[La Saga du Prêtre Jean] Les Adorateurs du Mal
#1
Pour la première fois, pas de moyen de transport magique ni de voyage dans le temps en introduction. Nous quittons Babylone pour atteindre l'Inde et l'ancienne cité de Bénarès mais ce trajet est juste évoqué, l'action débutant dans une taverne de la ville. Une kyrielle d'assassins va vouloir notre peau à cause d'un objet étrange entré par erreur en notre possession. Nous allons finalement réussir l'exploit de nous mettre à dos toutes les factions religieuses de la ville (brahmanes, shivaïstes, Thugs...), les forces de l'ordre et jusqu'aux citoyens courroucés. Un beau bordel dans lequel nous ne pourrons que rester plongés jusqu'au terme de l'intrigue, qui prend finalement une tournure de lutte contre les forces du mal.
Comme dans le précédent livre, toute l'action se passe donc en milieu urbain. Mais celui-ci se différencie par une atmosphère et un rythme qui lui sont propres. Atmosphère car les auteurs (Headline et Monrocq + Jacques Collin) sont visiblement intarissables sur le sujet de la mythologie indienne. L'hindouisme et le bouddhisme ne sont pas encore nés et il s'agit là des dieux antiques : Shiva, Brahma, Kali et tous les autres qui se distinguent par leur bras multiples ou leurs visages éléphantesques. Comme dans les tomes 2 et 4, de nombreux petits détails de la vie quotidienne, des habitudes vestimentaires ou culinaires viennent enrichir le récit. Mais ici, ce tableau est encore plus poussé. Nous avons l'occasion de rencontrer une flopée de personnages typiques de ce pays avec des explications très bien insérées dans l'histoire sur leurs motivations, leurs façon de vivre... Preuve en est le petit mot des auteurs à la fin du livre qui propose une bibliographie annexe pour en découvrir plus sur le sujet. Cela peut paraître pompeux pour un LDVELH mais n'est ici pas surprenants tant les auteurs sont crédibles quant à leur connaissance de cette époque et de ce pays.
Le rythme est également un atout car on est plongé dans un véritable film d'aventures, avec les rebondissements, l'humour, l'action et même les dialogues qui font penser à Indiana Jones et le Temple maudit (qui a forcément inspiré les auteurs, le film étant sorti deux ans avant l'écriture de ce livre). Les faux-semblants, la traîtrise, les passages secrets, les rituels étranges, la déesse noire, les drogues mortelles, la merveilleuse princesse, les bijoux mystiques, le sacrifice... Tous ces éléments intègrent l'histoire de manière harmonieuse. C'est que la structure du livre-jeu est particulière et ne correspond pas à ce que l'on trouve habituellement.
On dispose d'une grande variété de chemins dans la première partie et chacune de ces pistes est exploitée jusqu'à son terme, sans que l'on soit artificiellement remis sur le "droit chemin". La manière dont on y revient finalement est à chaque fois très fluide et on n'a pas du tout le sentiment d'avoir été "piloté" par les écrivains. Les transitions sont toujours réussies, jamais sabotées. Les quelques passages obligatoires sont balaises avec une succession de longs paragraphes qui contribuent un peu plus à donner un caractère romanesque à ce LDVELH. D'une manière générale, les paragraphes sont tous développés et on a donc au final une longue aventure et un livre à la très bonne durée de vie, surtout qu'il faudra pas mal d'essais avant de le terminer à la loyale.
En effet, la difficulté est au rendez-vous mais avec un challenge intéressant. Comme les chemins sont variés, certains objets (pas indispensables mais très avantageux dans l'optique de la dernière partie, la plus dangereuse) sont difficiles à trouver. Si les combats sont globalement faciles, ils sont nombreux et, avec la règle du double as fatal, facilement mortels. Si les PFA ne pullulent pas, ils sont quand même là et un peu de malchance aux dés peut nous y conduire. Surtout, les séquences finales sont difficiles à réussir si l'on n'a pas trouvé les objets précédemment mentionnés.
Le style est agréable et on a toujours droit à des scènes étonnantes de surprise et de burlesque, un peu la marque de fabrique de cette série. Mention à la scène hallucinante où le héros saoûl comme un cochon voit avec flegme des dizaines d'adeptes rivaux s'étriper sous ses yeux, avant de faire du rodéo sur une vache sacrée, poursuivi par une foule en colère.
Voici donc un LDVELH qui frise l'excellence de par son ton original, seulement lésé par ses règles de combat, injustes ou inintéressantes selon le score de Force que l'on aura tiré. C'est d'ailleurs le gros point faible de cette série dont la qualité générale atteint ou dépasse les DF, LS, Voie du Tigre ou Sorcellerie. Quel dommage que l'édition en fut plus confidentielle que les Folio Junior et c'est surtout rageant que la suite ne verra jamais le jour.
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[La Saga du Prêtre Jean] Les Adorateurs du Mal - par Fitz - 21/10/2008, 19:17



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