Page 1 sur 1
De l'AVH au roman ?
Publié : 06 août 2023, 16:14
par Gwalchmei
Yep tout le monde,
Une question me taraude, mais ça a peut-être déjà été évoqué ailleurs ? Y en a-t-il parmi vous qui sont allés au bout d'un projet d’écriture de roman, après avoir navigué dans les eaux fécondes de la littérature interactive ?
J'avais lu "Le vieil indien et le Renard" de Sunkmanitu (où es-tu bon sang !!), que j'avais beaucoup aimé, mais quid des autres ?
Je ne dis pas ça parce que je termine l’écriture du mien (commencé il y a des lustres), mais histoire d'échanger sur les difficultés ou retours d'expériences éventuels.
Pour ma part, l'exercice me semble vraiment différent entre rédaction AVH / Roman, mais bon j'attends de voir si ce sujet intéresse du monde (ou s'il fait un flop :lool: ) avant de pousser la réflexion plus loin.
Et bravo à tous les auteurs, participants au mini-YAZ 2023, j'avais la tête sous l'eau, mais j'en ai lu plusieurs !
RE: De l'AVH au roman ?
Publié : 06 août 2023, 16:21
par gynogege
En ce qui me concerne j'avais finalisé un roman longtemps avant de me mettre aux AVH
Mais il est resté gentiment dans un placard. J'ai mis sept ans à l'écrire je crois. Les difficultés ne sont pas les mêmes bien sûr mais l'un n'est pas forcément plus facile que l'autre !
RE: De l'AVH au roman ?
Publié : 06 août 2023, 17:10
par Loi-Kymar
Jin Sombrecœur a franchi le pas, il me semble ?
RE: De l'AVH au roman ?
Publié : 06 août 2023, 19:26
par Voyageur Solitaire
Pour ma part, j'ai écrit Les Tambours de Shamanka sous forme de roman.
Pas évident puisque mes AVH proposent en général de nombreux choix et itinéraires, de nombreuses rencontres ou péripéties suivant les choix du lecteur. Là, il a fallu donc choisir et je dirais que c'est bien ça le plus difficile pour moi.
Par contre, j'ai pu m'attarder plus longuement sur chaque personnage, sur leurs relations que l'on voit vraiment se développer ou sur certains passages. Chose impossible ou très difficile dans une AVH à moins de rajouter des paragraphes et d'allonger ces derniers.
Avec le temps, le format roman me séduit de plus en plus, je le trouve bien moins contraignant que le format AVH.
Le seul gros point noir, c'est de devoir faire un choix si on a plusieurs aventures dans l'aventure. A moins de toutes les utiliser mais là, c'est plus un roman, c'est une encyclopédie... Et c'est pas toujours possible.
RE: De l'AVH au roman ?
Publié : 07 août 2023, 14:35
par Gwalchmei
@gynogege : ça parle de quoi ton roman ? Aucune velléité de le proposer à un éditeur ou sur une plateforme en auto-édition ?
@Loi-Kymar : exact ! Ça fait longtemps que je n'ai pas eu de ses nouvelles, mais j'avais vu, en effet, il y a quelques années qu'il avait été édité pour plusieurs romans.
@Voyageur Solitaire : yep, c’est ce que tu expliquais, je crois, à l'époque concernant les Tambours de Shamanka. As-tu terminé du coup ? Surtout que tu as matière avec ce que tu as déjà écrit à proposer quelque chose d'abouti et riche ! Et idem, envie de le proposer à une maison d'édition ou en auto-édition ?
RE: De l'AVH au roman ?
Publié : 07 août 2023, 17:25
par Voyageur Solitaire
@ Gwalchmei :
Oui, il est terminé mais n'a jamais été relu soigneusement. Et depuis le temps, si j'entamais une relecture soignée, nul doute que je modifierais certains passages, vu comme j'ai enrichi Shamanka au fil des trois AVH.
Il est pour moi seul, aucune intention de le publier pour l'instant.
RE: De l'AVH au roman ?
Publié : 07 août 2023, 19:38
par gynogege
Ok je vais raconter ma vie
J'ai eu dans le passé (avant Alkonost) deux contacts avec des éditeurs. L'un avec Paul Otchakowski-Laurens (POL) qui se trouvait être l'oncle de mon cousin. Et au mariage de ce dernier, ma mère lui ayant dit que j'écrivais des nouvelles, il m'a proposé de les lire. Qui plus est il avait l'air sincère, pas juste obligé. Et comme un con j'ai eu honte et j'ai dit non. J'avais la vingtaine. Plusieurs années plus tard je lui ai envoyé des manuscrits mais je pense que c'est resté bloqué à son secrétariat vu que je suis passé par le canal standard.
Plus tard je sévissais sur un site appelé Librisme qui avait pas mal de points communs avec nos forums, vraiment sympa, chacun postait ses textes et commentait les autres. Un auteur du nom de Dominique Castinel (que je salue) y écrivait aussi et il m'a proposé de faire suivre des textes à son éditeur. J'ai rencontré le gars dans un café, et il avait apprécié une des nouvelles. Il m'a demandé si je pouvais la rallonger pour en faire un roman. Et j'ai dit encore non

J'ai dit que la nouvelle était écrite comme ça, que ça n'avait pas de sens de l'étendre, et que je ne saurais pas comment faire, mais que j'avais un roman en cours d'écriture (celui que j'évoquais et que je publiais sur Librisme). Il a hoché la tête et je n'ai plus jamais entendu parler de lui (je soupçonne qu'il a mis la clé sous la porte, comme beaucoup).
Bref, pour en venir à ce roman que j'ai finalisé en 2007 je l'ai en mis en ligne gratuitement et j'ai juste fait une très petite édition à compte d'auteur, distribuée à des amis. A peu près personne ne l'a lu. Ca ne m'a pas donné très envie d'écumer les éditeurs, surtout vu ma tête de lard. Je note quand même que l'épouse d'un copain avec qui ne partage à peu près rien en termes de centres d'intérêt l'a lu complètement et apprécié, je lui en sais gré ! (700 pages quand même)
Ah oui, ça s'appelle Le Monde du Probable. A part préciser que c'est un roman polyphonique, je préfère mettre le quatrième de couverture, sinon je ne sais pas trop quoi en dire:
Ce roman a été rédigé entre 2001 et 2007, il relate l'histoire d'un monde tel qu'il est, tel qu'il pourrait être, tel qu'il aurait été. Ses personnages sont un Clown, un homme tatoué d'un numéro, son enfant surdoué, un professeur d'université assassiné, sa fille institutrice, le mari de celle-ci, un lutin, un Colonel, un épaulard, un monstre virtuel... Toute ressemblance avec des personnes, des pays, existant ou ayant existé est involontaire mais sans doute pas fortuite.
RE: De l'AVH au roman ?
Publié : 07 août 2023, 23:40
par MerlinPinPin
Le covid a coïncidé avec un concours lancé par folio SF sur le thème : « 1001 voix ». En gros, folio qui ne publie que des auteurs confirmés ou des traductions organisait un concours de premier roman.
J’ai eu trois mois pour l’écrire donc cela a été… particulièrement intense. Mais c’était pendant le confinement et j’ai bossé jour et nuit à la fin.
Donc, victoire, le roman a été achevé… mais n’a évidemment pas gagné. Depuis, il dort de sa belle mort (mais trois personnes l’ont lu ^^)
Il s’agit davantage d’un roman policier dans un monde futuriste que d’une véritable œuvre SF (on suit alternativement deux personnages : une étudiante en cavale accusée de meurtre et un juge-enquêteur au passé trouble dans un monde aseptisé où plus personne ne peut physiquement parler suite à une mutation irréversible).
RE: De l'AVH au roman ?
Publié : 08 août 2023, 14:33
par Gwalchmei
Ah ! C’est cool. Merci pour vos réponses.
Quelques réflexions.
Je suis peut-être vieux jeu, mais je vois toujours dans le roman une allégorie du juge de paix, une marche compliquée à franchir (surement que j’idéalise trop). Surtout parce que cela revêt (je pense) quelque chose de plus intimiste comparé à la rédaction d’une AVH. Une sorte de mise à nu, alors que la structure même d’un récit interactif permet à l’auteur de se cacher un peu plus facilement, s’esquiver au moins, derrière le côté ludique, qui reste sa particularité. On est surement moins exigeant sur l’aspect littéraire dans une AVH du fait essentiellement qu’on attend aussi (et surtout) un jeu.
Je comprends tout à fait donc la réticence à proposer un roman qu’on a achevé, cette prose plus personnelle, à un public, quel qu’il soit, ou de le soumettre à un éditeur. C’est même une saine réaction je trouve, et qui traverse les artistes de tout poil à travers les siècles. Le doute est un moteur émancipateur dans l’art.
J’étais très enthousiaste à l’idée de terminer le bouquin sur lequel je travaille. Je m’estimais presque prêt ! Mais à force de relecture (simplement des 100 premières pages), je m’aperçois du cap, que dis-je, de la péninsule évidente qui me sépare d’une œuvre aboutie, solide, cohérente.
S’en est même vertigineux ! L’écriture au long cours est aussi un bon moyen de comprendre et d’analyser ses lacunes. Entre les « tics d’écriture », la gestion parfois laborieuse du rythme (qui, dans une AVH, est, de fait, artificiellement créé par le découpage en paragraphes, la proposition de choix, les mécaniques de jeu comme les combats ou les tests) et le bagage purement littéraire (richesse, style, sémantique, vocabulaire…), on tombe souvent de haut quand on relit son manuscrit !
Rédiger dix bonnes pages n’est peut-être pas si compliqué, mais plusieurs centaines, c’est un autre challenge. J’ai été effaré, me concernant, de la faiblesse dans la construction des phrases, par exemple, non seulement dans leurs tournures, mais la façon de bâtir le récit. Je me suis vite aperçu que je recyclais en permanence les mêmes procédés ou constructions de phrase, que le texte s’en retrouvait corseté, rompant le souffle de l'histoire, l’alourdissant jusqu'à rendre la lecture pénible, indigeste.
N'étant pas de formation littéraire, je pense qu’il me manque une culture suffisante pour m’affranchir des travers dans lesquels je retombe constamment. C’est un processus identique en musique. Vous pouvez être impressionné par le solo d’un guitariste, par exemple, qui enchaine des phrases compliquées et techniques. Mais écoutez-le sur plusieurs morceaux, plusieurs albums. Si les mêmes réflexes, ou artifices reviennent sans cesse, c’est la marque évidente d’une faiblesse ou d'un manque de créativité. Du coup, on se cache derrière ce que l’on sait faire et que l’on ressort à toutes les sauces. Mais ça ne sert pas le propos, la mélodie, ou l’histoire.
La rédaction d’un roman contribue à mettre en lumière tout ça, là où l’AVH offre la possibilité de s’en affranchir par sa structuration intrinsèque.
Aucun regret me concernant, car je vois dans l’écriture, un moyen parmi d’autres d’expression. C’est même assez salvateur je trouve. J’en arrive, au bout de ce chemin, à aborder ça avec beaucoup moins de pression. Je me dis juste que c’est comme ça, que certes je peux essayer de travailler, m’améliorer, mais que je reste à ma place et que ce que j’écris, et bien c’est ce que je peux faire de mieux au moment où je le fais.
PS : impressionné, MerlinPinPIn, par ta rapidité e ! Trois mois c’est un sacré défi. Mais la spontanéité a surement du bon, prouve que tu maitrises ton style. Se forcer à écrire vite amène une certaine urgence qui se retrouve dans le texte, donne souvent du sel à la prose. La relecture abusive (comme la période de mixage/arrangement quand on enregistre un album), affadie parfois l’ensemble fait perdre du souffle au récit, aseptise. C’est un piège en fait, la relecture sans fin, car, en effet on peut toujours améliorer, chasser les répétitions mais au bout compte ça en revient à passer le rabot jusqu'à gommer toutes les aspérités (qui sont souvent des esquilles d'émotion). A force, on dilue l’intention initiale, souvent bancale, mais qui recèle dans cette fragilité même toute l’essence créatrice.
RE: De l'AVH au roman ?
Publié : 08 août 2023, 18:50
par Voyageur Solitaire
Pour compléter, je pense également qu'on peut aller bien plus loin dans le roman que dans l'AVH.
Dans cette dernière, le lecteur est impliqué, le personnage principal, c'est lui, il est concerné au premier chef. On ne peut donc pas lui proposer/imposer tout et n'importe quoi sous peine de le perdre. Il y a un risque qu'à un moment, il se dise "non, ça n'est pas moi, moi je n'agirais pas comme ça, je ne pourrais pas faire ça".
Dans le roman, le personnage principal n'est plus le lecteur, il est extérieur. On peut donc aller plus loin avec lui et même si le lecteur en devient gêné, il est moins impacté parce que ce n'est pas lui, ça reste quelqu'un d'autre.
Dans Les Tambours de Shamanka version roman, je suis allé bien plus loin dans les relations entre le personnage principal et les autres ou dans sa personnalité. Il y a certains aspects de Ronan, de sa relation avec Olmec ou Danaé qui n'apparaissent pas dans l'AVH parce que selon moi, ces aspects passeraient peut-être mal pour le lecteur. Le Ronan du roman est différent de celui de l'AVH, moins sympathique, plus ambigu et plus complexe. D'ailleurs, de manière générale, les différents épisodes de ma saga des Fils du Soleil, tels que je les ai vraiment imaginés, sont plus durs et plus sombres que leur format AVH.
C'est pour moi un avantage du roman, je pense qu'on peut aller bien plus loin qu'avec l'AVH.
RE: De l'AVH au roman ?
Publié : 08 août 2023, 21:15
par gynogege
Incontestablement l'AVH contraint plus que le roman, je pense aussi qu'on travaille plus sur l'immersion, un peu comme dans un thriller. On se voit mal coller une description des égouts de Paris de 30 pages comme Victor Hugo
En ce qui me concerne je me verrais pourtant mal retourner vers le roman. Le théâtre à la limite. D'abord plus le temps passe et plus le fait d'être lu est important pour moi. Quand tu vois que tu as 1000 téléchargements sur Littéraction, même si tout le monde ne lit pas, avec quel texte on peut espérer atteindre ces chiffres ? Et qui plus est avec des retours construits, parfois même pointilleux.
Mais dans tous les cas je pense qu'il faut écouter ses pulsions (littéraires je veux dire) et qu'on apprend toujours à écrire. Ce que tu décris sur les tics d'écriture Gwalchmei, c'est très vrai, et si tu en as pris conscience aussi rapidement c'est super ! Sinon je peux confirmer qu'entre écrire un texte de dix pages, presque d'un seul souffle, ou un roman de plusieurs centaines de pages, ce n'est pas du tout le même exercice. Parce qu'au bout d'un moment le soufflet retombe nécessairement et il faut trouver une mécanique pour relancer la machine de manière un peu forcée, sans avoir trop l'impression qu'on fait de la merde...
RE: De l'AVH au roman ?
Publié : 08 août 2023, 21:18
par Voyageur Solitaire
Perso, même dans l'AVH, il y a des moments où "le soufflé retombe". Même avec toute l'histoire en tête, j'ai eu des périodes où ça ne venait pas et d'autres où j'écrivais 10, 20 paragraphes d'un coup et sans les retoucher.
RE: De l'AVH au roman ?
Publié : 08 août 2023, 23:52
par MerlinPinPin
Oui, trois mois c’est trop court. La dernière partie était précipitée, et il manquait la relecture, ou plutôt les relectures (et réécritures) qui à mon avis sont un processus d’affinage à peu près indispensable à tout texte un peu ambitieux (comme tu le dis Gwalchmeï il s’agit d’un délicat équilibre entre spontanéité et… maîtrise ?)
En revanche, une grande partie de la conception d’un roman (ou d’une avh d’ailleurs) réside dans la gestation qui précède peut-être totalement l’écriture elle-même. A titre d’exemple, le roman en trois mois reposait sur un univers qui était dans ma tête depuis deux ans (puisqu’il aurait dû servir de toile de fond à une avh longue). J’ai même repris et adapté des pages entières déjà écrites pour l’avh.
A propos de l’effet produit par la relecture d’un de ses propres textes avec du recul, bien sûr je connais aussi ce sentiment de désespoir en relisant un passage et en suffoquant devant l’évidence de nombreux défauts.
Il ne faut pas, je crois, trop se torturer avec cette sensation atroce. Car je me souviens avoir lu à certaines personnes des pages d’Ada de Nabokov, pages qui m’avaient laissé un souvenir si fort que je pensais chaque phrase sublime et éblouissante. Or si j’ai bien retrouvé l’émotion et l’admiration pour le texte dans son ensemble, les premières lignes m’ont paru sinon fades du moins « humaines ». Je percevais mieux les coups de pinceau, comprenais mieux le travail de l’auteur et surtout ne renouais pas immédiatement avec l’émotion que je cherchais.
Quand on écrit, je pense qu’on imagine, perçoit bien davantage que ce que les mots qu’on laisse peuvent véhiculer.
Je conseille toutefois sans réserve les pages absolument inégalées de Nabokov sur l’enfance de Van et d’Ada…
RE: De l'AVH au roman ?
Publié : 09 août 2023, 02:38
par Caïthness
Je m'étais lancé dans un roman y'a 1000 ans à l'occasion d'un nano... Si le départ était sympa, c'est parti en sucette vers la moitié.