Cette AVH m'a fait penser à celle parue il y a environ 3 ans qui se déroulait en Corée du nord avec un réalisme, une ambiance moderne et un souci documentaire rares dans le monde des livres-jeux. Il s'agit là encore d'espionnage mais avec une difficulté bien moindre (heureusement) et un rythme encore plus minutieux puisque ici, tout se déroule sur une journée et une nuit. Le style est en plus bon avec des touches humoristiques bienvenues et des états d'âme du héros bien décrits. L'ensemble dégage beaucoup de maturité dans l'écriture et la manière d'aborder cette aventure interactive, j'ai particulièrement apprécié la manière SPOILER : d'aborder le thème du snuff : la violence et le sexe sont évoqués de manière directe mais sans voyeurisme ni moralisation intempestive, avec un certain détachement mais un choix des mots efficace, qui inspire malgré tout l'horreur ou le dégoût.
Un bémol cependant concernant la psychologie des personnages. Si parfois elle est plutôt fine (la camée, le couple dans le bar), elle est trop souvent à la limite du caricatural (les deux filles, le chef fascho, le junkie...) avec des réparties parfois étranges.
Dans l'ensemble, l'immersion est totale. Même si c'est parfois fastidieux, j'ai été impressionné par la plongée totale dans l'univers du KGB (l'historique, ses dirigeants, les moeurs) et la profusion de détails concernant les décors ou les personnages.
Pourtant, je n'ai pas autant accroché qu'à d'autres AVH "modernes" récentes telles que Nils Jacket 2 ou Mascarade Mortelle. La cause à la structure qui est tout sauf dynamique.
L'aventure est dans l'ensemble difficile, surtout dans le dernier appartement où j'ai fini par tricher lors des mauvais choix car j'en avais assez des relectures. La faute à une linéarité écrasante. Au vu du nombre de paragraphes, des choix multiples, on a l'impression d'avoir une certaine liberté mais c'est une illusion car le scénario est dirigiste. La raison sans doute au fait qu'il s'agisse de l'adaptation d'un jeu vidéo même si je n'avais pas eu cette impression dans les Resident Evil d'Aragorn. Il est quand même assez amusant de tester d'autres dialogues mais finalement, plein de choix n'ont aucune incidence réelle sur le succès de l'aventure. J'ai l'impression que l'aventure aurait pu sans problème comprendre deux fois, voire trois fois moins de paragraphes tant les copier-coller sont nombreux et tant les choix multiples anti-triche sont dévoreurs de place.
Ceci dit, rarement une AVH ne m'aura autant scotché à certains moments. Toute la séquence finale est haletante et terriblement angoissante, chaque choix était alors un crève-coeur tant j'avais peur de commettre la boulette. Le passage du temps lors des (trop rares) scènes d'action est à certains moments millimétrés et plus encore, le choix de ce que va dire notre personnage pour parvenir à ses fins ou tout simplement pour sauver sa peau. C'est une expérience très intéressante, c'est rare dans les LDVELH que les dialogues soient aussi détaillés et cruciaux que des scènes de combat.