation du potentiel humain). Mais le thème est en effet très riche, et il est d'ailleurs tellement dense dans le roman de Frank Herbert que le film a dû reléguer à l'arrière-plan certains éléments (tels que les Mentats ou les Navigateurs de la Guilde).

Le djihad butlérien, dans l'univers de Dune, est le nom que porte la révolution par laquelle l'humanité rejette les machines pensantes et adopte le commandement suivant : "Tu ne créeras pas de machine à l'imitation de l'esprit humain.". Dans le cadre de Dune, ce principe est poussé à des extrémités qui semblent exagérées, interdisant jusqu'aux ordinateurs basiques du genre qui devait exister dans les années 60. Mais il trouve une signification nouvelle à notre époque où les "intelligences" artificielles commencent à émerger en force. Ce n'est pas pour aujourd'hui ni pour demain, mais d'ici 20-30 ans, lorsque la moitié de la production artistique proviendra d'IA qui seront la négation même de la créativité, il y aura sans doute des gens pour se dire qu'une révolution de ce genre aurait du bon.

(J'ai entendu dire que Brian Herbert, dans les pseudo-préquelles qu'il a écrit en compagnie de je ne sais quel charlot, aurait prétendu que le djihad butlérien était en fait une grande guerre entre l'humanité et des robots du genre Terminator. C'est tellement con que je jetterai des tomates pourries à la figure de ce type si j'ai un jour le déplaisir de le rencontrer.)
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#18
Sad 
(14/03/2024, 00:08)Outremer a écrit : (J'ai entendu dire que Brian Herbert, dans les pseudo-préquelles qu'il a écrit en compagnie de je ne sais quel charlot, aurait prétendu que le djihad butlérien était en fait une grande guerre entre l'humanité et des robots du genre Terminator. C'est tellement con que je jetterai des tomates pourries à la figure de ce type si j'ai un jour le déplaisir de le rencontrer.)

Mais Tellement !! J'ai eu le double malheur d'avoir acheté et lu les tomes du fiston (les préquelles et la fin) ET la série d'Anderson "La Saga des Sept Soleils" NoGreen
Concernant cette dernière, elle semble avoir été écrite par un adolescent : un univers complètement pété aux relents de créatures élémentaires se frittant pour se fritter ; le tout raconté avec une chronologie incompréhensible et un niveau de premier degré de lecture si affligeant que par comparaison, la moindre blague carambar ferait montre d'une réflexion philosophique des plus profondes... Et pourtant, il y avait matière à faire un récit formidable, car il y a quand même eu de bonnes idées, le bougre. Bref, gâchis total, passez votre chemin !

En lisant les tomes de Dune auquels il a participé, j'ai retrouvé la même vacuité : récit premier degré dont on oublie le fil après 2 chapitres, spoil complètement gratuit sur le Bene Tleilax qui ruine littéralement tout la tension scénaristique sur cette faction de l'oeuvre original du Papa et moults autres intrigues/descriptions/faits difficilement intégrable dans ma suspension d'incrédulité. Pour peu qu'on ait l'horrible idée de vouloir découvrir la série chronologiquement, par pitié, dites à ceux qui vous demande comment découvrir Dune, ayez une réponse claire : ne lisez pas les prequels par pitié.
Les tomes de la fin sont moyens mais l'idée de fond est pas trop mal (merci papa pout les notes, je pense) pour le devenir des Vers, c'est cohérent avec le Chemin d'Or de Leto II. Par contre, j'ai un gros doute sur le fait que les personnages omniscients décris à la fin de la Maison des Mères soient bien ceux qui sont écrits (vu qu'il apparaissent dans le prequel). Bien que ça ferait un superbe twist par rapport à l'historique du monde de Herbert Père. Bref, dommage que Herbert Père n'ai pu écrire cette fin... Crybaby
сыграем !
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#19
(14/03/2024, 00:08)Outremer a écrit : (J'ai entendu dire que Brian Herbert, dans les pseudo-préquelles qu'il a écrit en compagnie de je ne sais quel charlot (…).)

Le charlot en question est Kevin J. Anderson. Auteur des pires romans Star Wars que j’ai lus : on dirait des fanfics écrites par un gamin de dix ans, et c’est méchant pour le gamin en question, qui s’en sortirait certainement mieux. Ce type est la raison pour laquelle je ne lirai jamais les préquelles de Dune.
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#20
Pour en revenir au film lui-même : contrairement au premier, il a dû ajouter un certain nombre de choses à la substance du livre. Dans le roman, après le moment où Jessica devient Révérende Mère, il y a un bond en avant d'environ deux ans, à l'issue duquel Paul est déjà en passe de devenir le chef incontesté des Fremen. Ça n'aurait sans doute pas été très satisfaisant dans un film de ne rien voir de la façon dont Paul acquiert cette influence, ni de la manière dont débute sa relation avec Chani.

Il y a un certain nombre de personnages du livre qui n'apparaissent pas dans ce film : notamment Alia, Harah, le comte Fenring et Thufir Hawat (qui apparaissait dans le premier film). Même si ce sont des personnages intéressants, il était sans doute préférable de les exclure d'une adaptation cinématographique (tout comme Peter Jackson a probablement eu raison de ne pas inclure Tom Bombadil, Glorfindel, Erkenbrand et Beregond dans ses films). Il y a certaines choses qui peuvent être efficacement développées dans un livre sans pour autant y demander trop d'espace, mais qui consommeraient dans un film de précieuses minutes pouvant être mieux employées.

Là où je suis beaucoup plus dubitatif, c'est en ce qui concerne la façon dont le film exploite le thème religieux/messianique. Ce n'est pas une mauvaise chose d'avoir mis l'accent sur ce thème, mais j'aurais aimé que cela se fasse avec plus de subtilité. Le fait que Paul ait des scrupules a se plonger dans ce rôle de messie qui s'offre à lui (et à déclencher une guerre sainte dont il perçoit l'ampleur) est très compréhensible, mais le fait qu'il essaye activement de briser son aura de messie et de rejeter le pouvoir que cela lui accorde, ça me semble très excessif (et même s'il finit par changer d'avis, ce revirement se fait de façon trop abrupte). Paul n'étant de toute façon pas censé être un héros irréprochable, pourquoi le faire se comporter de façon si rigidement morale ? Dans le livre, ses doutes ne s'expriment que dans son dialogue intérieur ; dans le film, cela aurait à mon avis pu se borner à des interactions avec sa mère et avec Chani.

Chani, parlons-en. Il était tout à fait légitime de lui accorder un rôle plus visible que dans le livre. Faire d'elle le personnage le plus sceptique vis-à-vis de la nature prétendument messianique de Paul, pourquoi pas ? Mais là encore, il aurait fallu beaucoup plus de nuances et de finesse. Chani réalise forcément qu'un chef charismatique comme Paul offre la meilleure chance pour les Fremen de se débarrasser de la tyrannie Harkonnen et de faire d'Arrakis un monde moins pénible. De plus, elle aime Paul. Est-ce que ça ne devrait pas l'amener à plus d'hésitation ou de modération ? Une ou deux scènes entre Chani et Paul où on les voit discuter de la voie messianique dans laquelle s'engage Paul auraient eu à mon avis beaucoup plus de poids que le moment où Paul accepte complètement sa vocation de messie et Chani essaie futilement de tirer les autres Fremens de leur ferveur religieuse.
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#21
Merci à vous pour les infos sur Kevin Anderson, vus vos avis unanimes, je vais éviter cet auteur...

Pour le second film, je n'accroche pas avec la relation Paul/Chani, sans trop pouvoir l'expliquer. Cela se situe pour moi au niveau du jeu d'acteurs, je trouve la Chani jouée par Zendaya chiante, monolithique, trop boudeuse. Les moments "romantiques" avec bisous sur les dunes face au soleil couchant sonnent faux, trop hollywoodiens, le genre de scène prévue pour faire battre plus vite le cœur des adolescentes. Après, je n'ai pas lu les bouquins, je ne sais donc pas comment Herbert a décrit cette relation. Mais dans le film, je n'accroche pas.

Pour Alia, j'ai cru comprendre que Villeneuve trouvait trop difficile de faire figurer ce personnage d'enfant ayant déjà la personnalité d'une adulte, le savoir et la mémoire de ceux qui l'ont précédé. Lynch l'avait fait lui.
Anywhere out of the world
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#22
Autant j'ai adoré le premier film, un des plus grands films de SF à mes yeux (impression reconfirmée en le revisionnant quelques jours avant le deuxième), autant le deuxième m'a laissé dubitatif. J'ai adoré certaines choses, comme le lac souterrain, ou l'environnement gigerien de la planète Harkonnen. Mais je n'ai pas du tout aimé l'humour - les petites blagounettes qui ponctuaient l'initation de Paul chez les Fremen - ni sa relation avec Chani la boudeuse. Ces deux aspects - amourettes entre stars et humour - avaient des relents hollywoodiens...
Et c'est exactement ça, puisque j'ai appris après coup (n'ayant pas lu les livres), que ce sont des ajouts des scénaristes. J'ai eu l'impression de retrouver cet arrière-goût désagréable des saisons centrales de Game of Thrones (avant la débâcle des deux dernières saisons), où le matériau d'origine se dilue dans le travail de scénaristes moins talentueux (ou à tout le moins contraints par des producteurs).
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#23
Entièrement d'accord : ce deuxième opus est bien plus hollywoodien et il a perdu au passage le sacré, le sombre et le sublime du premier. On a droit à l'inévitable romance entre le jeune éphèbe guerrier, fort et sensible à la fois et la jeune nana, féminine et douce mais indépendante et forte, bien en phase avec l'air du temps. Un bisou, un beau coucher de soleil et quelques moments qui ressemblent plus à une vidéo promotionnelle pour un voyage de noces dans le désert qu'à une planète stérile et inhospitalière et c'est bon. On est dans le même style que la jeune Padmé et le futur Dark Vador, bien propres sur eux, en mode "Amour, gloire et beauté chez les Jedi". 

J'ai beaucoup aimé quand-même, je reprends toujours du désert (faudrait que j'arrête de la sortir à chaque fois celle-là). Mais autant je suis allé voir ce second opus en salles direct, autant s'il y a un troisième, je pense que j'attendrai le DVD...
Anywhere out of the world
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#24
Quand un scénariste hollywoodien pourri ajoute quelque chose à l'adaptation d'un livre, ça peut vraiment faire peur, des fois.
Le James Bond Les Diamants sont Eternels en est un exemple marqué : une moitié du film est bonne, elle vient du livre, une moitié est pourrie, avec son satellite laser qui va détruire le monde, c'est un ajout des scénaristes hollywoodiens.

Je ne commencerai pas à parler de l'univers Marvel, systématiquement détruit et profané, sinon l'énorme HS commencera.

Je n'ai vu que le 1er volet de ces Dune pour l'instant. Je le préfère à la version de Lynch (que j'avais bien aimée). J'y ai trouvé une volonté de ne pas abîmer l'œuvre originale, de faire quelque chose à la hauteur.

Je ne pouvais pas terminer un post sur Dune sans rappeler qu'Iron Maiden avait sorti une chanson sur le livre avant que le film de Lynch ne sorte.

https://www.youtube.com/watch?v=OtG5bXF0DZM
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