Loup*Ardent Revisité
#1
Introduction


La série des Loup*Ardent ou Sagas of the Demonspawn en version originale. Pourquoi reprendre ainsi une série vieille de plus de 30 ans ? Bien sûr, pour beaucoup de quadras, elle évoque irrésistiblement l'un des parfums si particulier de la littéraction des origines, un ton différent, une narration différentes, des règles...  Mais c'est vieux, daté, réputé injouable et la série mérite probablement qu'on la laisse s'endormir du profond sommeil dont les mythes sont auréolés sans chercher à en découvrir une réalité bien souvent décevante, car inférieure au dit mythe.
Mais voici que je viens vous proposer de rejouer (dans quelques années, quand tout sera écrit, genre vers 2021 ou 2022) à Loup*Ardent. Pourquoi, comment, qu'est-ce qui m'y a incité ? C'est ce à quoi je vais essayer de répondre à présent en abordant tout d'abord le point de vue narratif.

Cette série a pour moi toujours possédé quelque chose de spécial, comme un charme, une aura de mystère. Elle possédait alors bien des défauts, mais ceux-ci n'ont jamais pu entamer la fascination qu'exerce encore les Loup*Ardent – surtout le premier volume – sur ma petite personne. Et pourtant, j'ai joué et rejoué et rejoué encore à la Voie du Tigre, aux Loup solitaire, à Astre d'Or, à Sorcellerie, pour ne citer que de très célèbres séries. Mais aujourd'hui, avec l'âge, toutes ces sagas me semblent frappées d'une pointe de naïveté – principalement due au public visé je dirais – et qui rend ces livres-jeux moins attrayants qu'ils ne le furent – bien qu'ils le demeurent toujours incontestablement. Le temps les a recouvert d'une patine, écrin précieux qu'il est parfois dangereux de frotter. S'y attaquer en espérant une madeleine de Proust, c'est bien souvent confronter le souvenir des rêves d'un adolescent aux attentes d'un adulte, nimbés de nostalgie, et dont la prime jeunesse un peu candide a pris quelques rides. Mais à ma grande surprise, La Horde des Démons a particulièrement bien vieilli et je me suis plongé avec délices dans les beautés surannées d'une époque révolue. Pourtant, au fur et à mesure de ma lecture, je me suis rendu compte que quelque chose clochait. Outre la problématique des règles que nous verrons dans un autre message, il y avait quelques soucis de paragraphe qui, de ce que j'en ai lu sur le net, semblent n'avoir jamais été pris en compte. Ils m'ont conduit à m'interroger sur le récit et j'ai peu à peu remarqué que ce dernier souffrait d'ellipses non justifiées, d'incohérences flagrantes et possédait de surcroît quelques impasses narratives. À quoi cela pouvait-il bien être dû et ne serait-il pas possible d'y remédier ? Fort de ces questions, j'ai repris et réécrit la trame scénaristique. Mais pour ce faire, il me fallait aussi cerner et les sources de l'auteur des Quêtes du Graal et, dirais-je, ses objectifs romanesques. Il était donc nécessaire de faire une petite analyse. Celle-ci n'a pas la prétention d'être exacte ou de correspondre à la pensée ou aux intentions de J.H. Brennan. C'est simplement la manière dont je vois et je comprends les choses ; et cet avis personnel peut tout à fait être remis en question.

Donc, lorsque j'ai entrepris de relire La Horde des Démons, je savais m'attendre à une histoire très linéaire, mais fort bien écrite, nous immergeant dans l'univers du monde de Harn. Et cela n'a pas manqué. Pourtant, au cours de l'aventure, l'adulte a assez rapidement pris le relais de l'adolescent et les références, les inspirations de l'auteur ont commencé à poindre ici et là.
Certaines sont bien connues. La plus évidente et peut-être la moins contestable est celle de Conan. Et oui, tout comme le Cimmérien, Loup*Ardent est un barbare issu d'un univers dur et hostile, et où les Dieux ne servent pas à grand chose, sauf à permettre de jurer. Il a une sainte peur et une sainte horreur de la magie et il préfère régler ses problèmes à coups de poing ou d'épée. Il n'est d'ailleurs pas très civilisé au départ, tout comme le farouche guerrier hyborien. L'objectif de l'histoire s'oriente aussi vers ceux de ces scénarios caricaturaux de l'heroic-fantasy classique inspirés de Conan où le barbare musclé s'en va sauver une demoiselle la moins vêtue possible, de griffes de monstres tous plus hideux les uns que les autres … et ici ce sont des démons, êtres d'une autre dimension, ou niveau, comme Conan en rencontrera une foultitude. C'est ainsi que la scène finale nous met face à face avec un Prince Démon alors que la demoiselle est étendue nue sur un autel de pierre, prête au sacrifice. Il ne manquerait plus qu'une illustration de Brundage.

Dans la même lignée inspiratrice, on trouve Elric de Melnibonée et son épée Stormbringer, de Michael Moorcock. Outre l'épée maudite (Exterminator, mais qui s'appelle dans la V.O. Doombringer, autrement évocateur pour Stormbringer), la capacité du personnage à user de magie rappelle par certains aspects, Elric, tout comme la présence des démons peut évoquer les forces du Chaos. On pourra aussi lire dans l'un des PFA de l'aventure, la conclusion du cycle d'Elric telle qu'elle figure dans Le trépas du seigneur condamné, et où Stormbringer [attention, Spoil !] boit finalement l'âme d'Elric avant de disparaître dans les airs en riant, en ce sens où Exterminator se retourne avec joie contre son porteur maudit. Mais ce ne sont bien sur pas les seules références.

Une troisième, plus sourde et plus contextuelle de l'aventure du personnage, est celle de la série Dune de Frank Herbert, qui voit s'opposer deux maisons, celles des Atréides et celle des Harkonnens, sur fond de politique et de manipulations du Bene Gesserit. Tout comme dans le roman d'Arrakis, où les Harkonnens l'emportent sur les Atréides, la famille des Haarkons l'emporte sur les Xandines et les éradiquent presque complètement. C'est la survenue d'un élu, un messie caché dans le désert, qui renversera les Haarkons et restaurera le nom des Xandines. Et comment ne pas voir dans la Gegum, étrange sororité, cette organisation qui travaille en sous-main au destin des mondes, le Bene Gesserit. Il est à noter qu'une partie de l'inspiration d'Herbert provient de la mythologie grecque, et de la saga tragique des Atrides, famille d'une sauvagerie inouïe, ayant à leur actif meurtre, parricide, infanticide, inceste et matricide.

Mais, encore plus profond, derrière tout cela, se dissimule, à mon avis, un autre mythe ou une autre légende, comme vous voulez, puisé dans la mythologie arthurienne, mythologie qu'affectionne, on le sait, J. H. Brennan : le personnage de Perceval. Pour faire simple, on peut résumer Perceval en affirmant qu'il est un jeune homme élevé par sa mère comme un sauvage ingénu, mais qui n'en est pas un, à la foi naïve et qui ne connaît pas son père. Il part devenir chevalier (alors que sa mère décède), va à Carduel et parle à Arthur et sa cour, rencontre le vavasseur Gornemant de Gort qui l'adoube et se lance dans des exploits de chevalerie, jusqu'à la découverte de son identité puis du Graal. Notons en passant que le Kraal est le lieu où Loup*Ardent est censé mettre Yaléna à l'abri du danger – lieu qui va disparaître très rapidement de l'histoire. On retrouve en filigrane certains de ces jalons dans le personnage de Loup*Ardent ; par exemple, Gornemant de Gort est remplacé par Baldar (même âge, même rôle). L'un de ces jalons les plus classiques (et qui pourrait faire dire que Perceval n'est pas une source d'inspiration), c'est le schéma traditionnel du héros et du récit de sa formation. Il est confronté à une série d'épreuves dont il doit sortir victorieux et qui vont peu à peu le qualifier pour l'épreuve finale. Mais c'est aussi une histoire d'apprentissage puisque de Barbare du Désert Profond (une référence à Dune et aux Fremens), Loup*Ardent deviendra un magicien et noble respecté de sa communauté. Pourtant, l'apprentissage de Loup*Ardent a ceci de commun avec Perceval qu'il passe d'un monde de Nature à un monde de Culture. Tout comme le passage chez le vavasseur marque le début du changement d'état, le passage par le château Xandine marque pour notre héros un changement de statut social que l'auteur ne cessera de nous rappeler. C'est surtout dans son comportement social et sa magie – plus que dans le combat – que cette évolution se fait sentir. Perceval acquiert des talents inouïs de chevalier en 48 heures (ce qui d'ailleurs pose un problème mais qui sera résolu par son statut d'Élu, cf. ci-dessous). Loup*Ardent fait de même avec la magie. Il est tellement doué que dans la semaine où il acquiert ses pouvoirs, il délivre le roi Voltar d'un sortilège dans lequel il se trouvait enfermé depuis 200 ans sans qu'aucun des mages du royaume ne soient parvenus à l'en sortir. Cette progression en ligne droite dans l'aventure et dans l'évolution du personnage est assez classique des romans de chevalerie (je ne parle pas des péripéties qui elles peuvent prendre tours et détours) et va fatalement se retrouver dans la narration de Loup*Ardent qui de facto, est linéaire. Ce n'est pas une raison pour n'avoir pas offert plus de diversité en terme de chemins et d'expérience, mais ceci explique peut-être cela. Je pourrais développer cette évolution du comportement en évoquant son rapport aux femmes, la reconnaissance que le roi Voltar fait au jeune homme, sa démarcation du monde des roturiers... Mais vous l'avez compris, l'histoire nous présente l'évolution et l'ascension du personnage que nous incarnons. Il y a donc bien une sous-structure qui pointe le roman de chevalerie du doigt, adapté au public et à l'époque, en terme de renouveau héroïco-fantastique.

Il y a pourtant une dissonance : le château de Xandine qui figure la cour d'Arthur, devrait se trouver en début de récit, et non en son milieu. (J'ai toujours considéré, à tort ou à raison qu'Yveen était une des représentations de la reine Guenièvre, qui s'appelle Yvonne en langue anglaise. Mais on pourrait probablement arguer que le château Xandine figure également le château du Graal où se trouve le Roi Pêcheur.) Pourtant cette inversion sur la forme ne change rien au fond, tout comme faire du héros un sorcier, qui est une inversion du rôle social. Le château de Xandine reste au centre de l'aventure : c'est son médian encadré par les récits des marchands d'esclaves, redite de l'histoire. Cette symétrie des situations est une construction très fréquente dans les romans de chevalerie qui bien souvent se servent de la structure en forme de chiasme (ou tout parallélisme) pour permettre au récit de mettre en avant l'évolution des personnages, via un point de comparaison des motifs. C'est ainsi que la taverne figure effectivement un schéma narratif récurent de la caravane d'esclaves (avec les deux demoiselles, Jara et Landa) et qui permet à l'auteur de donner à voir la stature nouvelle du héros, son évolution, son changement.


Enfin, un dernier point doit attirer notre attention, peut-être le plus important, c'est le caractère d'élu du personnage. Il peut probablement expliquer le choix pour ces quatre sources. Conan est le moins évident – il n'est pas élu : il a juste un destin qui le fera finir roi ; et on le sait dès le départ car la première nouvelle du barbare, Le phénix sur l'épée, le présente déjà comme monarque. Elric est l'une des incarnations du Champion Éternel, Paul Atréide est Muad'dib, messie des Fremens et qui finira Prophète, et enfin Perceval est, justement en raison de sa vitesse de progression dans les arts de la chevalerie, l'élu destiné à trouver le Graal. Les signes de l'élection de Perceval parsèment tout le roman et – personnellement – j'ai toujours pensé que si Chrétien de Troie avait achevé son roman, Perceval aurait réparé ses erreurs, questionné le Roi Pêcheur et apporté le Graal pour sauver la Cour d'Arthur et la civilisation. Cette dimension d'élu est tellement prégnante qu'elle encadre le récit de La Horde des Démons avec comme introduction L'Oracle des Astrologues qui annonce sa venu, et dans le tout dernier paragraphe, les dernières lignes : « La créature l'a appelé « Messie » et a laissé entendre qu'elle lui avait tendu un piège pour le faire venir. ». Il va de soi que choisir de faire de son personnage une figure messianique aussi importante impose de structurer l'aventure en regard des prédictions de la prophétie et des actes, des prouesses, à accomplir : devenir roi, rebooter le monde, libérer un peuple, délivrer l'humanité des Démons. Du haut fait, du haut fait !
Pour conclure sur cette appartenance du récit de Loup*Ardent aux romans du Moyen Âge, on le voit offrir la promesse d'un Don contraignant à Tanith dans le volume 2, promesse typique des chevaliers de la cour du roi Arthur.


Alors bien sûr, tout ne coïncide pas. Ce n'est d'ailleurs ni l'objectif, ni l'intérêt : le père de Loup*ardent n'est pas (encore) mort, il ne recherche évidemment ni les aventures, ni l'amour courtois, le christianisme est absent ; mais la religion teintée de mythologie grecque (l'une des déesses de l'Oracle s'appelle Minerve, nom romain d'Athéna, l'Oracle, elle, se prénomme Séléna, fort proche de Séléné, déesse de la Lune ; une autre oracle cité est Coranna, peut-être à rapprocher du Coran puisque Brennan cite Allah) renvoie aux épopées grecques et romaines de type Odyssée ou Énéide. Néanmoins ces quatre sources d'inspiration peuvent nous permettre de comprendre où nous entraîne l'auteur, ses intentions et la manière dont l'histoire et le personnage sont conçus.
Mais pour quoi faire ? Et c'est là qu'est le problème. Car La Horde des Démons, comme Les Cryptes de la Terreur dans une moindre mesure, ne sont pas exempts d'incohérences, de raccourcis, d'inachèvements. Je ne voudrais pas trop dévoiler la matière que je travaille pour conserver une certaine surprise et une certaine fraîcheur à ceux qui décideront un jour de refaire cette aventure modifiée. Mais comme rien ne sera achevé avant je pense au moins fin 2021, on peut y aller gentiment.

Déjà, il y a un énorme problème dans les dates entre la fuite de Xandine du Kaandor et la dissimulation, puis l'âge de Loup*Ardent (cf. ci-dessous : Citations, qui décortique le problème). On ne cesse de s'interroger sur une Arcana qui nous soigne pour ensuite vouloir nous tuer. Il y a trois passages dans La Horde des Démons où les renvois de paragraphe sont problématiques : boucle sans fin, incohérence (un mort réapparaît). Des possessions et des Points de Vie sont oubliés. C'est tout de même étonnant pour un livre avec si peu de paragraphes de voir surgir au détour des péripéties autant de petites erreurs, inexactitudes, incohérences. Et surtout cette conclusion bâclée : que devient Yaléna, l'avons-nous conduite au Kraal, comment sommes-nous arrivé à Pélimandar, pourquoi recherchons-nous du Pouvoir (je veux dire, qu'est-ce qui nous a décidé à le refaire) alors que l'on vient d'en gagner ? L'un des points essentiels des romans de chevalerie, c'est le retour au point de départ, ici complètement absent, mais qui pointe le bout de son nez, comme une ellipse narrative, avec l'obligation de ramener Yaléna dans le Kraal. Mais du Kraal, on n'en entend plus parler, l'exploration de la cité est expédiée en 24 numéros, il y a des personnages aux comportements erratiques, des ellipses difficilement explicables. Bref, l'ensemble respire une certaine précipitation, comme si le travail avait été livré non terminé, ou plutôt terminé à la va-vite. La fin ressemble à une resucée à la Thongor avec le triptyque gagnant : monstre hideux / fille nue / barbare musclé. Il faut lire entre les lignes pour y voir les enjeux sous-jacents, quasiment abandonnés : piège du Démon, prouesse à accomplir pour  accéder à la quête suivante, reconnaissance de son statut par le héros. Et il y a l'inachèvement du motif de l'élu, le motif principal, pourtant présent à la fin du tome 1 comme au début et parfois dans certains dialogues du tome 2 : il est le Messie et il était attendu. Mais de cette connaissance des prophéties par la Horde des Démons et de qui la représente, il n'en est presque plus fait mention passé l'introduction des Cryptes de la Terreur. Ce n'est pas une incohérence en soi, mais bien un inachèvement de l'aspect messianique du personnage.

C'est donc l'un de mes objectifs avoués, reprendre le récit pour en homogénéiser les trames narratives, les développer en des arcs intéressants pour le lecteur-joueur, tout en m'appuyant sur les sources identifiées afin de faire correspondre cette structure, à la trame imaginée par H. J. Brennan. La quête du Kraal en fera bien sûr partie.


Citations pour tenter de comprendre l'incohérence chronologique

La Horde des Démons
« Le processus de ma mort a commencé il y a trois siècles ou plus. » : Donc le seigneur Xandine a dans le monde réel plus de trois cents ans.
« J'étais un noble parmi les Dalaï, pas un dirigeant mais un membre de l'aristocratie. […] À l'époque dont je vous parle, les deux maisons [Harkaan et Xandine] étaient en guerre. » : Donc il y avait une guerre larvée il y a trois cents ans entre ces deux maisons.
« Les Harkaan se conduisirent comme des brutes. Ils assassinèrent ma femme et enlevèrent mon fils qui n'était alors qu'un bébé. […] Les Harkaan ne me rendirent pas mon fils. » : Donc il y a trois cents ans, se produisit ce drame familiale : Loup*Ardent était déjà né.
« Je posais sur la vallée un Verrou Temporel. […] Aucun de ceux qu'il protégeait ne pourrait plus mourir. » : Ce qui s'accorde bien avec la première phrase, comme quoi Xandine aurait 300 ans.
« L'enfant se trouvant entre les mains des Harkaan. […] Je parvins à lui jeter un sort si subtil que les sorciers des Harkaan eux-même le crurent mort. […] Le cadavre de ce que l'on croyait être mon véritable fils fut emporté secrètement du Kaandor et caché dans le Désert. […] Grâce à mes sortilèges, il fut découvert par une tribu de Barbares du Désert. Je poursuivis ma guerre secrète contre les membres de la famille régnante du Kaandor. […] Il y a près de trente ans que cela dure. En l'espace d'une génération, j'ai pratiquement mis à genou la maison des Harkaan. » : Et là, on a un problème. Loup*Ardent aurait donc 30 ans. Outre que séduire une gamine de 16 ans à trente ans est d'un goût un peu douteux, l'âge de Loup*Ardent s'accorde à la durée de l'action de Xandine, mais pas avec la période où tout est censé avoir commencé. Et quel rapport entre trente ans pour éradiquer les Harkaans et les 300 ans du Verrou Temporel ?
« En m'appelant Vénérable Ancêtre alors que, en réalité, je n'ai que 28 ans de plus que vous. » : Il aurait donc 58 ans.
« Les ravages que vous observez […] sont la conséquence du Verrou Temporel. […] Le Verrou est presque parvenu à son terme. […] On commence à mourir dans la Vallée. […] Le Verrou absorbe notre substance et fait de nous des monstres. […] Bien que la désagrégation du Verrou Temporel ait dû donner à ces deux pièces l'apparence d'un long abandon. » : Il est important de comprendre comment fonctionne le Verrou Temporel si l'on veut essayer de clarifier la situation. Il puise son énergie dans son environnement, et donc aussi dans les êtres vivants, et semble les empêcher de mourir/de vieillir jusqu'à ce que les effets s'estompent, accélérant brutalement la décrépitude des êtres et des objets, qui finissent alors par mourir lorsque le sort s'achève. C'est un sort de zone, on en est donc prisonnier. Ceux qui en sortent, trépassent. Question : si Xandine peut détruire la maison Harkaan en trente ans, pourquoi s'enquiquiner avec un Verrou Temporel ?

Les Cryptes de la Terreur
« Voilà bien longtemps, le premier Seigneur Xandine entra en rébellion contre la maison régnante des Harkaans. » : Je pense qu'ici par premier, il faut entendre celui qui dirige, et pas le premier de la lignée.
« Ce Seigneur Xandine dut s'exiler au royaume du Harn. Pendant plus de trois mille ans […] le Seigneur Xandine réussit […] à les affaiblir. » : Alors d'abord, ce n'est pas ce Seigneur, mais le frère du Seigneur (le frère de Darkwood est le père de Loup*Ardent). Et maintenant, on passe de trois cents à trois mille ans. Quand je vous dis que la chronologie n'est pas cohérente : 30, 300 ou 3 000 ans ? On choisit quelle date ?
« Quel qu'en soit la cause, Voltar s'endormit pour ne plus s'éveiller. […] Sept générations de Chevaliers Régents ont dirigé en son nom depuis cette époque lointaine, presque 200 ans maintenant. Pendant tout ce temps, le corps toujours vivant du roi Voltar est resté étendu, hors des atteintes du temps. […] Xandine lui-même s'en était servi pour préserver la vallée durant son exil. » : Ces informations s'accordent bien avec la durée d'un Verrou Temporel de 300 ans et ses effets pour contrer l'action du temps.

On a donc bien un soucis de chronologie. J'ai donc choisi de modifier l'histoire pour que cette contradiction disparaisse. On est d'accord que le Verrou Temporel doit être conservé. Il explique l'état de la vallée, les individus qui peu à peu deviennent des monstres, la mort de Xandine, la connaissance que Loup*Ardent possède via son père pour libérer Voltar du sortilège idoine. Donc Xandine n'a pas mis 30 ans, mais 300 ans pour affaiblir les Harkaan. Et cela s'accorde je trouve très bien avec l'ensemble des descriptions. Elles nous présentent un sorcier patient, subtil, secret, qui préfère attendre 50 ans pour lancer une attaque tellement discrète que personne ne saura qu'elle aura même été lancée, plutôt que de risquer de se faire découvrir. C'est un stratège méticuleux et un mage redoutable.
Et Loup*Ardent ? Et bien ce que font les Harkaan du corps m'a tout de suite semblé peu crédible. Ils tuent le nourrisson. O.K. Mais pourquoi faire transporter le corps du Kaandor vers le Harn ? Il suffit de le brûler et fin de l'histoire. Xandine a donc dû accomplir trois actions : récupérer le corps endormi de son fils sous la barbe des Harkaan. Puis faire croire à sa mort (la sienne, pas celle de son fils) pour que ces derniers (les vilains Harkaan) n'aient plus besoin d'un enfant/adulte de substitution. Enfin, endormir magiquement le nourrisson – évidemment dans une version identique de l'Immobilité qui frappe Voltar, avant de l'abandonner vingt ans avant la fin du Verrou Temporel dans le Désert Profond.
Il reste à régler le problème de l'âge de Loup*Ardent. Franchement, le faire débuter guerrier expérimenté et lui donner moins de point d'Habileté qu'un gamin de 14 ans, cela ne tient pas la route. On reviendra sur les niveaux d'Habileté dans les futurs posts. Et puis considérer Loup*Ardent comme un jeune de 20 ans, beau et impulsif, me paraît bien plus raisonnable que de le faire paraître en homme de trente ans appréciant les jeunes filles de 16. Il est donc réveillé de sa stase par son père vingt ans avant le début de l'aventure.
On oublie évidemment les 3 000 ans.

Alors outre les sources et la mise en évidence des problèmes, j'ai surtout abordé ici l'incohérence de la chronologie. Si décortiquer ainsi la trame narrative et le contexte, explorer les pistes d'aventure, de bifurcation, de fins alternatives (il y en aura au moins deux), de développement de certains personnages, de OPT (il y en aura au moins un en plus de l'histoire normale qui vous permettra de faire l'aventure sans combattre) vous intéresse, dites-le moi et on en discutera ici. Cela vous spoilera un peu, mais vous connaissez déjà l'histoire, non ?

À lire vos commentaires, en espérant que ce post assez long ne vous aura non pas démoralisé, mais intéressé.
Goburlicheur de chrastymèles
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#2
Salutations, Astre*Solitaire, et bienvenue sur le forum !

Je n'ai pas joué à du Loup*Ardent depuis très longtemps, et jamais complété la série. Je ne saurais donc apporter le moindre argument face à ton analyse critique, que je me contenterai de trouver très impressionnante, et d'excellent augure pour la suite de ton projet !

Comptes-tu réviser cette saga avec ton propre style littéraire, ou en restant proche de celui de Brennan ?

Au plaisir,

Loi-Kymar
Souris ! Tu ne peux pas tous les tuer...
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#3
Bon courage en tout cas. Pour moi aussi, c'est une série qui m'a interpellé (super saiyan dans le tome 3, le retour à Xandine dans le tome 4) par sa sauvagerie, sa rustrerie, ses noms exotiques (Ben Beni Bar Jain...). Mais pas interpellé autant que toi visiblement ^^

As tu jeter un oeil sur les versions anglaises pour ce problème chronologique ?
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#4
A la différence des préquels, suites ou spin-offs, rebooter et augmenter un LDVELH qui, selon nous, mérite une seconde chance est une tendance qui émerge depuis quelque temps sur les forums : Ashim avec son Temple de la Terreur et Au Pays des Dragons, moi-même et la Galaxie Tragique (si un jour je m'y remets), quelque anglophone qui modifie le Manoir de l'Enfer pour qu'on assiste au sacrifice sans PFA et certainement d'autres que j'oublie ou qui sont restés à l'état de prototype dans le cerveau de leur auteur.
Loup*Ardent, notamment le 1 et ses illustrations magnifiquement sombres, est en effet une série qui a marqué les esprits, malgré ses nombreux défauts, notamment en termes de jouabilité et linéarité. Ce que tu proposes avec déjà énormément de détail est une augmentation substantielle et profonde de l'intrigue. On voit que tu as bossé ton projet et tu donnes l'impression d'avoir déjà réfléchi à tout.
Concernant la chronologie, je crois qu'en effet, il faut tabler sur 300 ans pour Xandine mais Loup*Ardent doit avoir 30 ans. C'est un héros un plus mature qu'un Loup Solitaire sans astérisque de 15 ans. Et s'il s'amourache d'une fille de 16 ans, c'est absolument cohérent dans un contexte médiéval/oriental, même si cela peut paraître malvenu pour nos valeurs morales actuelles (allo Game of Thrones ?).
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#5
J'ai lu avec plaisir de long post, qui me replonge dans bien des souvenirs. Très intéressant projet. Avec augmentation du nombre de paragraphes par tome je quide.
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#6
@linflas : "Au pays des Dragons", ce n'est pas une suite ?
Souris ! Tu ne peux pas tous les tuer...
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#7
Oui en effet, désolé Smile
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#8
@ Loi-Kymar : merci de ton accueil ! Je peux comprendre que tu n'aies pas terminé la série. La qualité baisse quand même pas mal une fois passé le tome 1. Pour le style, je vais essayer dans la mesure du possible de coller à celui de Brennan. J'ai néanmoins le mien propre et mes tics d'écriture personnels. Mais je pense être en mesure de fournir quelque chose d'assez approchant, à l'exception de l'humour - je n'utilise pas les mêmes ressorts humoristiques que Brennan. Mais pour les Loup*Ardent, je pense que c'est assez peu gênant.

@ Marcheur des Cieux : oui. J'avais vérifié pour Les Cryptes de la Terreur, et de ce que j'en avais vu, il n'y avait aucune date - rien dans l'introduction. Mais je voulais revérifier tout cela. J'ai donc recherché La Horde en anglais et j'ai comparé les deux versions pour tenter d'y voir plus clair. Il s'avère que le traducteur n'a pas touché au texte - de ce que j'ai pu lire. Sept mille ans sont 7 000 ans, huit cents ans aussi, et on a donc trois siècles et 30 ans, comme en français. Bizarre, non ?  

@ Linfas : merci ^^. Alors réfléchi à tout, non - car j'ai encore deux trois pistes qui n'existent qu'à l'état d'ébauche et qu'il me faut sérieusement scénariser. Mais le développement de l'histoire est en route. C'est d'ailleurs pour cela que je m'étais arrêté précédemment, car je me suis rendu compte que mon scénario devait être retravaillé plus en profondeur - ce qui d'ailleurs allait me permettre de briser en partie, mais en partie seulement, la linéarité. Il y aura probablement un fin possible dès le château de Xandine, une autre à l'auberge qui pourrait entraîner une variation dans le final. Tout cela est à l'étude.

Citation :Mais Loup*Ardent doit avoir 30 ans. C'est un héros un plus mature qu'un Loup Solitaire sans astérisque de 15 ans. Et s'il s'amourache d'une fille de 16 ans, c'est absolument cohérent dans un contexte médiéval/oriental, même si cela peut paraître malvenu pour nos valeurs morales actuelles (allo Game of Thrones ?).

Alors je dirais que ce n'est peut-être pas aussi simple parce que l'âpreté du monde n'est pas le seul critère qui entre en jeu. Si c'était le cas, je serais effectivement de ton avis. Dans un univers « médiévisant » et farouche, les jeunes adolescentes, chez nous, seront sûrement considérées comme des femmes vers 15 ans, avec toute la brutalité du monde masculin qui accompagne ce changement de statut dans de tels univers. C'est d'ailleurs ainsi que Baj considère la jeune Lana - 16/17 ans dans le texte : une femme, esclave de surcroît, et dont il peut abuser en toute tranquillité - parce que c'est normal dans ce genre de contexte.
Mais déjà, certaines descriptions du livre nous indiquent bien que Loup*Ardent est jeune. Page 34 : « Vous êtes Loup*Ardent. Jeune, fort, beau et barbare. » ; au paragraphe 140 : « Ou tout simplement que vous êtes jeune et plein d'ardeur, épris d'aventure... » ; § 144 : « J'ai vu un jeune et farouche Mangeur de Champignons... ». Alors on pourrait considérer que Baldar étant un vieillard, 30 ans, c'est jeune. Mais le commentaire de la p. 34 est celui en italique. C'est la voix qui s'adresse au joueur que nous sommes. Et trente ans, si ce n'est pas vieux, ce n'est probablement plus jeune.
Ensuite, justement parce que nous somme dans un environnement sauvage et féroce, la durée de vie des gens est sûrement moins longue que la nôtre. Trente ans, cela fait déjà tout de suite mâture et expérimenté.
Puis aussi parce que - mais ça, ce sont les règles qu'il faut de toute façon reprendre - Loup*Ardent débute avec 0 en Habileté - c'est-à-dire moins que tout le monde, alors qu'il est censé être un guerrier. C'est donc plus facile d'expliquer une faible expérience pour un combattant de 20 ans que pour un combattant de 30.
Enfin et peut-être plus fondamentalement, à cause de la notion d'apprentissage, d'élu, d'évolution. Ce sont bien souvent de jeunes gens qui se lancent dans ces quêtes initiatiques, qui évoluent et se transforment en se mesurant au danger de l'aventure. On est d'accord pour dire que ce n'est pas systématique. Mais il me semble qu'ici, c'est ce qui convient le mieux. Mais je ne prétends pas avoir raison, hein. Il y a peut-être des arguments que je n'ai pas vus ou que j'ai mal interprétés.

@ Dragonide : un grand merci, j'espère y parvenir et te faire... euh, quide ? Je ne connais pas le verbe quider. Mais merci quand même ^^ et ravi que la lecture t'ait plu.
Goburlicheur de chrastymèles
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#9
En ce qui concerne Loup* Ardent, j'ai toujours détesté cette série.
Le fait de parler du héros à la troisième personne fout déjà tout en l'air. On est dans un livre dont VOUS êtes le héros, c'est à dire qui s'adresse au lecteur, l'interpelle, c'est à lui de s'identifier, de s'incarner dans le héros et de faire ses choix. Avec cette troisième personne, le lecteur n'est plus le héros, il n'est plus que le spectateur des péripéties d'un autre, à la limite un Deus ex machina qui décide pour un autre. L'essence même de l'interactivité du livre en est foutue en l'air.
Viennent ensuite des règles bordéliques, mal foutues, obscures, infernales, qui brisent le rythme et achèvent de dégoûter de l'histoire. Signalons aussi des illustrations particulièrement moches à mon goût.
Enfin, l'histoire est d'une banalité affligeante, avec en héros une sorte de Conan de seconde zone, genre Tar, Arak fils de la foudre, Warlock et autres avatars du cimmérien qui hantaient les rayonnages des maisons de la presse de ces années 1980 où l'Heroic Fantasy avait le vent en poupe.
D'abord séduit par des couvertures réussies, j'ai très vite laissé tomber cette série qui n'a absolument rien pour elle selon moi.
Anywhere out of the world
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#10
Quider = supposer
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#11
@ VS : Merci de ton retour VS.

Cette série est pour moi un très bon souvenir et un énorme potentiel gâché. Mais je comprends qu'on puisse la détester (règles, incohérences, etc.).
J'estime, en fait, dans l'ensemble, que tes arguments sont parfaitement justifiés. J'expliquerai néanmoins plus avant dans la partie règle, la manière dont j'analyse le pourquoi de la troisième personne qui, de mon point de vue, demeure tout à fait pertinent, mais qui oui, peut déplaire et diviser.
Pour les règles, à peu près tout le monde est d'accord. Il n'y a je crois que deux ou trois personnes sur l'ensemble des forums que j'ai lus les ayant trouvées faciles et ludiques. Un peu plus de personnes ne les trouvent pas si difficiles, mais l'immense majorité est d'accord pour dire qu'elles sont injouables et qu'elles dégoûtent de lancer les dés.
Là où je ne suis pas d'accord avec toi, c'est sur la banalité de l'histoire - justement. Loup*Ardent n'est pas un avatar de Conan, ou de Tar. Il mêle intelligemment plusieurs archétypes, il progresse, évolue, devient mage, noble, louvoie entre destiné et libre-arbitre ; l'histoire varie les décors, les personnages, les situations, l'ambiance est sombre et il y a d'intéressants retournements de situation. Mais tout n'est pas parfait, loin de là. Comme je l'ai dit, la fin du 1, et pire encore du 2, semblent bâclées et pour le coup, donnent à voir ce cliché que tu dénonces. Mais tu as tout de même peu d'histoires de LDVELH où tu joues un guerrier mage qui assiste à un viol avant de tuer et de boire l'âme d'une jeune serveuse par mégarde. L'ensemble manque peut être de noirceur dans l'esquisse du personnage, mais pour l'époque - 1984 - c'était déjà pas mal.

@ Dragonide : merci, j'ignorais complètement.
Goburlicheur de chrastymèles
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#12
Les règles - Entrée en matière


J'avais arrêté mon choix de règle l'année dernière. Mais depuis, je suis peu à peu en train de changer d'avis, mais sans être sûr de faire le bon choix. Il y aura donc des aller-retours entre un système auquel j'ai réfléchi et un système sur lequel je réfléchi et pour lequel je m'interroge pas mal. J'espère que cela ne vous paraîtra pas trop confus.
Ensuite, je tiens à remercier tous ceux et toutes celles qui me donnent leur sentiment, même si cela ne s'accorde pas avec mon point de vue, pour réfléchir sur la série. Lorsque Linflas m'indiquait que pour lui, Loup*Ardent devait avoir trente ans, c'était une question que je ne m'étais pas posée. J'y ai donc réfléchi en essayant de rester le plus objectif possible. Merci donc à toi Linflas, même si ma réponse ne s'accorde pas avec tes souhaits.

Après avoir donné un aperçu de la contextualisation de l'histoire, je vais essayer à présent de parler des règles de la série Loup*Ardent. Il y a bien des choses à en dire et la première des questions est : mais qu'est-ce que l'on va bien pouvoir faire de ça ?
Car oui, les règles sont mal écrites. Il y en a qui ne servent à rien (la protection), d'autres qui semblent compliquées juste pour le plaisir (la multiplication par huit) et la règle du jeu de manière générale comporte son lot d'erreurs et d'imprécisions, mais aussi dans certains cas de lacunes inexplicables qui empêchent tout simplement de jouer, comme les tests de compétence, ou l'utilisation de la magie. On est face d'une énorme machine à gaz, injouable, assurant la mort du personnage à de multiples reprises et ayant pour conséquence probable le dégoût du joueur qui soit, referme le livre, soit, laisse tomber les règles.
Que devons-nous donc faire ? Tout balancer et prendre un autre système de jeu ? C'est le choix qu'ont fait certains, comme Vador59 qui, me semble-t-il, a supprimé la multiplication par 8 et revisité le système de combat pour le rendre plus rapide, plus fluide et plus équilibré. (Affirmation qui ne se base que sur les messages des forums, les nouvelles règles n'étant malheureusement plus consultables). Et c'est aussi l'idée que j'avais eu au départ mais que j'ai abandonnée, puis sur laquelle je suis revenu.
Garder quelques principes mais réécrire le reste ? Cette solution est très compliquée car les principes qui dirigent le jeu induisent naturellement l'usine à gaz qu'est Loup*Ardent : une approche rôlistique, des combats qui se veulent davantage simulationnistes (fatigue), une différenciation joueur/personnage joué qui a une incidence sur les caractéristiques, l'expérience qui est prise en compte, une magie puissante qui brise les règles.
Ou bien tenter de conserver les règles pour ce qu'elles sont mais les ajuster de façons à ce que ce qui les rend injouables disparaisse ? Là aussi, c'est compliqué, mais peut-être moins que dans le second cas. Et puis cela permet de conserver l'originalité, la touche qui rend cette série aussi particulière. C'est donc finalement l'option que j'ai choisie. On conserve les règles en l'état, mais on les adapte, fortement parfois, on les complète, on les homogénéise, on les équilibre. Néanmoins, après  plusieurs tests, je me suis rendu compte de deux soucis : la nécessité d'user d'une calculatrice, et la toujours longue durée des combats. Ils ne se sont raccourcis que de quelques assauts.
Je suis donc parvenu à un certain équilibre – de mon point de vue – mais pas à une réelle fluidité du jeu. Ce qui m'a fait retourner à un système qui supprimerait la plus inutile des opérations du jeu : la multiplication par huit. On va en reparler au cours de cette présentation des règles, mais pas dans l'immédiat.

Néanmoins, il demeure une autre interrogation. Que faire pour celles et ceux qui ne veulent pas de ces règles lourdingues, mais qui souhaitent tout de même profiter de l'aventure ? Habituellement, ils finissent pas passer outre les combats pour aller simplement au numéro gagnant : « Préparez-vous à devoir combattre quatre démons de la Horde bien survitaminés, le seigneur de votre maison rivale, grand Mage, qui possède tous les sorts et des masses de points de pouvoir. Bonne chance. Ah ! J'oubliais : Exterminator boude dans son coin, donc finit les Points de Vie en rab … -_-'  Bon, on va dire que je gagne. » Bref, en un mot comme en cent, ils trichouillent. Et si on rendait la trichouille officielle ? Cela voudrait dire que l'on zapperait la règle inadaptée et qu'en fin de paragraphe, on proposerait quelques alternatives de vraie fausse triche, puisque le combat n'aura pas été livré. On va se garder cette idée dans une coin de la tête et continuer tranquillement.

Nous savons tous que cette série à vue le jour en 1984. Cela faisait environ 10 ans que le jeu de rôle existait. Voici une petite liste, très partielle (environ 70 jeux de rôle sont parus durant cette période) qui montre brièvement l'évolution du jeu de rôle et de ses règles.

1974 : Dungeons and Dragons (3D6, caractéristiques, races, classes [avant 1983], puis mélange race/classe [à partir de 1983, merci à Lyzi Shadow Wink ], pas de compétence, niveau, point de ...) ;
1975 : Tunnel and Trolls (tout pareil) ;
1977 : Chivalery and Sorcelery (pareil, en plus complexe), Traveller (2D6, caractéristiques dont statut social, compétences … Aurait-on ici un ancêtre direct de Loup*Ardent ? ) ;
1978 : AD&D (3D6, caractéristiques, races, classes, niveau, point de..., alignement, moral, JS), Runequest (une rupture : caractéristiques et compétences en pourcentage, points de vie localisés) ;
1980 : Bushido (le D20, comme D&D, caractéristique sur 40, compétences en pourcentage et profession) ;
1981 : Gamma World (variante de AD&D), Call of Cthulhu (variante de Runquest, une grande importance de la profession), Stormbringer (idem) ;
1982 : Warhammer (caractéristiques, D10, combats mortels), Rolemaster (tout est basé sur le D100, caractéristiques et les innombrables compétences), Star Frontier (race, caractéristiques et spécialités, le tout en pourcentage avec malus/bonus) ;
1983 : James Bond (compétences à multiplier par la difficulté pour obtenir un pourcentage de réussite).
[Merci au site Le Grog, sans qui je n'aurais pu synthétiser tout cela.]

On remarque tout de suite que ces jeux se basent sur des caractéristiques, puis introduisent les compétences et enfin proposent la réussite sur 1D100, pour simuler un pourcentage. Et aussi que cette série Sagas of the Demonspawns se démarque des séries habituelles de Livre dont vous êtes le héros par un ton plus mâture. J'ai comme le sentiment que l'influence du JdR n'y est pas étranger.
Or, il semble que cette idée ne soit pas en elle-même un mystère. Elle figure dans l'introduction de La Horde des Démons, mais en anglais seulement. Ces trois pages ont été réduites à un paragraphe de 4 lignes en français. Pour lire cette introduction, c'est sur Archive.org, ou sur La Taverne, puisque Kwll nous l'avait déjà posté.

Pour résumer, Brennan décrit l'essor du JdR et parfois la difficulté de réunir une équipe. D'où l'idée de proposer des aventures Solo qui reprennent le système de règle du jeu de base, mais sans MD. De là, pour éviter, dit-il, d'avoir à débourser des sommes folles juste pour acquérir un système de jeu, le concept de tout réunir en un : le système et l'aventure Solo. C'est de ce principe qu'est né la saga Loup*Ardent. Je cite AllezAu14 : « Cela ferait de Loup*Ardent un méta-jeu : VOUS ne jouez pas le barbare : VOUS jouez le joueur de Jeu de Rôle en train de jouer le barbare. ».
Pour confirmer cette idée, jetons un coup d'œil sur les caractéristiques : il y manque, si l'on se base sur AD&D/D&D la Sagesse et l'Intelligence. Mais on pourrait aussi bien dire l'Esprit, le Savoir, l'Intellect, l'Intuition, bref, le cerveau du joueur quel que soit le nom qu'on lui donne. Voilà pourquoi le joueur prend les décisions pour Loup*Ardent, voilà pourquoi il y a cette troisième personne, parce que nous jouons le joueur qui incarne Loup*Ardent, comme à une table de jeu de rôle. C'est un concept – on aime ou on n'aime pas – et je ne suis pas certain d'ailleurs qu'il ait jamais été repris par la suite.

Il semble que l'auteur des Épouvante ! ait cherché un système qui, à l'aide de 2D6, les dés classiques pour faire un LDVELH, permette de simuler un pourcentage. Bon, je ne suis pas un matheux, j'en suis même très très loin, mais je crois qu'entre lancer un dé de pourcentage (je ne sais pas d'ailleurs s'il y a une différence entre un vrai D100 et 2D10) et 2D6, on n'obtienne pas les mêmes probabilités de réaliser un score lambda. Avec 2D6, c'est 7, et cela flanque tout idée de pourcentage en l'air.
Et donc, la première question est de savoir, si l'on suit l'idée de simuler une aventure de JdR Solo, s'il ne serait pas préférable de laisser tomber les 2D6 et de passer au D10, D12, D20 et D100. D'autant plus qu'aujourd'hui, il est très facile de simuler un lancer de dé via les dés virtuels sur le net. Mais est-ce que les lecteurs/joueurs auront envie de lancer des D4, D8 et autres dés polyédriques ?
Ensuite se pose la question de la fluidité. Il est assez aisé, en se basant sur quelques règles de jeux de rôles, de sortir un système de jeu de type JdR, simulationniste ou non, mais qui s'essaie à un minimum de vraisemblance, comme dans la gestion des combats avec la Surprise, l'Initiative, l'Assaut, l'Attaque, la Parade, la Protection, les Dégâts, les armes à distance, la différence corps à corps et armes blanches, la Fatigue, l'Encombrement, la Fuite, le Moral, etc. Mais est-ce ainsi que veulent jouer les lecteurs ? Où mettre le curseur entre fluidité et système de JdR à l'ancienne ? La question n'est pas simple (enfin pour moi) et se retrouve surtout, me semble-t-il dans le nombre de dés à lancer. Dans la première version, vous ne lancez que 4D6 (2x2) par Assaut, un combat durant en moyenne 13 Assauts. Mais les chances de victoire pour L*A augmentent. Dans le nouveau système, il y a davantage de calcul (valeur pour toucher, armure, bonus/malus divers) et de jets de dé, mais on tourne autour de 7 Assauts (en cours de test).
Je laisse pour le moment de côté l'équipement – inexistant dans la série – et la magie que j'ai pas mal revue et augmentée, et qui fera l'objet d'un article dédié.

Donc, pour conclure sur ce premier post de règle, je vais conserver le récit à la troisième personne qui correspond tout à fait au concept de départ, en essayant de renforcer le lien de connivence entre le joueur et le narrateur et en impliquant davantage les décisions liées à l'intelligence et la sagesse du joueur – ce qui revient à supprimer complètement les décisions du style lancez un dé. De 1 à 3, vous allez à gauche et de 4 à 6 vous allez à droite.
Ensuite, je reste sur l'idée de règles compliquées. Loup*Ardent suppose un certain niveau de simulation, dû à son origine, et s'éloigne donc assez des LDVELH de type DF. Mais compliqué ne veut pas dire complexe. J'aimerais bien parvenir à produire une mécanique qui, en deux ou trois lancers, permette la gestion de la plupart des problématiques de jeu. Et donc, une fois la logique du système intégrée, il s'agira simplement de ne pas oublier les divers modificateurs/variables.
Enfin, les dés. Là j'avoue que j'hésite encore. Cela dépendra probablement beaucoup du système que je teste. S'il fonctionne comme je le veux, alors il y aura des dés polyédriques. Sinon, il est probable que je revienne aux 2D6. Mais rien n'est encore fixé.

Le message suivant se consacrera aux règles réajustées (R1), avec ensuite un commentaire sur les nouvelles règles en cours de test (R2), histoire de comparer les deux.
Goburlicheur de chrastymèles
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#13
(03/08/2019, 14:24)Astre*Solitaire a écrit : nous jouons le joueur qui incarne Loup*Ardent, comme à une table de jeu de rôle. C'est un concept – on aime ou on n'aime pas – et je ne suis pas certain d'ailleurs qu'il ait jamais été repris par la suite.

On bien : le lecteur incarne Loup*Ardent, et on le suppose familier des tablées de JDR, donc des caractéristiques et pourcentages.
Dans mon expérience personnelle, j'avais lu la saga sans connaître le concept de JDR (la référence explicite ayant été gommée de la traduction française), j'avais juste pris La Horde des Démons pour un livre-jeu aux règles un peu plus compliquées que d'hab' et incarné mon perso sans me poser de questions. Sans spécialement tiquer sur la 3ème personne, ou en la voyant comme une concession au roman traditionnel.

(03/08/2019, 14:24)Astre*Solitaire a écrit : l'utilisation de la magie

Etonnamment sous-utilisée, les sorts étant souvent peu consistants, durs à lancer... Je ne me servais quasiment que du dard empoisonné, je crois. Une attente forte.
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#14
Bien que j'ai eu à l'époque une toute petite idée du jeu de rôle, j'ai fait exactement comme tu as dit, c'est-à-dire que j'ai considéré que j'incarnais Loup*Ardent, et point barre. C'est en notant les remarques de certains qui trouvaient cette approche dommageable, et en cherchant à en comprendre le pourquoi, que je me suis rendu compte (mais je ne suis pas le premier) qu'il s'agissait d'un vrai concept de l'auteur, occulté dans la VF. Maintenant, effectivement, ce n'est parce que Brennan nous incite à le lire comme cela, qu'il faut le faire. Chacun est libre de lire l'histoire et de se l'imaginer comme il veut et il semble assez naturel de se ranger à la perspective que tu présentes.

J'ai réécrit un premier grimoire pour L*A (10 pages). C'est une première version qui rend les sorts jouables dans les règles d'origine ... mais qui ne revoit pas le système, ni ne se penche sur comment jouer les ennemis avec des Points de Pouvoir. Il y a un spoil dedans - cela te révèlera une de mes pistes de travail, mais bon, ce n'est pas bien méchant. Si cela te dit, je peux t'en faire un PDF.
Goburlicheur de chrastymèles
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#15
Juste quelques mots pour te féliciter et t’encourager dans l’entreprise que tu t’es fixée , et qui, j’espère, parviendra au bout.

J’entretiens une relation amour/haine avec Loup*Ardent, dont j’apprécie énormément l’univers, le ton adulte, les personnages… tout en détestant les règles aussi compliquées que bancales et pas mal de passages très mal pensés. Un reboot de la série qui en corrigerait les défauts, j’adorerais.

Il y a beaucoup trop longtemps que j’ai lu les tomes pour pouvoir apporter un avis sur le travail en cours, mais ça ne m’empêchera pas de le suivre avec un grand intérêt.
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